Pauly Claude: Input in petto

Musicien, cameraman, créateur publicitaire, parolier – Claude Pauly a plus d’une corde à son arc. Nous lui avons rendu visite à la fin de l’été.

Claude Pauly
Photo: Christian Mosar

SCENE LUXO

Dans les profondeurs de l’herbe devant la maison une paire de baskets reçoit comme chez d’autres un nain de jardin. Une averse d’été vient de tomber et l’herbe haute est humide. Le musicien ouvre la porte avec un crâne en main – une impression danoise? A l’intérieur, d’autres figures en argile ont toutes les formes, toutes les tailles, figurent en bref des réflexions plastiques qui combattraient le mal de tête. Dessins et modelages pour formuler des souhaits insensés. Claude Pauly fourre ses doigts dans sa poche, palpant son crâne – il dira que la musique doit être agréable à la tête comme aux hanches.

Le rez-de-chaussée de sa maison est rempli de meubles d’occupants silencieux, voire inexistants; lui habite au premier, où serpente un petit fumet de bâton d’encens. Des tons exotiques, des bleus, des rouges, des verts, des jaunes, des posters hindous et des divinités contorsionnées au dessus du radiateur. C’est il y a 21 ans – à la sortie d'“Apocalypse Now“ – que Claude Pauly a décidé de se consacrer à la musique.

Claude Pauly: Il faut un courage titanesque pour se bouger le cul au Luxembourg, car que l’on fasse un travail créatif ou non, c’est tout à fait indifférent. Il n’y a pas d’inputs.

Qu’est-ce que c’est?

C’est un terme technique „mettre dedans“, entrées de données dans un système informatique, de signal dans un dispositif électronique. Une nourriture qui pousserait à travailler. Ce qui me plaît ici, c’est le paysage!

Vous ne vivez pas de vos compositions, respectivement arrangements ou des concerts?

Non, ma principale source de revenus est RTL où je suis cameraman free lance. J’ai fait des jingles de radio ou des lancements publicitaires, par exemple pour Auchan. Ou l’habillage d’antenne d’Eldoradio. J’ai eu un premier prix du „National Summer Guitar Contest“ organisé par le magazine spécialisé „Soundcheck“ à Fribourg en Allemagne. J’ai fait un CD à Bruxelles aux studios Caraïbes. Tous ces événements musicaux, après ma formation au London Guitar Institute, ne me font pas vivre.

Pensez-vous que certains artistes ou certaines catégories d’artistes réussissent mieux que d’autres à subvenir à leurs besoins ?

C’est impossible. 99 pour cent sont enseignants ou ont d’autres sources de revenus. Peut-être que certains peintres, qui vendront une ou deux toiles par an, ou certains acteurs y parviennent. Pour ce qui est des acteurs, auxquels il arrive de travailler dix heures par jour ou qui n’ont pas de vacances, ils sont quand même dépendants de théâtres subventionnés.

Un musicien qui produit un CD pour se faire connaître, doit trouver un acheteur, un diffuseur et de préférence au-delà de la frontière.

Vous êtes pourtant régulièrement sur scène …

Oui, j’aime beaucoup ça! Je me suis parallèlement produit avec des formations de jazz fusion, funk, rédigé une méthode „Thinking Guitar“ ou proposé des conférences telle „Musik und Psyche“ avec le musicologue Georges Urwald, participé à Lola Blau, Taboola Rasa …

Quelle base commune avez-vous avec des musiciens de tout bord et d’âges différents?

Peut être des choix émotionnels ou des antennes, des sensibilités développées en commun. Une vue des choses que l’on cherche derrière les apparences. La musique est un moyen pour transposer ce qui n’était que des idées académiques, des pistes à développer. Mais le point intéressant réside dans l’opération elle-même.

Vous écrivez des chansons, interprétées par Sascha Ley. Pourquoi sont-elles toujours en anglais?

J’ai eu une phase d’écriture de chansons, où cela me faisait du bien de tourner autour de la musique différemment. L’anglais me paraît la langue la plus mélodieuse et la plus concise aussi. Une formation telle „Claude Pauly Quartett“, ou „Garlicks“ ou, depuis peu, mon trio „Spire Trio“ (avec Sascha Ley et Marc Demuth), bref tout ce qui me touche avec des personnes qui s’investissent, j’espère en faire bon usage. J’ai parfois des regrets, dans des moments de crise, de ne pas avoir une formation plus poussée.

Et puis, Londres, quand j’ai été m’y inscrire, j’avais déjà 24 ans. Cela m’a rendu plus réaliste, j’ai été confronté sans cesse à des événements énergisants.

Etes-vous très narcissique?

Non, pas plus qu’un autre artiste.

Qu’est-ce qui vous touche le plus, qu’est-ce qui vous motive à être créatif ?

A transmettre ce que je ressens.

N’êtes-vous pas très romantique?

Il y a une grande intensité émotionnelle, mais romantique …? Je vais vous donner un morceau à écouter, que je ressens comme sombre …

Comment voyez-vous votre évolution ?

L’âge est dans la tête, j’ai concrètement étudié le jazz à 31 ans. Ces derniers temps, je sais mieux formuler ce qui me vitalise le plus – donc je veux garder constamment le lien avec la création. Et avoir autour de moi des gens qui sentent les choses comme moi.

Les images et la musique se rassemblent de plus en plus, pourriez-vous imaginer de mettre la caméra au service de la musique?

L’idéal serait de combiner un résultat attendu avec un acte créatif. Parfois vous écrivez quelque chose qui ne vous plaît pas.

Dans ce cas, il faut le garder, prendre distance et puis reconsidérer la chose. D’kacht een ëmmer mat Waasser, mee vill a gudd, c’est ce qui importe.

Interview réalisée

Claude Pauly se produira avec le „Spire Trio“, le vendredi 26 octobre, au Café UBU, Esch-sur-Alzette.Claude Pauly: „La musique est un moyen pour transposer ce qui n’était que des idées académiques, des pistes à développer.“


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