Dans son recueil de miniatures, le diplomate et poète transcrit ses expériences new-yorkaises – un hommage à la ville et à ses habitant-e-s. Des textes habités d’une volonté de communiquer plus que des impressions, qui se heurtent parfois aux surfaces trop luisantes de la ville qui ne dort jamais.
Pour vraiment apprécier « Les bulles », mieux vaut connaître les rues de New York. Avoir vu l’intégrale de Woody Allen ne suffit pas pour suivre le narrateur dans les rues de Manhattan, Queens ou Brooklyn – d’autant plus que la perspective des personnages de Reisen n’est pas celle du touriste, ni celle d’un-e local-e, mais d’un expatrié. Le lien entre la biographie de l’auteur, qui après avoir été journaliste au Tageblatt a pris le chemin de la diplomatie et bossé justement pour la représentation luxembourgeoise au siège de l’ONU à New York, est évident dès la première histoire : « Une soirée » raconte justement le délitement d’un couple dans lequel l’homme diplomate onusien délaisse sa femme.
En cela, le titre « Les bulles » prend plusieurs significations : les bulles peuvent renvoyer aux microfictions isolées dans le livre, mais aussi aux conditions de vie de la haute société new-yorkaise, voire celles dans lesquelles vivent les riches expatrié-e-s qui passent leurs journées dans leurs bureaux et les soirées sur les toits de Manhattan, sans jamais vraiment participer au quotidien des vrais New-Yorkais-es. Une bulle que l’auteur ne crève qu’une seule fois d’ailleurs, dans le texte « Un rêve », qui suit le rêve et la réalité d’une femme battue par son compagnon – et qui s’en sort grâce à une énième réitération du rêve américain. Ici l’auteur sort de ses strates sociologiques habituelles, mais malheureusement juste pour raconter une histoire superficielle dépourvue d’intérêt – la métaphore onirique du début ne menant nulle part.
Ce qui n’est pas le cas pour le reste du livre, où les miniatures de quelques pages réussissent toutes à retenir l’attention du lectorat et à le plonger totalement dans les vies des personnages décrits. Ce sont de petites tranches biographiques de personnes qui vivent des instants de basculement de leurs vies ou qui reviennent sur les brisures qui ont façonné leurs biographies. Ici, Reisen excelle dans l’art de suggérer toute une atmosphère en quelques lignes. La dernière histoire, autobiographique, renoue aussi très bien avec le début du livre – de façon à ce que l’amoncellement de bulles devienne un cercle.
Bref, un joli livre pas ennuyeux du tout – idéal pour lire dans un train, voire dans un avion pour Big Apple.