Art naïf
 : San Cristóbal s’invite 
au grand-duché


La galerie Painture, c’est en quelque sorte un morceau de Cuba échoué à Luxembourg-ville. Petite visite de ce lieu attachant à l’occasion de l’exposition consacrée au peintre naïf Pelly Aroche.

1367_expo_GroussIl a bourlingué, Philippe Calon. Ce boulanger de profession, qui écrit aussi à ses heures, a néanmoins une destination de prédilection ces dernières années : l’île de Cuba où, il y a pas mal de temps, il a même confectionné des viennoiseries dont s’est délecté Fidel Castro ! Intarissable d’anecdotes sur un pays qui le passionne, c’est tout naturellement qu’il a commencé à exposer des artistes qui en sont originaires, dans la charmante petite galerie improvisée au milieu de sa boulangerie.

Mais attention, précise Christel Collet, épouse de Philippe : le lieu n’est pas exclusivement réservé aux artistes cubains. On y trouve aussi, au gré des vernissages, toute une palette de nationalités présentes au grand-duché. Même si, bien sûr, les nombreux amis que le couple compte à Cuba exposent souvent dans ce local chaleureux, au milieu des pains et autres articles d’épicerie. Et Christel, incollable sur l’histoire de l’art de l’île de la Caraïbe, de sortir de tous les recoins imaginables des tableaux offerts et dédicacés par des artistes dont certains sont aujourd’hui très en vue. Passionnée, elle entreprend également d’expliquer l’influence majeure que le talentueux peintre cubain Wilfredo Lam a exercée sur Picasso.

En ce moment, c’est Pelly Aroche qui est mis en valeur dans la galerie. Infirmier de profession, ce peintre autodidacte réside à San Cristóbal, une ville de province cubaine. Véritable star locale, il a notamment réalisé une fresque pour le magasin d’État de cette localité. Par le jeu des amitiés artistiques, et via Miami où son travail a séduit une galeriste renommée internationalement, il a déjà exposé aux États-Unis et en Allemagne. Voici donc maintenant ses toiles accrochées au Luxembourg.

1367_expo_KlengC’est peu dire que le style d’Aroche est naïf : ses contours sont nets, sans sfumato vaporeux ; ses aplats, en général unis sans nuances de teintes ; ses sujets, puisés dans la vie quotidienne, restent sans métaphores osées ou ardues. L’exposition présente notamment un tableau qui évoque la province cubaine, à l’occasion d’un mariage pendant lequel on chante, on danse et on filme les mariés. Loin des complexités et contradictions de La Havane, la peinture d’Aroche décrit un monde encore préservé des excès du progrès… qui ne tardera pas à changer, maintenant que les relations entre l’île et son puissant voisin américain se réchauffent quelque peu.

Si la vie quotidienne alimente l’inspiration du peintre, il se laisse parfois aller à des sujets plus poétiques. Comme dans ce tableau représentant un soupirant particulièrement audacieux qui, après avoir été décrocher la lune à l’aide d’une immense échelle, la fait passer depuis son perchoir à sa bien-aimée. Ou bien dans cette toile où des paysans dansent avec des animaux anthropomorphes.

On l’aura compris, ce n’est pas la critique sociale, fonction essentielle mais pas exclusive de l’art – et qui conviendrait parfaitement à un pays au régime tout de même autoritaire -, qui fait l’attrait de l’exposition de la galerie Painture. C’est d’abord la découverte d’un lieu, cette boulangerie-galerie tenue par deux passionnés. C’est ensuite le panorama d’une scène artistique cubaine en constante ébullition créatrice que l’érudition des propriétaires permet de dresser. Avant, malheureusement, sa probable américanisation. Mais ça, c’est une autre histoire.

Jusqu’à la fin de l‘année 
à la galerie Painture, 
3, rue de Reims, Luxembourg-Gare.

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