Exposition collective
 : Les chemins de la guerre

« Some People Laughed, Some People Cried, Most People Were Silent » est l’entrée en matière complexe d’un projet théâtral ambitieux, qui pose des questions inconfortables dans une époque embrouillée.

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L’esthétique nucléaire.

Question complexité, « Some People Laughed, Some People Cried, Most People Were Silent » en jette définitivement. Opposant – ou proposant parallèlement – l’exploration de deux personnages historiques, voire mythiques (Robert Oppenheimer et Philoctète), l’exposition ne se veut pas tant une expérience esthétique que le point de départ d’une réflexion qui sera approfondie par la mise en scène de la pièce « Philoktet » du dramaturge allemand Heiner Müller.

Dans les trois parties de l’exposition, Robert Oppenheimer, le « père de la bombe atomique », et Philoctète, héros tragique de la guerre de Troie, sont mis en relation. Le premier, dont le titre de l’exposition est une citation directe, est connu pour avoir été un homme doté d’un génie inhabituel : multilingue, athée, à l’aise aussi bien en sciences humaines qu’en physique théorique, Robert Oppenheimer, s’il avait vu le jour pendant la Renaissance, aurait aisément pu se targuer du titre de génie universel. Car non seulement il a créé la bombe et ce faisant changé la géopolitique pour l’éternité, mais il a aussi raisonné sur sa création : « Maintenant je suis la mort, destructeur des mondes », a-t-il déclaré juste après un des premiers essais nucléaires, citant la Bhagavad-Gita, l’un des textes fondateurs de l’hindouisme. Après la guerre, la carrière d’Oppenheimer, qui croyait partiellement que la bombe allait apporter une paix durable, a été nuancée. Victime de la chasse aux sorcières communistes de McCarthy, il tournera le dos à sa carrière de militaire. C’est dans ce sens, celui du pestiféré, qu’on peut le mettre en relation avec le personnage de Philoctète – le meilleur archer grec abandonné sur l’île de Lemnos par Ulysse en personne, en raison d’un ulcère tellement purulent qu’il était devenu insupportable pour ses compagnons. Mais, après dix ans, les Grecs le réintégrèrent dans leur armée et conquirent Troie avec son aide.

Deux hommes coincés entre leur loyauté pour leur peuple et le savoir sur la dangerosité de leurs armes – une juxtaposition intéressante qui montre que le dilemme est inhérent à l’histoire de toutes les guerres. Cela dit, le concept de « Some People Laughed, Some People Cried, Most People Were Silent » n’est que partiellement basé sur des valeurs esthétiques. La première salle confronte les deux personnages de façon ostentatoire, tandis que dans la deuxième l’exercice est repris avec une installation vidéo – qui montre déjà partiellement les acteurs de la pièce à venir.

Ce n’est que dans le cloître de Neimënster qu’on revient à un concept d’exposition plus traditionnel. En effet, les peintures de Pascal Piron représentant des explosions d’armes atomiques rendent un aspect plus traditionnel à une exposition qui donne, somme toute, une impression plutôt explosée.

Cela dit, « Some People Laughed, Some People Cried, Most People Were Silent » n’est qu’une partie d’un concept théâtral qui fêtera sa première le 1er octobre à Neimënster également, avant d’être repris – plus tard et sous une autre forme – au centre culturel opderschmelz à Dudelange. Une exposition à voir donc, en attendant d’en savoir plus.

À Neimënster jusqu’au 31 octobre.

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