Le fer, ça nous parle au Luxembourg. Pourtant, l’exposition du jeune sculpteur liégeois Xavier Mary « The Enigma of Steel » n’évoque pas le bon vieux temps des hauts fourneaux – mais tout autre chose…
Que les Belges soient farceurs, surtout quand ils sont artistes, on le savait au moins depuis Magritte. Xavier Mary, né en 1982 à Liège et élève de l’École supérieure des arts Saint-Luc, n’est pas un surréaliste mais un bosseur qui sait combiner matériaux lourds et pensées légères. Mais attention : « The Enigma of Steel » dépasse de loin le stade de la blague à laquelle on est tenté de croire en entrant dans la galerie Nosbaum & Reding.
Les énormes panneaux de fer, travaillés au coupeur plasma dernier cri dans une entreprise spécialisée à Diekirch, sont autant de références directes au film « Conan le barbare », film de John Milius sorti en 1982 avec Arnold Schwarzenegger dans le rôle principal. L’histoire sortie tout droit de l’univers pulp de l’écrivain américain Robert E. Howard est celle d’un fils de chef dans un temps antédiluvien où le fer vient juste d’être inventé et où il est la ressource la plus importante. Un méchant massacre la famille de Conan, lequel est réduit en esclavage, réussit à s’enfuir, rencontre une jolie princesse et prend sa revanche sur l’odieux ennemi. Bref, une histoire hollywoodienne classique qui a même récemment fait l’objet d’un remake.
Mary utilise cette imagerie pour incruster les symboles dominants de l’univers de « Conan le barbare » dans les plaques d’acier : épées, haches et autres instruments de torture, tout comme un panneau consacré à des paroles extraites du film (pas de Schwarzenegger a priori, pour cela le texte est bien trop long et compliqué).
Que veut nous dire l’artiste ? Puisqu’il fait entrer un univers pop et trash dans les murs blancs d’une galerie, on serait tenté de le mettre du côté de celles et de ceux qui trop souvent ces derniers temps tentent de faire revivre le pop art avec plus ou moins de succès. Mais l’idée de Xavier Mary va bien plus loin – d’autant plus que ses pièces n’ont pas l’esthétisme requis pour être classées pop.
En combinant un matériel ancestral, qui a tout de même traversé les époques (en tant qu’habitant du bassin minier liégeois, il devrait être au courant) et technologies de pointe, il construit une sorte d’arc temporel. Sans le fer, nous ne serions pas ce que nous sommes de nos jours. Sans le fer, même le coupeur plasma qui a servi à créer les œuvres de l’exposition n’aurait pas atterri entre les mains de l’artiste. Et sans le fer, une légende comme celle de Conan n’aurait tout simplement pas de sens. Cela dépasse donc le cercle du réel pour englober aussi la fiction – aussi convenue soit-elle.
Dans le texte accompagnant l’exposition, on peut lire qu’en procédant de la sorte, Xavier Mary « nous invite par ailleurs à réfléchir sur notre responsabilité dans l’usage que nous faisons de la technologie ». C’est vrai. Et puis si ça sert en même temps à raviver quelques souvenirs d’enfance de films vraiment débiles, c’est toujours ça de gagné.
Tout ça rend « The Enigma of Steel » une exposition agréable, drôle et ludique à découvrir – et qui sait, peut-être que le rêve de posséder une épée de Conan se réalisera pour l’un ou l’autre ?
À la galerie Nosbaum & Reding jusqu’au 6 janvier.
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