MABROUK EL MECHRI: JCVD? – CQFD!

Pour la première fois (ou presque), sur vos écrans, Jean-Claude Van Damme est? Jean-Claude Van Damme. Un film trop culte pour être honnête.

Monsieur Van Damme dans son élément.

Les temps sont durs pour l’Hercule belge. Sa femme le largue, sa fille a honte de lui et Steven Seagal vient de lui souffler ce rôle dans ce dernier lamentable navet bastonneux qui lui aurait toutefois permis de régler ses frais de divorce. Alors, avec cette mer d’emmerdes pour dernier terrain vague et avec infiniment de brumes à venir, il décide de partir se ressourcer dans le plat pays qui est le sien. Mais bon, un héros ne saurait ainsi échapper à son destin. Alors, à peine entré dans un bureau de poste de Berchem-Sainte-Agathe, le voici coincé au milieu d’un hold-up qui tourne mal et dont, comble de disgrâce, les médias accourus s’empressent de lui attribuer la responsabilité.

JCVD – pour Jean-Claude Van Damme évidemment, car c’est bien de lui qu’il est question – sait habilement mêler éléments autobiographiques et pure fiction. Empruntant tant à la tragédie grecque (après tout, pourquoi se gêner) qu’au polar, ce film s’efforce de magnifier, en la dépassant, la descente aux enfers du prometteur postulant au titre de « has been » qu’est son acteur-protagoniste-prête-nom.

Bien que son poids soit écrasant, celui-ci n’est, pour autant, pas seul à l’écran. Le réalisateur, Mabrouk el Mechri a, au contraire, su le confronter à une kyrielle d’intéressants seconds. Zinedine Soualem en premier lieu qui, loin des rôles d’abrutis bégayants qu’il avait occupé ces derniers temps, campe ici un braqueur glaçant et sans états d’âmes. Citons également François Damiens, qui, bien que jouant un commissaire de quartier, a opté pour une interprétation plutôt sobre, évitant de nous servir le beauf‘ présomptueux que son compatriote, Benoît Poelvoorde, nous ressort dans chacun de ses films.

De bons acteurs donc – y compris JCVD himself – un scénario plutôt séduisant, du moins dans sa première moitié, une mise en scène qui nous plonge dans un Bruxelles grisâtre qui n’est pas sans rappeler le New York des films de Lumet d’il y a trente ans : et pourtant quelque chose dérange. Et peut-être commence-t-on à mettre le doigt dessus lorsqu’à mi-film vient le moment du monologue apologétique. L’on a tout à coup l’impression que le maestro de la logorrhée cocaïno-maniaco-brumeuse ressasse. Et tout à coup le côté artificiel de l’exercice ressort.

De passage à Luxembourg, jeudi dernier, pour présenter son film (celui-ci a été co-produit par Samsa Films et la musique en a été composée par Gast Waltzing), Van Damme déclara : « Je crois que ce sera un film-culte ». Nous y voilà. C’est comme ça aussi que, selon les lois les plus galvaudés du marketing, on vend des livres : en les proclamant best-sellers alors qu’ils sortent à peine de l’imprimerie.

Qui affirme qu’il faut laisser un film décanter avant qu’il ne devienne culte ? Film culte, c’est un genre cinématographique comme le western, le mélodrame ou le porno. Après tout la recette est simple : il faut un anti-héros, une situation décalée et quelques clins d‘?il. Et cela, Van Damme l’a compris. Sa carrière aux States étant grillée, Jean-Claude s’est dit qu’à 47 ans, au lieu de laisser son image agonir dans une énième série Z, il pouvait tout aussi bien réinvestir son capital ringard dans le cinéma européen, qui en est tant friand. D’ailleurs, ce n’est pas la première fois que JCVD se livre à ce genre de mise en abîme, puisque Jean-Claude Van Damme fut déjà Jean-Claude Van Damme dans un film français de 2004, Narco, ainsi que dans une récente publicité pour un opérateur de téléphonie mobile.

JCVD, à l’Utopolis


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