EXPOSITION COLLECTIVE: L’autre innovation

La galerie 7 à Luxembourg est nouvelle sur le terrain – et tente d’innover par un concept pas comme les autres.

Les journaux détournés, c’est son truc : Wu Yiquiang.

Pour trouver la galerie 7 à Luxembourg, il faut chercher un peu. En effet, l’adresse sur la côte d’Eich – même si elle reste proche du centre-ville – est un peu en dehors des marques psychogéographiques du promeneur culturel habitué aux petites galeries de la capitale. D’autant plus que, de par sa taille, on peut aisément la confondre avec un magasin de design.

Et pour contrer cette fausse impression, le fait que la galerie se soit partiellement spécialisée dans la céramique n’aide pas vraiment. Pourtant, elle présente régulièrement des artistes connus internationalement, comme actuellement le peintre chinois Wu Yiquiang. Né en 1970 dans le Yunnan, l’artiste peint avec ce qui l’occupe le plus : les journaux. En utilisant une technique proche du cut-up classique, son idée n’est néanmoins pas de montrer l’absurde du contenu des journaux – comme les dadaïstes ont pu le faire il y a une centaine d’années -, mais au contraire de faire naître un nouveau sens. Un sens souvent très ironique, voire drôle – vu qu’il crée volontairement des malentendus. En dissociant textes et images, Wu Yiquiang rompt le rapport de confiance médiatique et met à nu la fragilité des informations. Surtout dans un pays comme la Chine, où la propagande et la censure restent des instruments de communication du pouvoir au quotidien, sa façon subversive de peindre avec des journaux prend toute son ampleur. S’il n’a pas encore exposé dans de grands musées contemporains, Wu Yiquiang est un régulier des grandes foires d’art internationales.

L’autre peintre exposée en ce moment à la galerie 7 à Luxembourg est Judith Brunel. Le fait qu’elle soit une quasi-inconnue du public est d’ailleurs voulu, car elle se situe dans la philosophie d’ouverture. L’art de Brunel est – si l’on veut – ultra-conceptuel. En effet, elle prend pour base de ses toiles des esquisses et des dessins de la Renaissance. Donc des dessins éphémères, qui ont souvent servi de base à des oeuvres majeures. Et en les replaçant dans un autre contexte, la peintre essaie de les revaloriser, tout en les désacralisant. Ce qui apparaît a priori comme une très bonne idée l’est peut être un peu moins si on considère les toiles – qui malheureusement n’échappent souvent pas au kitsch.

Quant au tourneur et sculpteur sur bois Christophe Nancey et à la céramiste Anima Roos, on s’abstiendra d’en faire une critique pour la bonne et simple raison que votre humble serviteur n’y connaît pas grand-chose et a tendance à les confondre avec des cadeaux de Noël pour la belle-mère bourgeoise.

Ce qui d’ailleurs semble aussi être l’idée de la galerie 7, vu que dans son « press book » elle dédie une page entière aux cadeaux d’entreprise. C’est que – contrairement à d’autres petites galeries – elle fait partie d’un plan business plus grand. Appartenant au groupe « Eramondi Innovation », qui est basé au sud de la France, elle est en effet la déclinaison artistique de cette boîte spécialisée dans la recherche innovante. Pour le patron, l’art fait partie de la philosophie de la maison et est considéré comme un « outil majeur de formation et de management ». Et comme le Luxembourg est aussi le siège de l’activité finance et stratégie du groupe, y ouvrir une galerie d’art s’apparente à une bonne idée. Donc, si elle peut paraître un peu étrange à première vue, la galerie 7 à Luxembourg reste une exception intéressante de par son concept et constitue en ce sens aussi un enrichissement du paysage culturel.

L’exposition actuelle est visible jusqu’au 6 février.


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