PRESSE: Le nombril du woxx

Nous l’avons annoncé depuis un certain temps déjà : le woxx poursuit inlassablement le processus de réflexion sur son avenir. Des questions se posent, des pistes s’offrent à nous. Et vous êtes toutes et tous invité-e-s à y participer.

Le woxx, journal multifonction : vous aide à mieux comprendre le monde ainsi qu’à remplir les tâches ménagères essentielles.

Cela fait déjà un petit moment que le woxx paraît régulièrement. La preuve, vous tenez entre vos mains le numéro 1.200, ce qui, pour un hebdomadaire, est un joli chiffre. Hebdomadaire, il ne l’a pas toujours été, comme le savent probablement les lecteurs de la première heure, ceux de septembre 1988. Ce n’est qu’à partir de 1991 que le rythme de parution du woxx passe de deux à une semaine. Et d’ailleurs : il ne s’est pas toujours appelé woxx. L’étrange nom, qui laisse supposer une maîtrise approximative de l’orthographe latine, ne fut adopté qu’en l’an 2000, délaissant l’appelation « Gréngespoun ». Ce changement ne se fit pas du jour au lendemain, il était le fruit de longs débats qui s’étaient étalés sur plusieurs années.

Mis sur orbite par des membres de la GAP (le « Gréng-Alternativ Partei », qui fusionna en 1994 avec la « Gréng Lëscht Ekologesch Initiativ » pour donner naissance à Déi Gréng), la question sur le rapport avec le parti se posait de manière lancinante et non sans débats. Contrairement à ce qui est communément admis, le Gréngespoun, bien qu’émanant de la mouvance verte et écologiste, ne se considérait pas comme l’organe de presse du parti. Toutefois, il faisait la part belle aux thématiques alors pionnières que cette mouvance soulevait et qui étaient largement ignorées par le reste de la presse établie d’alors. Le message n’est toutefois pas parvenu à toutes les oreilles : aujourd’hui encore, il arrive que certains lecteurs attribuent les opinions formulées par nos rédactrices et rédacteurs au parti des Verts (ce qui ne réjouit pas forcément ni les uns ni les autres). L’arrivée dans la rédaction du woxx en 2005 de l’auteur de ces lignes, membre du parti Déi Lénk, a peut-être ajouté davantage de confusion. C’est pourtant un des paradoxes du woxx : s’il est l’un des rares journaux qui ont toujours accepté et continuent d’accepter des journalistes militants et encartés, il est probablement l’un des moins partisans et des plus critiques envers des partis qui lui sont idéologiquement proches. Contrairement à d’autres journaux, surtout de la presse quotidienne, vous ne trouverez jamais un article appelant à soutenir l’un ou l’autre parti pendant une phase électorale (ce qui n’est pas forcément infâmant).

Politique mais pas partisan

Le woxx a donc fait plusieurs fois peau neuve : en 2000 lors du changement de nom et, plus récemment, en 2008, à l’occasion de son 20e anniversaire, en remaniant de fond en comble la mise en page et en optant pour un format «  magazinesque ». Est-ce mieux ? Est-ce pire ? Les avis divergent forcément. Pour un journal, entreprendre des changements si profonds comporte toujours une importante part de risque. Tout d’abord parce qu’un lecteur régulier cultive toujours une liaison intime avec son ou ses journaux préférés. Ceci est d’autant plus vrai pour un journal aussi modeste que le woxx, qui n’est pas un journal de masse et dont le lectorat est beaucoup moins volatil.

Il n’aura d’ailleurs échappé à personne que bien d’autres titres se sont récemment soumis à des cures de jouvence. Fuite en avant ? Il y a toujours un peu de cela, en dehors d’autres considérations plus prosaïques, comme le changement d’imprimerie. Nous ne vous ferons pas l’injure de penser vous apprendre que la presse écrite est en crise. Au Luxembourg comme partout dans le monde, cela touche tout le monde. A l’étranger, de grands titres disparaissent. Il y a quelques mois, Serge Halimi, le rédacteur en chef de l’excellent « Monde diplomatique », expliquait à ses lecteurs dans un long édito les difficultés économiques éprouvées par ce mensuel. Le titre est en danger et cela constituerait une perte d’autant plus dommageable qu’il est un des rares journaux réputés qui suivent une ligne éditoriale en opposition avec la pensée unique libérale.

La faute à qui ? Les réponses sont multiples et parfois particulières, mais deux facteurs jouent : d’un côté, la crise économique touche la presse. Produire un journal est une entreprise coûteuse, même lorsque les journalistes touchent des salaires frugaux (comme au woxx). Derrière l’équipe rédactionnelle, il y a l’équipe technique. Il y a les frais d’impression, de distribution et d’envoi. Vient ensuite le phénomène longtemps sous-estimé du développement de la presse en ligne, ainsi que la multiplication des titres, ainsi que le succès de la presse gratuite. La gratuité, qu’elle soit virtuelle ou physique, contribue à un changement de mentalités : celui de ne plus devoir débourser un centime pour la lecture d’un ou de plusieurs articles.

Incertitudes et perspectives

Le système d’aide à la presse permet à quasiment tous les journaux d’exister. Sans lui, les journaux tomberaient sous la coupe des annonceurs ou devraient trouver des actionnaires à fort potentiel économique. Contrairement à une idée répandue, cette aide publique est un garant de l’indépendance journalistique, car les critères d’allocation (même s’ils sont discutables) valent pour tous. Le gouvernement ne pourrait retirer les aides de manière arbitraire sans modification de la loi. Un actionnaire privé par contre…

Pour l’instant, la situation du woxx n’est ni catastrophique ni facile. Le nombre de ventes et d’abonnements ne décroît pas. La crise étant passée par là, cela est malheureusement le cas des annonces. S’y ajoute l’augmentation du prix du papier, qui, dans le cas du woxx, n’est pas résorbée par l’aide à la presse, étant donné que nous n’imprimons pas sur le papier auquel fait référence le calcul de l’aide.

Mais au-delà des préoccupations financières, nous désirons toutefois faire un état des lieux. Nous sommes conscients de nos imperfections. Tant que ce journal sera réalisé par des êtres humains, elles ne disparaîtront pas. Ce n’est toutefois pas un argument pour ne pas se remettre en question. Comme nous vous l’avons déjà communiqué, nous avons lancé depuis plus d’un an déjà une vaste entreprise de réflexion sur l’avenir du woxx. Que faut-il garder, que faut-il changer ou améliorer et que faut-il supprimer ? Et comment devons-nous développer notre présence sur Internet ? Nous avons déjà entamé plusieurs étapes : un certain nombre de séminaires internes sur des sujets précis ainsi que la commande d’un sondage qualitatif auprès d’un certain nombre de nos abonnées.

Les résultats (qui vous seront présentés en détail lors de notre assemblée ouverte le 4 février) sont probants : d’une manière générale, les lecteurs et lectrices du woxx se disent satisfait-e-s de ce que nous produisons. Pas toujours, évidemment – certaines choses dérangent plus que d’autres. Honnêtement : nous nous attendions à pire.

Malgré tout, nous avons l’ambition de nous améliorer. Sur le fond. Quelle est l’identité du woxx ? Nous continuerons à rester un journal profondément ancré à gauche et qui se définit plus par son prisme d’analyse que par la délivrance régulière de « scoops ». Si nous sommes très politiques, à défaut d’être partisans, notre propos ne saurait être celui de l’endoctrinement, mais celui d’une modeste contribution à l’élévation intellectuelle de celles et ceux qui nous lisent (et à la nôtre, en passant). Mais à qui voulons-nous nous adresser et comment ? Sommes-nous un point de référence d’une intelligentsia de gauche plus ou moins radicale ou faut-il aller plus loin ? Notre ton est-il trop professoral, voire moralisateur ou, pire, arrogant ? Quelle place la provocation, en mots ou en images, occupe-t-elle dans nos colonnes ?

Et vous, lectrices et lecteurs ? Quelle place occupez-vous dans ce journal ? Un journal n’est rien sans ses lecteurs, a fortiori lorsque ce journal a la particularité d’être une société coopérative. Cette originalité, nous voulons la cultiver et la revigorer. Comme vous le savez, chacun-e d’entre vous peut détenir une part de la société et s’y impliquer directement.

En tout cas, retenez la date du 4 février : que vous soyez coopérateurs ou lecteurs ou tout simplement curieux, vous pourrez vous joindre à nous, à partir de 18h30 au Circolo Curiel à Hollerich (voir invitation page 5). Vous y prendrez connaissance des détails de la situation financière du woxx, nous vous présenterons les résultats de l’étude qualitative ainsi que nos réflexions sur l’avenir « online » du journal. Et, bien évidemment, vous êtes vivement invités à faire part de vos critiques et suggestions. Et, tout aussi important, la discussion pourra se poursuivre autour d’un plat de votre choix…


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