SAINT-NICOLAS: A quel saint se vouer?

A l’occasion de la Saint-Nicolas, le 6 décembre, le woxx a rencontré un des représentants luxembourgeois de cette idol.

Recruté par le Foyer de la Femme, Léon Flammang est Saint- Nicolas depuis une douzaine d’années.
photo: Christian Mosar

Dans nos sociétés capitalistes, obnubilées par le sacro-saint culte de l’argent et du profit, rêveries, légendes et féerie n’ont guère plus voix au chapitre, à moins qu’elles ne contribuent à renflouer les caisses des grands et petits distributeurs.

Si Saint-Nicolas n’y échape pas non plus, cette figure, vieille comme le monde, continue néanmoins de susciter admiration et adoration auprès des tout petits et a maintenu sa place dans le calendrier des fêtes annuelles conventionnelles. Vieux patriarche à la barbe blanche, le personnage est le plus souvent „interprété“ par des quidams de sexe masculin. Le woxx s’est récemment entretenu avec l’un de ces acteurs, Léon Flammang, un sexagénaire fort sympathique, sur la position et le devenir de ce „grand-père“ mythique à l’aube du XXIe siècle.

woxx: Jouer les Saint-Nicolas n’est certes pas la plus ingrate des tâches, mais qu’est-ce qui vous a poussé à endosser ce rôle ancestral?

Léon Flammang: Cela doit bien faire une douzaine d’années que je m’amuse à jouer les Saint-Nicolas et je dois avouer que c’est là un rôle qui ne me déplaît guère. C’est suite à une requête du comité du Foyer de la Femme, section Hesperange, dont mon épouse faisait partie à l’époque, que j’ai décidé d’enfiler l’attirail de Saint-Nicolas pour faire le bonheur des petits. A l’époque, une dame d’une certaine carrure (il faut tout de même avoir l’air un peu imposant pour pouvoir représenter un Saint-Nicolas un tant soit peu crédible) s’était proposée pour la „besogne“. Mais, ayant une petite voix, elle se trouvait dans l’incapacité de dialoguer avec les enfants. J’ai alors pris le relais.

Vous évoquez justement un point qu’on peut qualifier de brûlant d’actualité, à savoir la présence de femmes dans des postes dits „mâles“ à une époque où l’on pense beaucoup en termes d’égalité des sexes. Jugez-vous une émancipation possible du personnage de Saint-Nicolas? Le patriarche pourrait-il, d’après vous, se métamorphoser en une „Sainte-Nicolas“?

Je ne veux certainement pas qu’on me croie misogyne, mais je pense qu’un tel revirement ne ferait que semer doutes et troubles dans l’esprit des enfants, habitués à une barbe blanche masculine. Pour passer „raisonnablement“ du grand-père à la grand-mère, il faudrait commencer par changer les mentalités pour que la mutation ait lieu à l’échelle planétaire. Une „cohabitation“ entre les deux sexes ferait perdre toute sa crédibilité à Saint-Nicolas, les petits ne sauraient alors littéralement plus à quel saint se vouer! Non, j’estime que le mythe de Saint-Nicolas avec ce qui l’entoure est une pratique traditionnelle aux contours clairement cimentés et qu’il ne faut pas trop le remanier si l’on veut sauvegarder son image auprès des chérubins.

Que ressentez-vous, lorsque vous vous rendez ainsi auprès de petits écoliers, le 6 décembre de chaque année?

Certaines années, à l’approche de cette date, la lassitude et l’envie de céder ma place à un autre me prennent, mais une fois sur les lieux – classes maternelles, foyers de jour et locaux de l’administration communale de la Ville de Hesperange – je suis ravi de pouvoir ainsi distribuer un peu de bonheur autour de moi.

Justement, cette joie infantile est-elle restée inaltérée au fil du temps ou constatez-vous des changements notables dans les réactions?

La joie, je dirais même l’excitation des enfants, est toujours aussi grande que douze ans auparavant. A titre d’exemple, lorsque je me rends dans les salles de classe et que j’effectue mon discours inaugural avant de procéder à la distribution des friandises, j’ai toujours grande peine à faire entendre mes propos, couverts par le brouhaha des rires et des effusions de gaieté. Là vraiment, rien n’a changé.

Mais seraient-ils peut-être plus exigeants quant au type de cadeau, voulant à tout prix un jouet dont ils auraient vu les mérites vantés à la télévision ou dans un magazine, chose d’ailleurs fort courante à cette période de l’année?

Voilà un aspect que je ne peux que mal éclairer, parce que les enfants ne viennent que très rarement me demander quelque chose. Je ne reçois que très peu de lettres, mais a contrario une quantité énorme de dessins, une façon pour les enfants de m’exprimer leur gratitude.

Propos recueillis par Sam Kintziger-Konsbrück


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