Dans une tribune libre d’un grand quotidien, un « petit » artiste se plaint des relations perverses entre artistes, médias et organisateurs.
En lisant bien entre les lignes de la tribune libre qui a tout de même suscité une petite polémique, se seraient surtout les « grands artistes étrangers » (écrit en lettres capitales) et le dévouement des médias – et par conséquent du public – à leur égard qui dérangeraient et pourriraient la vie des artistes luxembourgeois-e-s. Par conséquent, les « petit-e-s Luxembourgeois-e-s » seraient condamné-e-s à des performances anecdotiques en marge des grands événements.
Plusieurs constats s’imposent : premièrement, si on se sent mal-aimé par son public, mieux vaut ne pas monter sur scène. Accuser son public potentiel d’ignorance ou – pire encore – d’ingratitude n’est pas la meilleure façon de s’y prendre si on veut changer les choses. Et puis, s’étonner que les mondes des médias, des artistes et des organisateurs soient liés, relève d’une fausse naïveté – surtout de la part d’un artiste chevronné, comme l’auteur de la tribune. C’est justement cela ce qu’on appelle la mise en réseau, le fameux « networking », dont il est question tout le temps et qui est déjà devenu la spécialité de plusieurs collectifs d’artistes luxembourgeois. Et un réseau a plusieurs spécificités. Que l’on veuille ou non, on en fait partie dès qu’on se montre en public en tant qu’artiste, critique ou organisateur. De plus, un réseau n’est jamais infini, on y trouve seulement ce qu’on y met. Finalement, c’est un peu comme internet.
Et ce qu’on peut trouver au Luxembourg ne diffère pas sur le fond de ce que l’on trouve ailleurs dans le monde : une masse d’artistes de tous bords, de couches sociales différentes et de qualités différentes. Du médiocre peintre du dimanche, en passant par le poète demeuré au 19e siècle, au génie méconnu. Pour ainsi dire : non, la situation au Luxembourg n’est pas inquiétante. Et non, les artistes luxembourgeois-es ne sont pas mis au placard pour faire place à des grosses pointures venues de l’étranger. Chaque ville moyenne en France, en Europe ou partout dans le monde compte son groupement d’artistes inconnu-e-s. Juste que ceux-là ne réclament pas plus d’attention parce qu’ils sont – par exemple – champenois. La compétition est la même pour tout le monde et ce n’est pas un passeport luxembourgeois qui fait de quelqu’un un meilleur artiste.
Par contre, ce qu’il faut changer dans l’attitude des Luxembourgeois envers « leurs » artistes – et cela concerne tout le réseau des médias, artistes et organisateurs – ce serait d’enfin sortir l’appréhension de l’art produit par des luxembourgeois-es de l’anecdotique. D’en finir avec l’éternel « je-suis-artiste-et-en-plus-luxembourgeois-aimez-moi-davantage ». Au contraire, laissons nos artistes être des artistes comme tout le monde. D’ailleurs, ce n’est pas la nationalité de l’artiste qui fait la différence, mais ce qu’il produit. Et si la représentation d’artistes luxembourgeois-e-s est jugée insuffisante par certain-e-s, c’est peut-être dû au fait que nous n’en avons pas assez de bonne qualité pour remplir en permanence nos salles et nos musées. Et soyons honnêtes, qu’est-ce qu’on s’ennuierait si on ne voyait que des artistes luxembourgeois-es à longueur d’année !
Cela dit, votre humble serviteur ne dénigre certainement pas les artistes luxemburgeois-e-s, de quelle taille soient-ils, au contraire, nous n’avons pas à nous cacher. Nous disposons de bons écrivains et d’acteurs reconnus à l’étranger, de collectifs qui organisent des tournées de musiciens dans le monde entier et de beaucoup d’autres choses encore. Mais restons pragmatiques et ne demandons pas que chaque citoyen-ne un peu créatif-ve soit nommée pour l’Académie. Ou comme l’a formulé la directrice du Mudam, Marie-Claude Beaud, dans une interview donnée au woxx au sujet de notre petit pays: „En proportion, il y a moins de cons, mais vous les rencontrez plus souvent.“
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