DROIT DE FILIATION: Pas contents !

L’initiative Schutz fir d’Kand s’oppose à la réforme du droit de filiation telle qu’elle est prévue. Si certaines des questions soulevées semblent pertinentes, son approche réactionnaire saute aux yeux.

Un couple est assis en face d’un homme en costard. « Alors, on avait dit quoi pour la couleur des cheveux ? Blonds ? », demande l’homme. « Comme ça, au moins, on saura qui est le père ! », continue-t-il en rigolant.

C’est avec un film que l’initiative « Schutz fir d’Kand » (« Défense de l’enfant ») a ouvert sa conférence de presse au sujet de la réforme du droit de filiation (woxx 1308). Dans le court métrage, un couple choisit son futur enfant : taille, couleur des cheveux, intelligence… En fonction des caractéristiques qu’ils demandent, le prix augmente. Vous l’aurez compris, le couple veut procéder à une procréation médicalement assistée (PMA).

« Nous sommes contre toute forme d’homophobie », s’est empressé de clarifier dès le début Jean-Jacques Lorang, avocat et membre de Schutz fir d’Kand, initiative fondée en opposition à l’ouverture du mariage aux couples homosexuels. « Pour nous, ce projet de loi soulève de nombreuses questions, notamment en matière de procréation médicalement assistée et de gestation pour autrui (GPA) », a-t-il expliqué. « Nous sommes persuadés que les enfants seront les premières victimes de cette réforme. »

« Tout ce qui est techniquement possible n’est pas nécessairement souhaitable », a continué Lorang. « Rappelons que les nazis étaient forts en sciences, mais pas moralement. » Pour lui, la possibilité du développement d’un « secteur lucratif » autour de la procréation médicalement assistée au Luxembourg existe : « Avec le projet de loi 6568, rien ne pourra l’empêcher légalement. »

« La PMA pourrait soulager des couples confrontés à des problèmes de fertilité », a enchaîné Marie-Josée Estgen, pédopsychiatre, « mais il faut aussi voir le revers de la médaille : sans restrictions légales, des couples pourraient par exemple avoir des enfants à l’âge de 60 ans. » Pour elle, la PMA avec tiers donneur pose encore plus de problèmes que la PMA dite « homologue ». « Par cette méthode, on crée des enfants qui ne peuvent en aucun cas établir leurs liens généalogiques. » Alors que, pour Estgen, connaître « son papa et sa maman » fait partie des voeux de tout enfant. « De nos jours, les couples ne sont pas forcément conçus pour durer », a-t-elle affirmé. « Que se passera-t-il lorsque le parent non biologique prendra ses distances avec l’enfant ? »

Pour Michèle Kayser, pédiatre, le problème de la PMA au Luxembourg est qu’« il n’y a, jusque-là, aucun cadre juridique ». Par exemple, la question de la « coparentalité » lors d’une PMA avec tiers donneur ne serait pas réglée. Pourtant, le projet de loi indique que ces questions seront à régler avant la PMA par le biais d’une convention établie entre tous les concernés.

Le mal absolu : la GPA

Pour la pédopsychiatre Estgen, les dangers de la PMA ne s’arrêtent pas là : il y aurait aussi le danger de relations incestueuses, si le sperme du donneur échoit à plusieurs couples en même temps et que, ensuite, les enfants de ces couples se rencontrent, tombent amoureux et se mettent à leur tour à se reproduire. « Ces questions ne semblent intéresser personne ! », s’est-elle offusquée.

Si la PMA est mauvaise, la GPA représente le mal absolu pour Schutz fir d’Kand. « On interdit la prostitution, mais on autorise des gens à louer le corps d’une femme pour porter un enfant », s’est encore indignée la pédopsychiatre. « Que se passe-t-il lorsque cette femme consomme de l’alcool ou contracte le VIH » ?

Pour Estgen, les enfants issus de la GPA ne sauront jamais où se situer par rapport aux « différents personnages » impliqués dans leur conception. « On voit très bien, à l’exemple des familles recomposées, vers quels problèmes cela peut mener », a-t-elle expliqué. Si le projet de loi 6568 indique que « toute convention établie portant sur la gestation pour le compte d’autrui est nulle », Schutz fir d’Kand estime que cela correspond à une « libéralisation de la GPA ». Tout comme l’Ombudscomité fir d’Rechter vum Kand dans son récent avis, l’initiative Schutz fir d’Kand estime qu’il faudra réglementer la situation d’enfants issus d’une GPA à l’étranger. Et souligne encore une fois qu‘ « on est pas homophobes ». Car, comme l’a relevé l’ex-députée CSV Marie-Josée Frank, présente dans le public : « Nous aimons tout le monde ! »


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