Panama Papers : Cadeau empoisonné

Elle peut si elle veut : la CSSF vient de sanctionner pas moins de neuf instituts financiers à la suite de son analyse des Panama Papers.

(Photo : Wikimedia)

Juste avant Noël, ce n’est certainement pas ce à quoi s’attendaient les quatre banques et les cinq autres entités dans le viseur de la commission de surveillance du secteur financier (CSSF). Être dénoncés sur la place publique, de plus dans un pays comme le grand-duché qui n’est pas connu pour sa férocité en matière de transparence quand il s’agit de sa place financière n’est peut-être pas une mise à mort directe, mais gageons qu’il y aura des explications à donner à la clientèle quand elle apprend la teneur de ce cadeau de Noël pas comme les autres.

Dans un communiqué de presse la CSSF explique qu’elle a agi dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Et qu’après la publication des Panama Papers par le consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) elle a « procédé à une vérification complète des comptes de sociétés, en relation ou non avec Mossack Fonseca (le cabinet d’avocats panaméen d’où provenaient les papiers publiés par l’ICIJ, ndlr) ou le Panama, et plus particulièrement du respect des obligations d’identification du client (know your customer) et de détection de transactions à risque (know your transaction). » Au cours de l’année 2017, la commission de surveillance a étendu son analyse sur les entreprises d’investissement et les professionnels actifs dans le secteur. En plus, elle a nommé des réviseurs externes pour enquêter sur les structures offshore et elle a envoyé un questionnaire à toutes les banques – elles sont 73 – installées au Luxembourg qui proposent de la gestion de fortune dans leurs services.

Pourtant, cela ne veut pas dire que chaque pierre a été retournée. De son propre aveu, la CSSF admet qu’un « large échantillon représentant 20 pour cent de l’ensemble des comptes de sociétés en relation avec des structures offshore a été contrôlé ». Et sur ces 20 pour cent, plusieurs infractions mineures ont été constatées – dont la CSSF n’a pas rendu publics les noms, contrairement aux infractions plus graves – et, suite à des injonctions les instituts concernés ont coopéré. En ce qui concerne les banques et autres entités qui ont donné lieu à des soucis plus graves, la CSSF a demandé des amendes dont elle chiffre le total à 2.012.000 euros. Les banques concernées sont : la CA Indosuez Wealth (Europe), DNB Luxembourg, Nordea Bank, Novo Banco (Luxembourg). Les autres entités sont : Experta Corporate and Fund Services, Link Corporate Services, Maitland Luxembourg, Pure Capital et Victory Asset Management.

Sanctions toutes relatives

Détail piquant, comme l’a révélé la radio publique 100,7, un des administrateurs de Victory Asset Management, n’est autre que le frère du grand-duc, le prince Guillaume de Luxembourg. Mais c’est avant tout Experta Corporate and Fund Services qui devrait retenir l’attention du public. Selon l’ICIJ, dans les Panama Papers c’est déjà l’entité qui a le plus de montages offshore sur son compteur.

De plus, le 5 décembre le siège de la banque Belfius a été perquisitionné par les autorités belges. Selon le quotidien « Le Soir » (et dans un article rédigé par le journaliste Xavier Counasse, membre de l’ICIJ), cette perquisition est en lien direct avec Experta décrite comme une « filiale luxembourgeoise du groupe franco-belge Dexia ». En Belgique une enquête approfondie est en train de se faire, qui implique des anciens responsables de Dexia ainsi que l’ancien premier ministre Jean-Luc Dehaene. De quoi relativiser les prouesses discrètes de notre régulateur bien à nous.


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