DIVORCE: Un peu, beaucoup, plus du tout …

En matière de législation du divorce, le Luxembourg se met au standard européen. Mais le gouvernement ne semble pas tirer les leçons des expériences de nos pays voisins.

Une fois de plus, comme si souvent pour les réformes touchant à des questions de société, le Luxembourg est parmi les derniers pays de l’Union européenne à moderniser sa législation en matière de divorce. Nous allons donc prochainement tenir compte, comme nos voisins, de l’approche évoluée des citoyens et citoyennes en matière de mariage et de dissolution. Mais pas trop: en effet, les discussions autour de la „déjudiciarisation“, ont culminé partout en Europe dans la revendication d’un „divorce sans juge“. Or elles n’ont pas été transposées, à ce jour, dans des textes de loi des pays membres de l’Union, et encore moins dans le projet de loi proposé par le ministre de la justice Luxembourgeois. Certes, les nouvelles dispositions prévues tendent à la pacification d’une procédure qui souvent ne fait qu’approfondir le fossé entre les époux. Mais elles n’impliqueront pas moins les juges et le barreau que jusqu’ici. La réforme consistera essentiellement dans l’abolition du divorce pour faute et dans son remplacement par un „divorce pour rupture irrémédiable des relations conjugales des époux“.

Et c’est là que le bât blesse. Si au Luxembourg, les cas de divorce pour faute ont sensiblement diminué (sept en 2001 contre 724 par consentement mutuel), les organisations de femmes soutiennnent que dans des situations particulières, il a encore son sens. Karin Manderscheid, présidente du „Conseil national des femmes“, dans son introduction à la table ronde de jeudi, a soulevé la question: „Le divorce pour faute doit-il continuer à exister pour que, dans les cas graves de violations des droits de la personne, la victime ait la possibilité de recevoir satisfaction quant au tort qui lui a été imposé?“

S’il n’y a pas de chiffres précis, le Luxembourg n’échappe pas à la règle générale: la plupart des procédures en divorce sont introduites par des femmes. En France par exemple, l’initiative est féminine à plus de 70 pour cent. Il est d’ailleurs probable que, en raison de la lourdeur de la procédure actuelle, de nombreux „consentements mutuels“ ne le sont que sur le papier: dans les pays voisins, les divorces pour faute atteignent encore les 40 pour cent.

Quoi qu’il en soit, il paraî t fondé de prévoir des dispositions pour les cas de violence, voire de domination conjugale. Il existe d’ailleurs des pays où ceci est actuellement le cas: l’Allemagne et la Suisse connaissent la disposition de la „Unzumutbarkeit“. Lors d’un tel constat, le mariage peut être dissolu en moins d’une année. En France, les juges peuvent prononcer une résidence séparée des époux divorçants en cas de mise en danger de la sécurité du/de la conjoint-e ou des enfants. Et dans le jugement, des faits comme la violence physique ou morale peuvent être constatés. Enfin, un article de (la) loi prévoit la demande de dommages-intérêts à l’occasion de la procédure de divorce.

Au-delà du cas particulier de la violence, la mise en question du divorce pour faute pourrait introduire au Luxembourg le débat sur les obligations des époux. Des trois devoirs principaux du couple marié formulés par le Code civil – fidélité, secours et assistance – au moins le premier est aujourd’hui mort et enterré. Alors que le partenariat s’annonce comme une version allégée du mariage, ce dernier (re)devient un contrat banal, corrodant au passage le mythe romantique de l’amour éternel. La dédramatisation du divorce, pour salutaire qu’elle soit, constitue une étape de plus dans le processus de dissolution du mariage. Ce qui n’arrangera pas le CSV, pourtant porteur de la réforme envisagée.


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