RIO+20: Green sans deal

Lors du congrès McPlanet, les altermondialistes allemands ont démonté l’idée maîtresse du sommet « Rio + 20 », celle d’une « Green Economy ».

En 1992, la conférence internationale de Rio sur le développement durable avait suscité bien des espoirs. Et beaucoup de déceptions dans les vingt années qui se sont écoulées depuis. Du côté des altermondialistes et de nombre d’ONG, c’est la méfiance qui prévaut aujourd’hui, alors que la conférence « Rio+20 » approche. En effet, pour « relancer la dynamique » – euphémisme d’un constat d’échec total – l’Onu organise un nouveau sommet dans la même ville, du 20 au 22 juin prochain. Les mots d’ordre, « Green New Deal », et surtout « Green Economy », sont la cible de toutes les attaques. « Il n’y aura en tout cas pas d’économie verte‘ », a dit Ulrich Brand, cité par le site allemand « Klimaretter ». Le politiologue était passé en janvier au Luxembourg et nous avait accordé une interview (woxx 1146). Le week-end dernier, il a participé au congrès McPlanet à Berlin, organisé par des ONG comme Attac, Greenpeace ou Terre des hommes. Brand a réitéré son verdict : « Le discours sur la `Green Economy‘ est une immense promesse. Elle ne sera pas tenue. » A ses yeux, à défaut de transformer fondamentalement notre manière de consommer et de produire, une écologisation n’est pas concevable. La « Green Economy » ne serait alors que le verdissement d’un système intrinsèquement non durable.

A Berlin, Brand a insisté sur une évolution qui pourrait amener une partie des Etats du Sud à se rallier aux idées proposées lors de Rio+20. En effet, la raréfaction des ressources permet aux pays qui en disposent de s’enrichir rapidement dans le cadre des marchés mondiaux. Ce « néo-extractivisme » aurait ainsi permis à la Bolivie de doubler les dépenses sociales en quatre ans. Or, l’intensification de l’exploitation des richesses naturelles a des conséquences néfastes en termes de droits humains et d’environnement. « Klimaretter » cite Camila Moreno, coordinatrice de la Heinrich-Böll-Stiftung au Brésil : « Nous devons mener une campagne mondiale contre l’idée de l’économie verte. » Et comme au Nord, la difficulté au Sud sera de faire renoncer la population au style de vie auquel elle aspire, tel qu’il est figuré par les ménages des classes moyennes des « telenovelas », avec leurs voitures et leurs télés grand écran.

« Il faut mobiliser sur des sujets qui montrent comment les diverses crises du climat, de l’alimentation ou de l’économie sont liées », tel est l’avis de Barbara Unmüßig, citée par le « Neues Deutschland ». Dirigeante de la Heinrich-Böll-Stiftung, l’altermondialiste sera au Luxembourg le 14 mai pour une conférence-débat sur les horizons lointains d’une vie durable. A Berlin, elle s’est attaquée au paradigme de la durabilité, « d’une vacuité monumentale ». En effet, cela n’indique nullement de quelle manière on distribue les ressources vitales et la prospérité, si la croissance économique conduit au développement, et à qui cela profite.

L’attention apportée au démontage de l’idée nouvelle de « Green Economy » ne doit pas faire oublier que les critiques allemandes s’appuient sur des réflexions bien antérieures. Ainsi, le tiers-mondisme est à la base de la publication « Weltwirtschaft und Entwicklung », dont le coordinateur Rainer Falk vit et travaille au Luxembourg : il s’agit pour les pays du Sud d’éviter d’imiter simplement le modèle de développement du Nord, en se soumettant à l’arbitrage et au diktat des institutions internationales au service du système capitaliste. Plus radicalement encore, l’écoféminisme, en vogue dans les années 80, peut être considéré comme le précurseur de l’idée de « suffisance », à opposer à une culture managériale et technocratique de l’insatiabilité, tenue pour typiquement masculine.


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