REGARD SUR LA BEDE ESPAGNOLE: Originalité et ouverture

La bédé espagnole, même si elle est peu connue, a son identité et son histoire propre. Pour en savoir plus, rendez-vous ce week-end au Cercle municipal.

Ce samedi il y aura mille choses à faire, comme voir le festival d’Eurovision, faire la lessive si on revient du congé de pentecôte, aller à la côte belge ou faire un tour au vernissage, au Cercle municipal, de l’exposition „Un regard sur la bédé espagnole“. Commençons par cette dernière proposition, au risque de vous faire oublier les autres. Pour les amateurs de bédé parmi les lecteurs et lectrices, ou les personnes intéressées par la culture espagnole, ce sera l’occasion de rencontrer des dessinateurs venus exprès d’Espagne, ainsi que d’autres aficionados à cette aventure qui, en Espagne, prend d’habitude le nom de sa publication pionnière, TBO (écrivez „tebeo“ et prononcez „tébéo“).

Nous avons rencontré Joan Navarro, un des plus réputés spécialistes espagnols du genre. Catalan, il réside à Barcelone, où il a dirigé plusieurs éditions du „saló del còmic“.

WOXX: Pourquoi vous intéressez-vous aux bédés? Avez-vous été un lecteur de „tebeos“ lors de votre enfance ou les avez-vous découvert plus tard?

Joan Navarro: J’ai découvert les „tebeos“ quand j’étais petit, comme la plupart des enfants de ma génération. Je crois que je fais partie d’une génération privilégiée, qui d’abord, pendant son enfance, a pu lire les derniers „tebeos“ populaires du style „El Capitán Trueno“ ou le propre „TBO“. Puis, pendant l’adolescence, on a découvert les personnages français comme „Astérix“ ou „Blueberry“ et ensuite on a vécu l’arrivée du comic underground, en même temps que la transition politique, une période particulièrement riche et créative pour ce genre. Je suis vite devenu – et je continue à l’être – un passionné.

Comment a évolué la bédé en Espagne depuis les années 40? A-t-on copié des modèles d’autres pays ou, là aussi, vous êtes „different“ (1)? La division en communautés autonomes se reflète-t-elle dans les écoles de bédé?

La bédé actuelle n’a rien à voir avec celle des années 40. A la fin des années 60 toute l’industrie populaire des „tebeos“ qui avait dominé le marché depuis les années 40 a disparu. Pendant les années 70, cette bande dessinée fondamentalement pour enfants a été remplacée par les „tebeos“ pour adultes, très influencés par les écoles franco-belges. Et en ce moment on peut trouver en Espagne des albums français, des comic-book américains, des mangas japonais, chacun dans le format original de son pays. Nous sommes le marché le plus perméable du monde.

Je ne crois pas qu’il y ait de correspondance esthétique entre communautés autonomes et écoles de bédé, quoique l’on puisse retrouver des valeurs communes entre les créateurs méditerranéens, notamment entre Barcelone, Valence et Majorque. D’ailleurs, la bande dessinée galicienne est plus proche de celle du Portugal que de celle du reste de l’Espagne.

En tant qu’aficionado et éditeur, quel avenir envisagez-vous pour la bédé espagnole? Y-a-t-il réellement un marché pour ce genre? Quelles sont les préférences du public?

La bédé espagnole doit trouver sa place dans le petit marché intérieur, qui s’est articulé au cours des dernières années. Le réseau des librairies spécialisées permet désormais l’édition de nombreux auteurs en tirages encore petits, mais qui enrichissent de façon créative l’offre. Les auteurs peuvent choisir cette voie de sortie ou les marchés extérieurs, comme l’américain ou le français. Pour ce qui est du marché, il est clair qu’il existe, même s’il est dominé par les mangas japonais et les super-héros américains.

Comment voyez-vous la bédé européenne?

Elle n’est plus le leader mondial et a perdu la capacité de créer des tendances. Son modèle est la bédé française et je crois que les prochaines années, elle devra se renouveler de façon spectaculaire si elle ne veut pas être dévorée par les japonais.

Propos recueillis par

Paca Rimbau Hernández.

(1) „Spain is different“ était un slogan publicitaire de la période franquiste pour attirer le tourisme.


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