STEPHEN FREARS: Dirty Pretty Things

„Dirty Pretty Things“ est le meilleur film de Stephen Frears depuis son adaptation des „Liaisons dangereuses“ de Choderlos de Laclos.

„Les Liaisons dangereuses“ (1988) mises à part, Stephen Frears n’est jamais meilleur que quand il ne voit pas trop grand. Les „petits“ films, comme „The Snapper“ (1993) ou „High Fidelity“ (2000), semblent lui convenir le plus, ce qu’il prouve à nouveau avec „Dirty Pretty Things“, où il excelle véritablement dans l’art du cinéma.

Frears se tourne ici vers le sujet de l’immigration clandestine, qui doit bien profiter à quelqu’un et qui donne ainsi lieu aux crimes les plus crapuleux. Le réalisateur voulait montrer avant tout „l’envers du décor londonien, du côté sordide de la vie où des êtres commettent l’impensable pour tout simplement survivre“.

„Dirty Pretty Things“ se base sur un scénario en béton de Steven Knight, présent sur les plateaux pendant tout le tournage. „Cela permet un travail d’orfèvre sur un texte pour lequel j’ai un respect total. Ainsi, s’il m’arrive de vouloir effectuer des changements, il est là pour en discuter“, a expliqué Stephen Frears à la presse internationale.

Ce scénario parle notamment – et c’est là son moindre sujet – de l’amour qui s’installe entre deux clandestins: Okwe, un Nigérien qui fait le taxi en journée et travaille comme réceptionniste d’hôtel la nuit et Senay, une Turque, qui nettoie dans le même hôtel, malgré le fait que sa demande d’asile lui interdit tout boulot rémunéré pendant six mois … mais il faut bien survivre.

Autour de leur amour naissant se joue un trafic d’organes des plus abjectes: en échange d’un passeport, Juan – dit Sneaky -, le chef de service de l’hôtel, attire des immigrés clandestins pour que ceux-ci lui vendent un rein, synonyme du gros lot sur le marché noir. Et qu’Okwe soit médecin pourrait régler bien des problèmes concernant les opérations interdites nécessaires à ce trafic. Mais voilà, Okwe a beau être clandestin, il est honnête, et ce à un point presque maladif. Jusqu’au jour où c’est Senya qui voit dans cet échange criminel l’unique espoir de bonheur qui lui reste …

Stephen Frears filme cette histoire sordide comme un thriller bien mené, tout en permettant plusieurs niveaux d’interprétation.

Le décor de l’hôtel de luxe devient étonnamment oppressant sous l’oeil de sa caméra. A ce niveau, Kubrick a montré le chemin avec „Shining“ et Frears montre ici qu’il a parfaitement compris cette leçon de cinéma.

Ne manquent plus que des acteurs et actrices qui savent remplir tout ça de vie. Et là, Stephen Frears n’a pas pu mieux tomber qu’avec
Chiwetel Ejifor, Audrey Tautou et Sergi Lopez.

Notez tout d’abord l’éclectisme de ce casting. Pour parler d’immigration clandestine, Stephen Frears rempli son film d’acteurs et d’actrices originaires des quatre coins du globe. Ce qui a posé quelques problèmes de langues lors du tournage: Okwe est joué par Chiwetel Ejifor, une révélation. Celui-ci est bien d’origine nigérienne, mais c’est sa nationalité britannique qui lui posa problème, puisqu’il a dû imiter un accent nigérian qui ne lui était plus familier du tout.

Juste vengeance

Audrey Tautou joue Senay – une Française qui interprète une Turque qui s’exprime en anglais. Pour ceci Tautou a profité de l’aide d’un „coach“ vocal et a cherché à discuter avec des femmes turques afin de parfaire ses intonations. Ce qui lui a réussi à merveille, puisqu’elle offre ici une composition qui dépasse avec aisance celle tout en „grands yeux“ de son Amélie Poulain.

Finalement, Sergi Lopez joue un Espagnol. Facile pour lui, me direz-vous. Mais il atteint ici un niveau d’expression de ce qu’il y a de malsain et de profiteur dans l’homme, digne de la vilaine sorcière dans „Blanche Neige“ de Walt Disney … cela dit sans aucun reproche de jeu trop caricatural. Il est tout simplement méchant à souhaits – souvent le diable en personne – et le destin que lui réserve „Dirty Pretty Things“ laissera sortir le public des salles de cinéma, le goût incomparable de la juste vengeance dans la bouche.

En conclusion: scénario, réalisation et interprétations font de ce film un véritable régal, qui vous tiendra en haleine de bout en bout.

A l’Utopolis

Le diable
en personne …
Sergi Lopez dans
„Dirty Pretty Things“.


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