Le CNA honore « Les univers photographiques de Michel Medinger » – et revient sur quatre décennies de créativité et de sensibilité hors pair.
Même s’il semble anodin, le titre « Les univers photographiques de Michel Medinger » est bien choisi. Car réduire le photographe à une période de son travail ne lui ferait pas justice. Medinger n’est pas un de ces artistes qui restent sur la même formule, une fois qu’ils ont trouvé une expression qui colle avec le public – et le fric qu’ils se font avec. Tout au contraire, son art photographique est avant tout une recherche, celle de la lumière et du motif approprié. Et celle d’une mise en scène aussi.
Avant de découvrir la photographie, le jeune Medinger veut devenir peintre, comme son père, qui copiait les grands maîtres pendant son temps libre. Et comme lui, il est devenu sportif, participant même aux Jeux olympiques de Tokyo en 1964. Dans l’interview avec Marguy Conzemius parue dans le livre accompagnant l’expo, Medinger explique que ses premières photographies étaient celles d’événements sportifs à l’étranger, vu que la presse de l’époque n’envoyait pas toujours des photographes.
Puis c’est le déclic : aidé par son savoir-faire en chimie (il travaille notamment aux laboratoires de l’État), Medinger s’installe une chambre noire et se met à photographier des objets, notamment des outils de son père. C’étaient les années 1970, et il faudra attendre la décennie suivante pour qu’il s’attaque à la couleur – plus précisément au Cibachrome –, avec ses séries sur les cabanes de chantier et ses bien connues pompes à essence. Entre-temps, Medinger a aussi découvert son amour pour le polaroïd. Après la disparition de ce format – et malgré une courte renaissance dans les années 2010 –, il revient au noir et blanc et se met à concocter ses fameuses natures mortes.
En parcourant l’exposition, qui naturellement met l’accent surtout sur cette dernière phase, on a l’impression que ce n’est qu’à ce moment qu’il développe un vrai langage artistique au premier sens du terme. Les arrangements que Medinger photographie avec une précision méticuleuse sont bien plus que des memento mori. Y transparaît son admiration pour le langage codé, caché dans des détails des maîtres flamands du 17e siècle – une fascination d’enfance.
C’est ainsi que ce ne sont pas les sujets qui dominent sa vision, mais bien l’inverse. Medinger est une sorte de photographe-compositeur, voire photographe-écrivain, puisqu’il écrit véritablement avec les objets – jamais des humains – qu’il met en scène. Les contenus peuvent être humoristiques, comme ce Jésus tenant dans ses bras une canette de lubrifiant 3 en 1, mais aussi érotiques, voire macabres.
Toutefois, ce n’est pas comme si Medinger livrait à chaque fois une note de lecture pour ses œuvres. Il reste toujours un espace d’interprétation et de liberté, pour que tout le monde puisse y voir aussi ce qu’il ou elle veut voir. Ce qui vient aussi du fait que l’artiste ne pousse jamais le trait dans ce qu’il propose : s’il y a érotisme – sous la forme d’une fleur ou d’un poisson momifié, voire d’une vis –, il n’est jamais vulgaire, mais il ne fait que suggérer un ingrédient sexuel. Et c’est au spectateur de se laisser aller à son interprétation.
Tout comme le « reportage » photographique de Romain Girtgen sur Michel Medinger, avec une reconstruction intéressante de la chambre noire de l’artiste au Display02, l’exposition vaut le coup, ne serait-ce que pour découvrir un des photographes les plus insolites du pays.
Au CNA jusqu’au 16 décembre.
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