LUXEMBOURG RENOUVELABLE: Huit sur vingt

Les objectifs luxembourgeois en matière d’énergies renouvelables sont insuffisants. Mais les raisons ne sont pas celles que l’on croit.

« Oui à l’objectif de 11 % d’énergies renouvelables au Luxembourg, mais pas avec 50 % d’agrocarburants ! », voilà la réaction de Greenpeace au plan d’action national en matière d’énergies renouvelables. Mardi dernier, celui-ci a été présenté par le ministre Jeannot Krecké, ensemble avec les nouvelles réglementations sur la performance énergétique des bâtiments fonctionnels et sur l’étiquetage de l’électricité. Comme d’habitude, la performance des militants environnementalistes a été convaincante : déguisés en orangs-outans, ils ont dénoncé la destruction des foprêts tropicales, conséquence probable d’une utilisation à grande échelle des agrocarburants. Par contre, leur argumentation, apparemment plausible, ne peut cette fois-ci convaincre. En critiquant l’importance des agrocarburants dans le plan d’action luxembourgeois, ils se trompent de cible.

En effet, lors de sa conférence de presse, le ministre de l’économie avait beau jeu d’expliquer que la contribution des agrocarburants aux énergies renouvelables était de toute façon imposée par une directive européenne. L’incorporation d’agrocarburants au niveau des stations d’essence doit atteindre un taux de 10 % d’ici 2020 et constitue une sorte de sous-programme du plan d’action qui vise une part de 11 % d’énergies renouvelables dans la consommation totale. Sans tenir compte de détails comme l’extension de l’électromobilité, il est apparent que le sous-programme – qui concerne tout de même plus de la moitié de la consommation, grâce au tourisme à la pompe – ne réduit en rien l’ambition du reste du programme, bien au contraire. En faisant un calcul « hors exportations de carburants », comme cela est à la mode, nous avons même obtenu un chiffre de 11,6 % d’énergie renouvelables en 2020.

Le plan d’action luxembourgeois est donc une mauvaise occasion pour formuler des critiques par ailleurs valables. Car Greenpeace a raison de dénoncer, au niveau luxembourgeois, le dumping fiscal à l’origine du tourisme à la pompe, et, au niveau européen, les biocarburants qui menacent la biodiversité et la sécurité alimentaire. Que l’Union européenne ait élaboré des critères de durabilité ne peut guère rassurer : dans le cas des « mécanismes de développement propre », les fameux CDM supposés économiser du CO2 – de tels critères n’ont rien changé au fait qu’il s’agit d’une énorme tricherie.

Ce qui est particulièrement problématique dans le plan d’action en matière d’énergies renouvelables luxembourgeois, c’est plutôt le fait qu’une part significative des 11 % visés sera obtenue par le recours à des « mécanismes de coopération », tels que des projets d’éoliennes offshore, hors du territoire national. Selon nos calculs, en retirant les exportations de carburants et la production non nationale, on obtient une part d’énergies renouvelables de 8,2 % en 2020. En comparant ce chiffre à l’objectif moyen européen de 20 %, par rapport auquel le Luxembourg avait déjà bénéficié d’un régime de faveur, la conclusion s’impose : notre pays fait figure de cancre.

Pourtant le ministre et ses fonctionnaires affirment que ce plan d’action constituerait un « immense effort » et qu’il serait ruineux d’en faire plus. Ne mettons pas en doute la sincérité de ce constat. Rappelons simplement que l’Union européenne devrait réduire ses émissions de CO2 d’au moins 30 et non pas 20 % pour 2020, et atteindre des réductions de l’ordre de 80 % en 2050, le reste des pays industrialisés et émergents fournissant des efforts de même ordre de grandeur. S’il est vraiment impossible d’atteindre plus de 8 % d’énergies renouvelables en 2020 dans un des pays les plus riches du monde, alors il est peu probable que des politiques préservant le climat soient possibles à l’échelle mondiale.


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