À nouveau candidate pour le DP, Monica Semedo est en tête de la liste de son parti pour les élections européennes. Elle s’engage notamment dans le domaine social.
woxx : La thématique que vous avez choisie est la politique sociale. Pourquoi, vu que ce n’est pas la première chose qui vient à l’esprit en pensant à l’Europe ?
Monica Semedo : Justement à cause de cela : l’Europe est une union économique et une union des valeurs. Ce qui présuppose l’égalité de toutes et de tous – et c’est à cause de cela que le social est important. Notre slogan n’est pas « social, libéral, européen » pour rien. Et il reflète absolument les choses auxquelles je crois et auxquelles le DP croit. C’est important pour moi, qui viens d’une famille qui n’avait pas les meilleures cartes en main. Mes parents sont venus du Cap-Vert, mon père est mort jeune et ma mère a été femme de ménage et a éduqué cinq enfants. Donc je connais le renoncement à certaines choses, mais je suis reconnaissante à mes parents de leur émigration au Luxembourg. Car ici, il nous a été possible de prendre l’ascenseur social, notamment par le biais de l’éducation. Pour moi, penser qu’en Europe d’autres enfants n’ont pas les mêmes chances est insupportable. Les possibilités d’évoluer doivent être les mêmes pour tout le monde, pour que chacun-e puisse décider quelles options prendre.
Pourtant, le programme électoral du DP reste assez vague. On y parle de droits sociaux qui devraient être harmonisés vers le haut. Pourriez-vous être un peu plus concrète ?
Par exemple, nous voulons un salaire minimum pour tous les pays de l’Union européenne – car c’est loin d’être le cas partout. Cela procure aussi une certaine sécurité dans la planification de la vie. Bien sûr que ce salaire ne serait pas le même pour tous les pays, mais chaque État membre pourrait fixer le sien, selon ses possibilités, et pourrait l’adapter. Il est temps de rendre quelque chose aux Européen-ne-s : la dernière décennie, avec ses crises, a aussi été dure pour les citoyen-ne-s de l’Union. Et si nous voulons une Europe forte, il faut aussi qu’elle soit forte à l’intérieur.
Une chose étonnante dans le programme du DP est la condamnation du dumping fiscal. Où est la cohérence avec la politique financière menée par le DP depuis plus de cinq ans – qui a prôné la concurrence fiscale ?
La concurrence est toujours une bonne chose. Le Luxembourg doit rester compétitif, tout comme l’Union européenne dans son ensemble. Ce qui ne va pas, c’est détruire le marché intérieur avec du dumping social. Il s’agit là de la composante sociale : il n’est pas possible qu’un pays puisse exploiter des gens pour obtenir un avantage compétitif. Nous y sommes strictement opposé-e-s. En ce qui concerne le dumping fiscal, beaucoup de choses se sont passées ces trois ou quatre dernières années. Le Luxembourg s’est toujours montré ouvert au dialogue et coopératif et nous sommes ‘compliant’ avec les standards de l’OCDE.
Le Luxembourg a tout de même participé aux mécanismes qui ont permis aux multinationales de ne pas payer leurs impôts dans des pays où elles faisaient des bénéfices…
Nous sommes en train d’y remédier au niveau européen. Il y a des propositions de l’OCDE sur lesquelles le Luxembourg est tout à fait d’accord. C’est pourquoi le grand-duché reste ouvert à tout ce qui ressort à ce niveau. Il faut savoir que nous ne sommes pas dans une bulle et qu’il faut du fair-play entre tous les États – un level playing field où tout le monde dispose des mêmes possibilités.
Concernant les réfugié-e-s, le DP prône avant tout une meilleure clé de répartition entre les États membres, mais aussi la protection des frontières extérieures. Est-ce un compromis avec l’électorat conservateur de droite ?
Nous voulons savoir qui veut entrer dans l’Union européenne et qui a droit à une protection internationale. Ce n’est pas un contrôle total que nous prônons, mais aussi une meilleure coopération avec les pays d’où partent ces gens qui veulent nous rejoindre.
Ce qui veut aussi dire que vous tolérez la coopération européenne avec la Libye, où les abus des droits de l’homme ne sont plus à prouver ?
C’est aussi dû aux dysfonctionnements sociaux. Et tout comme nous avons besoin d’une Europe forte, nous avons besoin d’un entourage fort. C’est là que l’Europe doit s’engager pour une politique sociale aussi au-delà de ses frontières, par exemple avec une meilleure politique africaine.
Le pays entier connaît Monica Semedo, 34 ans, grâce à sa longue carrière sur RTL Télé, qui a débuté dès son enfance. Désormais communications manager et executive assistant chez Luxembourg for Finance (LFF), la détentrice d’un master en sciences politiques défend sa deuxième candidature sous l’étendard libéral.