EXPULSIONS DE ROMS: Un « Oscar » pour Sarkozy

Si les actions menées par le gouvernement français font scandale à l’étranger, elle semblent avoir l’appui d’une majorité de l’électorat français.

Depuis hier, la France a mis en pratique ce que son président avait annoncé, il y a tout juste quelques semaines. Jusqu’à la fin du mois d’août environ 700 Roms vont être renvoyés par avion dans leur pays d’origine. Pour que leur retour soit « volontaire », le gouvernement français leur propose 300 euros par adulte et 100 euros par enfant. Pour éviter tout abus par ceux qui se feraient expulser pour revenir par après et se faire payer ainsi plusieurs fois leur prime de départ, la bureaucratie française à inventé « Oscar » (outil simplifié de contrôle des aides au retour), une banque de données qui contient les données biométriques des personnes expulsées.

La stigmatisation d’un groupe en marge de la société française par l’interpellation collective de ses membres et leur inscription sur un fichier spécifique a choqué une partie de la société française et terni l’image d’un pays qui comptait jusqu’à présent un des principaux défenseurs de la liberté et des droits humains. Même si Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur et responsable de l’organisation de ces départs « volontaires », refuse la comparaison avec les « rafles » des juifs sous le régime de Vichy – l’action musclée du mois d’août avec plus de 50 camps « illégaux » démantelés par la police semble bien démesurée pour un pays membre de la même Union à laquelle adhèrent également les pays où les Roms vont être reconduits : la Roumanie et la Bulgarie.

D’ailleurs l’opposition ou le milieu des associations des droits humains n’ont pas été les premiers à comparer les actions commanditées par Nicolas Sarkozy avec les « rafles » de la Deuxième Guerre mondiale. C’est à l’intérieur de la majorité même que cette critique a été formulée une première fois. Une partie de la droite « modérée » ne partage pas, pour l’instant, la stratégie du président effrayé par une cote de popularité en chute libre.

Le problème d’intégration des Roms n’est certes pas nouveau et il y a déjà eu des expulsions de ce type auparavant. Mais après les affrontements entre policiers et gens du voyage à Saint-Aignan début juillet, Sarkozy a pressenti une occasion unique pour jouer la carte sécuritaire et se redonner un profil d’homme d’action. D’où le caractère expéditif des mesures prises qui rencontreraient, selon certains sondages, l’appui de plus des deux tiers de la population française.

Il ne faut pas oublier que la campagne qui a mené Sarkozy à la présidence était déjà largement bâtie sur le thème de la sécurité. Pourquoi une chose qui a fonctionné en 2007 ne devrait pas aussi fonctionner cinq ans plus tard ? Nombreux sont les élus locaux – même de gauche – qui, sans applaudir la façon de faire du couple Sarkozy/Hortefeux, appréhendent que la discussion sur la sécurité va influencer les élections à venir et préfèrent dès lors adopter un profil bas dans la discussion sur les campements.

Mais ils savent aussi que les expulsions ne vont rien résoudre, car la majorité des gens du voyage ont la nationalité française ou du moins un droit de résidence. Or, les moyens pour passer par la voie d’une meilleure intégration font défaut à tout les niveaux. Comme l’explique le porte parole des Roms en Autriche, les conditions de sa communauté étaient tout aussi précaires il y a quelques années. Mais depuis, l’Autriche a accordé aux Roms des terrains qui leur permettent de vivre dignement et le pays a investi dans l’éducation des jeunes.

Mais une telle approche n’est guère du goût d’un Nicolas Sarkozy dont le souci principal est de regagner un électorat qui l’a déserté en masse en direction de l’extrême droite. Les chances que Sarkozy se laisse impressionner par un Rom autrichien né dans un camp de concentration nazi et nommé professeur pour son engagement en faveur de sa communauté restent dès lors minimes. Même si le professeur s’appelle Rudolf … Sarközi.


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