ORIENTATIONS MEDIATIQUES: Retour de la qualité?

Le parlement vient de débattre des orientations pour l’actualisation de la loi sur les médias de 1991. Serait-ce le retour du service public et de la qualité?

A priori, le débat d’orientation sur le renouvellement de la loi de 1991 sur les médias électroniques, puait grave la „moutarde après dîner“. En effet, le gouvernement avait soumis dès février dernier des lignes directives pour l’adaptation de la loi. De quoi se poser des questions sur l’utilité des nombreuses réunions de la commission parlementaire.

La qualité d’abord
La commission, maître Mosar en tête, a toutefois su occuper les terrains plus vagues du papier gouvernemental, notamment en matière de sauvegarde, respectivement de rétablissement de certains critères de qualité pour les émissions télévisées et radiophoniques. En effet, il a semblé important à la commission d’éviter une dichotomie entre des programmes privés à grande audience, mais à faible niveau qualitatif, et des niches de service public confinés dans des établissements publics. Une dichotomie malsain dominant à l’étranger. Le mot d’ordre a donc été celui d’essayer d’insérer un maximum de plages de qualité dans tous les programmes, fussent-ils privés ou publics. Pour pouvoir réussir ce modèle luxembourgeois du service „public-privé“, il est proposé à la fois de subventionner des programmes de qualité à la source, c.-à-d. dans les studios de production télévisuelle, et d’instituer une aide plafonnée à la presse radiophonique pour un service public bien délimité.

Côté télévision, les débats tournaient surtout autour d’une concurrence potentielle ou réelle pour la CLT, l’opératrice privée et pratiquement exclusive d’une niche de service public d’envergure, somme toute modeste. La CLT se montre prête à étendre d’une façon substantielle ses plages horaires consacrées à des programmes de service public, notamment des magazines style „Impuls“. Evidemment, libéralisation oblige, l’on ne pourra pas éviter la diffusion de nouveaux programmes télévisuels. En réfutant pour l’instant l’option d’une télé publique, mais en proposant aux producteurs indépendants des aides pour des productions de grande qualité, pouvant être diffusés par différents opérateurs, l’Etat assumerait d’une façon discrète, mais efficace, son rôle de gardien du service public.

Conservation du paysage radiophonique

Côté radios, les opérateurs actuels ont droit à une trêve lors de la transition de l’ère analogique vers les horizons du tout numérique. A l’aboutissement de ce chemin, les limites entre tous les moyens de communication – radios, télé, internet, GSM – seront à tel point effacées, que les régulations de fréquences et de canaux d’antenne collectives rentreront au second plan.

Pour l’instant, le paysage radiophonique reste donc pratiquement inchangé. Le fait que le parlement invite le gouvernement à abolir les entraves à la participation plus massive d’une société dans une, ou au maximum deux radios, n’est pas dénué d’un arrière-goût amer. En 1991, le législateur avait fixé à 25 pour cent la participation d’un partenaire dans une radio, ceci dans le souci d’éviter une concentration exagérée. L’abolition de cette entrave ne fait qu’entériner les participations plus ou moins occultes par sociétés interposées.

Théoriquement, le groupe Saint-Paul pourrait donc reprendre 100 pour cent – ou pour le moins la majorité – du capital des deux radios régionales „DNR“ et „Latina“, tandis que la CLT ferait de même avec „Eldoradio“. La concentration de presse serait dès lors parfaite: deux radios pour la CLT, deux pour le groupe Saint-Paul et la radio „100,7“ pour apaiser les états d’âme du service public. Il ne resterait plus que „Radio ARA“ pour assurer, avec des moyens de bord extrêmement modestes, une niche de participation citoyenne à la présence médiatique. Or, force est de constater que les „forces vives“ ont, dans une large mesure, tablé sur une plus forte présence dans les nombreux organes de la presse écrite, les programmes télévisés et radiophoniques de RTL, et sur la radio socioculturelle. Il sera intéressant d’observer si avec des moyens améliorés „Radio ARA“ réussira à redynamiser sa composante citoyenne et participative sur des thèmes de société chères au monde associatif.

Aide à la presse audiovisuelle

Par contre, les besoins d’une aide à la presse au profit des quatre radios dites régionales, font du moins l’unanimité dans les milieux concernés. Dans une lettre commune des radios ARA, Eldoradio et Latina, soutenue par DNR, il est fait état d’une situation économique instable de toutes les radios. Dans la commission des médias, une vague proposition visant à prévoir une aide à la presse audiovisuelle raisonnable avait trouvé l’approbation de tous les membres. Un socle minimum de survie, p.ex. 100.000 Euros par an, serait attribué à chacune des quatre radios. En sus, une aide liée aux contenus de service public pourrait être octroyée jusqu’à un maximum de 250.000 Euros. La commission cite d’abord des contenus d’une qualité élevée, qui ne seraient attrayants, ni pour une grande audience, ni pour un apport publicitaire, mais n’oublie pas pour autant les missions éducatives, d’intégration et d’encadrement des jeunes. Au cas où le gouvernement ferait siennes ces orientations somme toute positives, il y aurait un espoir de redynamisation pour des radios ciblées comme „Latina“ et „ARA“, mais également en ce qui concerne l’insertion de plages de service public dans des radios plus „mainstream“ comme „Eldoradio“ et „DNR“.

Si l’on ajoute à une telle aide à la presse radiophonique des subventions liées, soit à la diffusion de programmes de service public, soit à la production de programmes télévisuels de haute qualité, l’Etat pourrait ainsi, avec des moyens financiers relativement modestes, assurer à ce que le paysage médiatique luxembourgeois ne sombre pas dans la bêtise collective modèle „Berlusconi“.


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