Dessins/sculptures : Mémoires hétéronymes

Jusqu’au 2 octobre, l’Institut Camões présente « Gabinetes », assemblage de dessins et sculptures de Pedro Saraiva et ses acolytes imaginaires.

Photos : Nuno Lucas da Costa

Pedro Saraiva, né en 1952 à Lisbonne, y travaille et y vit. Professeur titulaire à l’École supérieure des beaux-arts de la capitale portugaise, il est avant tout un artiste plastique assembleur. Assembleur de personnages qu’il crée, jonglant entre fiction et réalité. « Gabinetes » est le résultat de cette réunion, qu’il conçoit depuis 2008. Au Luxembourg, les personnages mis à l’honneur parmi les multiples issus de son imagination sont António Maria Codina, Cristina Rosa Agostinho et Alberto de Oliveira Bárcea.

Deuxième expo postconfinement de l’Institut Camões, « Gabinetes » réunit ainsi dans une première partie quatre dessins de grande taille. En s’approchant, le visiteur et la visiteuse seront médusés par le travail de longue haleine exécuté par l’artiste portugais. Et l’on comprend pourquoi Pedro Saraiva a non seulement exposé à Lisbonne ou à Porto, mais également à Los Angeles, Berlin, Madrid, Bâle ou encore Monte-Carlo. Attribuées au personnage d’Alberto de Oliveira Bárcea, les quatre images semblent nous livrer un témoignage lointain et quelque peu lugubre autour de natures mortes. Par moments, il nous semblera être en train d’observer des vases lymphatiques à travers un microscope. Chacun pourra donner libre cours à son interprétation. Il faut cependant souligner que nous nous trouvons face à un impressionnisme d’un nouveau genre, tellement les fins traits noirs sont abondants, modelés et chirurgicaux. Un vrai exercice de détail.

Une deuxième partie de l’expo se compose de 16 dessins de petite taille disposés diagonalement et verticalement les uns par rapport aux autres. Cette fois-ci, les images sont empruntées au personnage d’António Maria Codina et ont recours aux mêmes techniques minimalistes monochromes, représentant des roses et autres éléments naturels sous plusieurs angles. Et il faut le dire : cela allège l’état d’esprit quelque peu sépulcral de la partie antérieure. Chaque carré dessiné semble vouloir partager sa propre histoire et son propre vécu, comme si Codina, autre facette de Saraiva, aspirait lui aussi à se démultiplier.

On peut dire que l’expo se clôt sympathiquement avec quatre roses sculptées en plâtre (également attribuées à Codina). Par contre, sans non plus exiger de strass ni de paillettes, l’on aurait voulu un peu plus de visibilité pour la sculpture attribuée à Cristina Rosa Agostinho, une boîte en carton ressemblant à un colis scotchée à un des piliers de l’Institut Camões. Ornée d’encre acrylique et de ruban adhésif blanchi, cette boîte se camoufle facilement dans le blanc stérile et immaculé de l’espace d’exposition. Simultanément, ce détail exprime à lui tout seul l’absence d’un fil conducteur entre tous les éléments exposés – et surtout ramenés d’un passé lointain pour les uns, moins lointain pour les autres. Il faut dire que tous les personnages issus de l’imagination de Saraiva ont chacun leur propre biographie et sont tous décédés selon une chronologie élaborée par l’artiste. On aurait ainsi voulu connaître quelques traits de personnalité de ses collègues idéalisés et ainsi déchiffrer un peu plus les méandres de sa psyché.

Le visiteur et la visiteuse retiendront surtout les quatre dessins de taille majeure d’Oliveira Bárcea, dont la réalisation semble avoir été accompagnée d’une interminable clepsydre. Et les contempler sera tout sauf une perte de temps. Il reste deux semaines.

Jusqu’au 2 octobre au 
Centre culturel portugais – Institut Camões.

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