Graffiti/peinture : Stick to it !


La galerie Nosbaum Reding explore le terrain, encore plutôt vierge, de l’art urbain transposé à l’intérieur – en donnant une exposition solo à l’artiste luxembourgeois Stick.

La situation est un peu cocasse : en plein centre-ville de Luxembourg où se trouve la galerie, tout est léché comme il se doit pour une cité qui place les touristes – riches de préférence – avant ses habitants. Bref, un cadre dans lequel le temps de survie de graffitis ou de tags est très limité. Le street art, on l’accroche donc désormais sur les murs des galeries.

Et même si le titre de l’exposition de Stick, « Touche du bois », évoque plutôt les couleurs naturelles – et fait un clin d’œil à la superstition -, les couleurs montrées sont plutôt criardes. Des néons, des fluorescences en veux-tu, en voilà. Seuls les supports que l’artiste a choisis se réfèrent au nom de l’expo. Car, en effet, Stick a fait feu de tout bois : vieux skateboards, planches de bois pressé, vieilles fenêtres… tout y passe. C’est avant tout l’œuvre principale accrochée dans la première salle qui en profite. Et ce qui rend cet arsenal d’art urbain encore plus fascinant, c’est le contraste entre le détail – où l’on peut découvrir de petites peintures soigneusement encadrées, des écuelles surpeintes et autres surprises – et l’impression qui prévaut quand on s’éloigne de quelques mètres. Car à bien y regarder, on voit que l’artiste a commencé à écrire son nom – un graphisme qui se perd quand même après quelques lettres dans la masse de détails, mais qui reste toujours là, comme une racine.

Et il est vrai que l’origine des peintures urbaines – des peintures tout court, si on prend en considération Lascaux – est l’inscription du nom, du désir d’affirmer son existence hors de son propre corps, de confirmer son être à l’altérité et la postérité.

Dommage juste qu’à côté de cette pièce emblématique, l’exposition ne surprenne pas vraiment. Des superpositions de différents styles d’art urbain, de graphismes toujours hauts en couleur, mais rien qui interpelle vraiment le regard, si ce n’est le contraste entre l’espace cliniquement propre et ce mode d’expression né sur des supports bien plus crades.

La discussion autour de la question de savoir si oui ou non le street art a vocation à être montré dans des galeries ou des musées est une controverse qui ne date pas d’hier. Beaucoup d’artistes venus de l’extérieur se sont fait traiter de « sell out » par les puristes, tandis que d’autres y voient une façon de rendre hommage à une forme d’expression longtemps ignorée par le marché de l’art.

Mais depuis que certains ont franchi ce seuil, ils ont aussi vu leur carrière avancer. Cela a bien sûr un prix, que d’autres ne veulent pas payer : celui de ne plus faire profiter le public de son art, de le réserver aux cercles qui fréquentent les lieux de culture.

De ce point de vue, montrer du street art pur comme celui de Stick dans une galerie ne fait pas beaucoup de sens. Il faudrait aussi qu’il s’adapte à ces nouveaux lieux, qu’il se mette à interagir avec les codes qui y règlent le quotidien, radicalement différents de ce qui se passe dans la rue.

Un peu dommage donc, mais vu que l’artiste n’en est qu’à ses débuts – ce n’est que sa troisième exposition solo – tout cela peut encore évoluer.

Jusqu’au 10 juin à la galerie 
Nosbaum Reding.

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