Fichier central : L’avocat Rollinger donne des précisions, le CSV n’en démord pas

Nouvelle ronde dans l’affaire des fichiers « secrets » de la police et de la justice. Tandis que l’avocat de Valentin Fürst s’exprime sur ses démarches, le CSV se promulgue défenseur de l’État de droit.

L’avocat de Valentin Fürst, Frank Rollinger (© woxx)

Deux rendez-vous en une matinée pour le même sujet : l’affaire des banques de données n’est pas près de disparaître des radars, même pas en saison estivale. D’abord avec Frank Rollinger, l’avocat de Valentin Fürst, le jeune homme qui a en quelque sorte déclenché l’affaire, après s’être vu exhiber en plein entretien d’embauche pour un poste de référendaire auprès du parquet général des extraits du fameux fichier secret, qui contenait des faits pour lesquels il n’a jamais été condamné et qui étaient prescrits – entre autres un PV pour délit de vitesse à l’étranger et une affaire d’outrage à agent datant de plusieurs années.

Selon l’avocat Frank Rollinger donc, la consultation de ces données dans le cadre d’un recrutement était tout simplement illégale. Il ne conteste donc pas l’existence ni l’utilisation de ces données, mais le contexte dans lesquels cet usage a été fait. Se basant sur une loi spéciale réglant le « traitement des données à caractère personnel en matière pénale ainsi qu’en matière de sécurité nationale », entrée en vigueur en août 2018, en même temps que le règlement RGPD, Rollinger déclare : « L’usage de ces données est réservé aux juges, au parquet et à la police dans le strict cadre de leur travail. C’est-à-dire pour les magistrats dans le cadre de la juridiction. Or, cet entretien d’embauche était une tâche administrative, et dans ce contexte la consultation et l’utilisation des données relatives à mon client constitue un dysfonctionnement. » Que le parquet ait avoué de son propre gré lors de sa conférence de presse avoir systématiquement recours à la banque de données « Ju-Cha » pour ses embauches n’arrange rien. Tout comme le fait que Jean-Claude Wiwinius, le président de la Cour supérieure de justice et membre de l’autorité de contrôle judiciaire de la Commission nationale pour la protection des données (CNPD) ait assisté lui-même à cet entretien d’embauche. Le même Wiwinius qui a raconté aux député-e-s ébahi-e-s en commission parlementaire avoir écrit une multitude de rapports au sujet de ces dysfonctionnements, qui n’ont jamais été pris au sérieux par la politique…

« Et hätt net dierfe geschéien »

Pour Rollinger, soit les magistrats ne savaient pas que leur comportement était hors la loi, soit ce serait pire encore et ils auraient délibérément choisi de se placer au-dessus de celle-ci. En tout cas, l’avocat va demander les motifs du refus de l’embauche de son client au parquet et aller devant le tribunal administratif. En même temps, une réclamation va être lancée auprès de la CNPD, qui pourrait très bien la réorienter aussi vers le tribunal administratif. Pour Rollinger, c’est clair : « Ça n’aurait pas dû arriver ! »

Gilles Roth, Martine Hansen et Laurent Mosar (© woxx)

Du côté du CSV, qui avait annoncé en urgence un point presse par son groupe parlementaire mardi après-midi, il s’agissait avant tout de montrer que même en été, le plus grand parti de l’opposition ne baisse pas les bras et maintient la pression sur le gouvernement et avant tout sur les ministres Braz et Bausch. Fustigeant la tactique du salami des ministres verts, Laurent Mosar a déclaré que « le gouvernement ne veut pas de transparence, sauf quand le parlement l’y force ». Et son collègue Gilles Roth de renchérir en décrivant une « chape de plomb » à laquelle lui et ses collègues se heurteraient régulièrement lors de leurs démarches. Balayant d’une main les décennies pendant lesquelles le CSV était chargé de ces dossiers, les deux sont allés jusqu’à prétendre que si eux étaient touchés par un tel scandale, ils seraient désormais « en Birkenstock avec du muesli en chemin vers Lourdes ».

Hors de ces phantasmes de renversement du gouvernement – ou du moins de l’éviction de l’un ou l’autre ministre –, les conservateurs ont présenté une question parlementaire monstre (plus de 50 questions) et une liste de réunions en commissions jointes de la Justice et de la Sécurité intérieure. Le CSV aimerait bien sûr repasser les ministres sur le gril, mais aussi entendre le doyen de la faculté de droit Stefan Braum, qui a attaqué leurs vues sur le scandale publiquement à plusieurs reprises, tout comme des représentant-es de la Commission consultative des droits de l’homme, l’Ombudsman, l’ORK et le Conseil de l’ordre des avocats des barreaux. La rentrée s’annonce donc chaude.


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