EUROPE: Système D

Nicolas Schmit distribue des brochures au sujet du traité de Lisbonne et appelle les citoyens à débattre même si l’issue du processus est déjà gravée dans
le marbre.

L’Union européenne est vraiment trop démocratique. Vous en doutez ? Il suffit pourtant d’écouter parler ou de lire le ministre délégué aux affaires européennes, Nicolas Schmit (LSAP), pour s’en rendre compte. A l’occasion de la présentation cette semaine de la brochure « expliquant » le traité de Lisbonne, la stratégie visant à faire avaliser le défunt traité constitutionnel, a de nouveau éclaté au grand jour. En lisant la jolie brochure, on a tout simplement l’impression de vivre dans le « meilleur des mondes », tant le texte est euphémique.

Passons sur le contenu de la brochure qui n’est qu’un récapitulatif peu critique du contenu du « mini-traité », comme le traité de Lisbonne est souvent surnommé. Il est plus intéressant de s’attarder sur certaines injonctions faites aux citoyens. Ainsi, sur le site lié au ministère « europaforum.lu », Schmit y déclare que le texte, édité par le service information et presse, « europaforum.lu » et la Commission européenne, entend « susciter un plus grand intérêt pour les questions européennes, et amener les citoyens à mener un débat sur l’Europe ». Cette démarche s’inscrit toujours dans le fameux « Plan D » de l’Union, « D » pour « démocratie, débat et dialogue ».

Venons-en au débat, justement. Tartuffes, les experts européens font mine de vouloir sincèrement un grand débat citoyen au sujet de l’Europe. Pourtant, l’histoire très récente a démontré que ce débat pouvait avoir lieu, sans besoin d’encouragements de la part des pouvoirs publics. Nous rappelons à ce titre le débat qui s’est déroulé en 2005, lors du référendum sur le traité constitutionnel. A l’époque, tous les observateurs étaient d’accords pour affirmer que jamais la cause européenne n’avait connu une telle effervescence de débats démocratiques dans toutes les couches de la société. Car voilà, tout d’un coup, la population s’appropriait le traité, le discutait de manière critique et avec un sens politique que certaines élites auraient préféré éviter. Cet engouement était compréhensible : après tout, il y avait un enjeu politique à la clé. A quoi bon débattre si le dénouement d’un processus est joué d’avance ?

Mais Schmit tient à tout prix à ce que les gens débattent. Même si, finalement, le résultat, c’est-à-dire l’approbation du traité, est connu d’avance. Car une chose est sûre : étant donné que le traité de Lisbonne « reprend les éléments essentiels de la constitution européenne », un « deuxième référendum n’est plus nécessaire au Luxembourg ». Aux yeux du ministre, la ratification par voie parlementaire « correspond plus à nos pratiques constitutionnelles. » Ce « plan D » ressemble plutôt à une caution démocratique que se donnent les dirigeant-e-s européen-ne-s en mal de confiance populaire.

Car au lieu de parler de démocratie ou de débat, mieux vaudrait donner tout leur sens à ces mots. Tel ne semble pourtant pas être le souhait de la majorité de la classe politique du continent. Ainsi, comme le révèle la « Zeitung vum lëtzebuerger Vollek » de jeudi dernier, le parlement européen a décidé, le 20 février, d’approuver le traité de Lisbonne tout en rejetant un amendement du groupe de la Gauche unitaire européenne et de la gauche verte nordique (GUE/NGL) appelant à reconnaître les résultats du référendum à ce sujet qui sera tenu en Irlande. Cela semble en énerver plus d’un que les citoyen-ne-s irlandais-e-s souhaitent débattre et dialoguer démocratiquement de l’Europe.


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