TABLE RONDE: L’autre tricolore

Mardi passé, les dirigeants du LSAP, du DP et des Verts ont débattu de la possibilité d’une coalition « sans CSV ». Séduits par l’idée, ils n’en ont pas moins relevé les difficultés.

Ne vous fiez pas à l’image, les pourparlers n’ont pas encore commencé. (photo : woxx)

Les Verts et les libéraux plutôt enthousiastes, les socialistes plutôt prudents. C’est en gros la conclusion que l’on peut tirer de la table ronde « Un gouvernement sans CSV est-il possible ? », organisée par le woxx mardi soir. Ayant répondu à l’invitation de notre hebdomadaire, le président du LSAP, Alex Bodry, le secrétaire générale du DP, Georges Gudenburg, et le président de la fraction parlementaire des Verts, François Bausch, ont débattu pendant plus de deux heures d’une possible coalition rouge-bleue-verte.

Il faut dire que depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Luxembourg n’a connu qu’une seule législature sans le « parti clérical » au pouvoir. De 1974 à 1979, la coalition « sociale-libérale » entre le LSAP et le DP a gouverné sous la présidence de l’ancien premier ministre libéral récemment éteint Gaston Thorn.

La question posée par le woxx est à double sens. Oui, d’un point de vue purement arithmétique, une coalition « arc-en-ciel », est possible ? les trois orateurs ont même convenu qu’elle est, en principe, souhaitable. D’ailleurs, avec 31 député-e-s sur 60, elle dispose d’ores et déjà d’une courte majorité. Mais encore faut-il qu’une telle alliance soit possible politiquement. Sur ce point, Alex Bodry, faisant écho à Georges Gudenburg, ne sort pas des sentiers battus en soulignant, qu’après tout, ce sont les électeurs qui confèrent régulièrement une majorité relative au CSV. François Bausch plaide par contre pour plus de volontarisme : « Nous le savons tous, en politique, il est possible de créer des dynamiques. » La condition serait de se mettre d’accord sur des questions de fond et de pouvoir présenter une alternative aux électeurs. De plus, le leader vert estime qu’un exil forcé du CSV dans l’opposition serait bénéfique au pays pour des « raisons politiques sanitaires », étant donné qu’une longue permanence au pouvoir d’un parti quel qu’il soit n’est jamais souhaitable.

Serait-il donc imaginable que certains partis manifestent leurs préférences d’alliance avant les élections ? Après tout, les électeurs ne se prononcent pas en faveur d’une coalition et si le CSV remporte une majorité relative, il ne ressort pas pour autant des élections avec une majorité absolue. « Au Luxembourg, ce n’est pas dans les traditions politiques », réplique Alex Bodry.

Mais il s’agit aussi de trouver des points communs entre les trois partenaires potentiels. A l’époque, Gaston Thorn avait autoproclamé le DP « parti de gauche ». Bien que l’alliance avec les socialistes n’eût pas fait l’objet d’un accord préalable et qu’une partie de la gauche luxembourgeoise reprochât au gouvernement d’être trop timoré dans ses réformes, un certain nombre de réformes plutôt progressistes, y compris en matière de politique sociale, virent le jour. « Notre président dit souvent que le clivage droite-gauche est dépassé, mais moi je ne partage pas cet avis. Je situerais le DP plutôt à gauche », explique Gudenburg. Une analyse qui laisse le président socialiste sceptique, lui qui trouve que son parti a plutôt des atomes crochus avec les Verts.

Clairement, sur les questions sociétales, les divergences entre les trois partis sont quasiment inexistantes. Il s’agit de questions importantes, certes, mais néanmoins secondaires, par rapport à la manière d’envisager l’Etat social ou la politique fiscale. Le rôle de l’Etat en somme. Si, pour Gudenburg, « un parti libéral est forcément social », il n’en reste pas moins qu’il voit toujours d’un mauvais oeil l’intervention étatique en politique. Une vision peu partagée par le président du LSAP, dont le parti semble redécouvrir les vertus de l’interventionnisme. « C’est un sujet essentiel sur lequel il faudrait revenir plus longuement », insiste quant à lui François Bausch, en plaidant pour une redéfinition du rôle de l’Etat.

Les élections de 2009 donneront-elles naissance à l’arc-en-ciel ? Impossible d’en juger maintenant, mais les trois orateurs ont souhaité que ce débat puisse au moins se poursuivre.


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