Primaires et présidentielle : Dilemmes à gauche

Faut-il rassembler les voix du centre et de gauche afin d’assurer une présence au second tour ? Ou plutôt miser sur le vote populaire afin de barrer la route à Marine Le Pen ?

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21 avril 2002

Fillon rime avec spéculations. La victoire de François Fillon lors des primaires de la droite mainstream a rebattu les cartes à gauche aussi. À première vue, le fait que le politicien UMP représente plutôt la droite dure semble laisser de la place au centre. Dans les sondages, Emmanuel Macron apparaît actuellement comme le mieux placé pour engranger à la fois les voix modérées et de gauche. On lui donne autour de 15 % au premier tour, ce qui le laisse loin derrière les deux grandes candidatures de la droite et de l’extrême droite, situées entre 25 et 30 %.

D’autres estiment que l’effet polarisateur de la candidature Fillon est l’occasion pour la gauche d’affirmer haut et fort ses valeurs et de mobiliser un électorat lassé des compromis et trahisons passés. Jean-Luc Mélenchon, candidat « libre » de gauche, apparaît comme le mieux placé pour le moment, les sondages le donnant autour de 13 %. Mais Arnaud Montebourg, qui vise une nomination par le PS, affiche un peu le même profil d’une gauche qui renoue avec ses idéaux.

Des candidats ayant de bons arguments tactiques à faire valoir, ce n’est donc pas ce qui manque à la gauche. Le risque est qu’au premier tour, elle en ait trop… et au second, plus personne. Cela est d’autant plus inquiétant que le profil du nouveau champion de la droite ne facilite pas forcément sa victoire comme « candidat républicain » dans un second tour contre Marine Le Pen. Certes, sur l’axe des valeurs gauche-droite, Fillon serre de près la candidate FN et va lui enlever des voix. Les sondages le donnent d’ailleurs largement vainqueur dans un second tour sans gauche, avec deux tiers des voix.

Mais la victoire surprise de Donald Trump aux États-Unis devrait nous rendre méfiants : cette élection-là semble s’être jouée aussi sur l’axe de la question sociale ou sur celui, plus ou moins parallèle, qui oppose establishment et peuple. Et sur cet axe-là, Fillon laisse beaucoup d’espace à Le Pen pour attirer le vote populaire. Pour éviter un scénario Trump en pire, le moyen le plus sûr serait la présence d’un candidat crédible de gauche au second tour.

Hélas, il y a peu de chances que la tenue de la primaire socialiste, en janvier, voie émerger un tel candidat. De surcroît, il serait handicapé par le fait qu’au premier tour, les mouvances à gauche du PS ne lui apporteraient pas leur soutien. D’où la proposition, dans l’air depuis un moment, d’une primaire rassemblant l’ensemble de la gauche en vue d’une candidature unique.

Pour éviter un scénario Trump en pire, le moyen le plus sûr serait un candidat crédible de gauche au second tour.

Mais est-ce vraiment une bonne idée ? Et si, à la fin, ce candidat devait s’appeler Manuel Valls, Emmanuel Macron, voire… François Hollande ? On comprend que Mélenchon – la grosse tête n’explique pas tout – ait rejeté l’hypothèse d’une primaire avec Hollande en avouant que si ce dernier gagnait, il ne pourrait pas en respecter le résultat. Tandis que Montebourg, qui a annoncé vouloir jouer le jeu de la primaire socialiste, risque de se retrouver dans une situation délicate si un candidat de l’aile droite l’emporte.

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(Photos : Wikipedia)

Ainsi, l’idée de rassembler à gauche est généreuse, mais si elle oblige à cautionner, le cas échéant, une candidature et surtout une nouvelle présidence dans le style Hollande, elle s’avère contre-productive. Un tel scénario du « moins pire mais tellement mauvais » porterait probablement un coup fatal à la social-démocratie française et entraînerait une domination de la droite pour de longues années.

Pas facile d’être citoyen de l’Hexagone par les temps qui courent. Heureusement que vu du Luxembourg, la France, c’est loin.


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