SAM GARBARSKI: De l’importance d’être Mensch

Au départ, on se dit que „Le tango des Rashevski“ de Sam Garbarski possède tous les ingrédients d’une comédie française moyenne. Au final, quelque chose de magique a dû se produire.

Elle, c’est la „goy“. Lui, c’est le Juif. Ludmilla Mickaël et Michel Jonasz dans „Le tango des Rashevski“.

Il fait bon de voir la qualité des co-productions luxembourgeoises. „Samsa“ est la maison de production représentant notre fierté nationale dans le cas de cet ouvrage cinématographique franco-belgo-luxembourgeois, dénommé „Le tango des Rashevski“. La plus grande qualité de ce film, par rapport à nos sentiments grand-ducois, est justement qu’il n’a rien de luxembourgeois de par son sujet. En effet, le Luxembourg se distingue traditionnellement plutôt par ses réactionnaires catholiques que par ceux et celles juifs et
juives.

Le judaïsme est le thème principal du „Tango des Rashevski“. Tout ici tourne autour de cette religion et de ce qu’elle représente au quotidien.

A ce niveau, ce long métrage est une jolie petite introduction au judaïsme. Mais sa grande force est, en fait, que c’est là une production cinématographique de plus en plus rare de nos jours, c’est-à-dire un film à personnages. Avant de montrer de l’action ou encore diverses situations plus ou moins cocasses, on est ici en face de gens, qui dans le „Tango des Rashevski“ acquièrent une réalité rafraîchissante sur l’écran.

Il y a là tout d’abord un personnage absent: grand-mère Rosa, en rogne avec la religion, qui a tout de même décidé de passer sa mort dans le carré juif du cimetière. Une décision qui fait démarrer tout le film et pencher ses personnages en direction du désarmement émotionnel. Ces derniers se caractérisent tout d’abord par leur grande tendance au cliché: le vieil oncle charmeur et charmant, qui représente la sagesse familiale; le jeune Juif qui a fait son service en Israel et qui – mais comment se peut-il? – tombe amoureux d’une jolie jeune maghrébine; le „goy“ qui – par amour pour la soeur, qui cherche désespérément ses racines dans un retour à l’orthodoxie judaïque – veut se convertir; la „goy“ qui – par amour pour son mari – s’essouffle à être plus juive qu’une Juive; le frère pour qui toutes ces questions de religion n’ont aucune importance; etc.

Aux acteurs et actrices de donner vie à cet amoncellement de poncifs. Et, oh merveille, ils/elles y réussissent parfaitement. Bien que le jeu de Daniel Mesguich semble bien figé pour ce film qui balance adroitement entre drame et comédie, les autres comédien-ne-s offrent un spectacle absolument réjouissant.

La mention spéciale revient à Nathan Cogan en vieil oncle et son regard moqueur sur la vie. Michel Jonasz et Hippolyte Girardot – qui renaît carrément en tant qu’acteur dans ce film -, sont tout aussi délectables à regarder. „Le tango des Rashevski“ propose ainsi toute une palette d’acteurs et d’actrices remarquables.

Circoncision tardive

Evidemment, ce film de Sam Garbarski, co-écrit avec Philippe Blasband (responsable – entre autres – de l’excellent „Une liaison pornographique“), n’a pas de solution-miracle aux conflits religieux internes qu’il décrit. Ainsi, chaque personnage choisira sa voie pour devenir un „Mensch“ (pour le vieux Juif, c’est très clair ce qu’est un „Mensch“, de là à l’expliquer aux autres …): les uns le feront tout en douceur, les autres de manière plus radicale, circoncision tardive incluse.

Et ça raccorde à mort entre les différents personnages durant une heure et 40 minutes. Mais, entre deux raccords, d’une scène à l’autre, d’un dilemme au prochain, les spectateurs et spectatrices s’attachent, les clichés initiaux deviennent crédibles et l’hymne à la recherche de soi-même en toute tolérance passe sans mièvreries, avec un humour bien sympathique. Ainsi, „Le tango des Rashevski“ se glisse subrepticement dans le coeur du public, malgré le fait qu’il n’y a pourtant là, au départ, que les ingrédients d’une comédie française assez moyenne. Un grain de magie a dû s’introduire en cours de route.

A l’Utopia


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