Politique culturelle : La tentation verte

Après cinq ans au gouvernement, les Verts découvrent l’électorat de la scène culturelle et veulent s’engager à mettre en œuvre le plan de développement culturel. Un bon engagement – reste à voir s’il est crédible.

(Photo : Déi Gréng)

Pour le coprésident de Déi Gréng, Christian Kmiotek, il n’y a pas moyen de se voiler la face : « La culture a été le parent pauvre de cette législature. On en a juste entendu parler au moment des crises – comme celle du début, où le ministère a annulé d’un jour à l’autre toutes les conventions, avec zéro résultat. Ce geste a été une beigne en pleine gueule pour les acteurs culturels », a-t-il résumé, avant de qualifier le bilan de très maigre – les ambitions du programme de coalition n’ont pas été réalisées, un constat pourtant déjà fait par le Forum Culture(s) en février, cette année.

Mais heureusement pour les écolos, il y a le plan de développement culturel (KEP) auquel s’attacher. Certes, la députée Sam Tanson a qualifié de « hasard » le fait que le programme politique et le KEP sont à 80 pour cent identiques – mais parfois, le hasard fait bien les choses. Ainsi, Déi Greng veulent un énième état des lieux de la culture, mais pas de nouvelles institutions culturelles (excepté un centre national de la culture industrielle à Esch-Belval – pour l’année culturelle 2022). Ils veulent la loi sur la protection du patrimoine historique (un classique depuis des décennies) et surtout l’introduction d’un Luxembourg Arts Council. Cette idée, qui est tout sauf neuve, impliquerait une centralisation de toutes les initiatives de promotion, de subvention et d’exportation dans une seule structure. Seulement, elle est loin de faire l’unanimité dans la scène culturelle, d’aucun-e-s craignant l’évolution vers une pensée unique et des décisions intéressées prises seulement par les heureux/ses élu-e-s qui siégeraient dans ce conseil.

80 pour cent du KEP

Sinon, les Verts préconisent aussi de remettre le Film Fund dans le giron du ministère de la Culture, de réaliser les revendications économiques du secteur pour sortir les artistes de la précarité (baisse de la TVA, standards minimaux dans les contrats et prise en considération des heures de préparation et de répétition dans les heures payées).

On voit donc très bien que les Verts tentent de se distancier de leur partenaire libéral au gouvernement. Certaines petites phrases assassines comme « L’art ne doit jamais être considéré uniquement sous son aspect financier » visent justement la politique désastreuse et peu efficace menée par le DP ces cinq dernières années. Pourtant, quand on leur demande pourquoi cinq ans durant ils n’ont pas ouvert le clapet une seule fois et défendu le secteur en crise, la défense des Verts est molle. Tandis que Sam Tanson met en avant qu’elle n’est députée que depuis quelques mois (et que déjà elle a posé beaucoup de questions sur la culture et organisé une heure d’actualité sur le KEP), Christian Kmiotek n’a pas grand-chose à dire excepté qu’avant l’arrivée de Sam Tanson, le parti n’aurait pas été muet.

Cela dit, il faut saluer une revendication qui ne se retrouve pas telle quelle dans le KEP : celle de donner plus de visibilité aux femmes dans la culture – par exemple dans les jurys, les conseils d’administration et les directions.

Reste à savoir si les Verts veulent instrumentaliser la juste frustration du secteur culturel pour leurs besoins électoraux ou s’ils prennent leur programme au sérieux. À notre question de savoir si, dans l’hypothèse d’une participation au prochain gouvernement, le parti s’engagerait à prendre la responsabilité de la culture, la réponse était : « Nous ne spéculons pas sur les élections qui sont encore à venir. »


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