La galerie Nosbaum & Reding a invité l’artiste français Rainier Lericolais, dont les objets et tableaux sont beaucoup profonds que leur simple allure.
Rainier Lericolais serait-il un farceur ? C’est ce qu’on se demande en examinant la première pièce de l’exposition dans la petite galerie de la rue Wiltheim. Sur un étalage un peu spécial, on peut voir une enveloppe dorée avec une aiguille dedans, un bout de disque qui sort du bois et une page d’un livre. Mais pas n’importe lequel : en regardant de près, on peut lire qu’il s’agit d’un extrait du « Plan de l’aiguille » – roman de Blaise Cendrars paru en 1929, qui était la première partie de la série consacrée au héros autofictionnel Dan Yack. Un roman dont le titre rappelle aussi le mont Blanc et sa première ascension, ainsi que l’histoire des trois pruneaux laissés là pour marquer l’événement. Et pourtant, les références mises en avant par Lericolais l’éloignent plus de l’écrivain franco-suisse qu’ils ne l’en rapprochent – surtout en parlant de musique, une des rares disciplines artistiques à laquelle ne s’est pas essayé Cendrars.
Ce qui les lie, c’est le désir de laisser des traces. D’où les demi-vinyles qui lorgnent des pièces en bois, les MiniDisc incorporés ou encore les bouts de bandes sonores collés sur les sculptures. L’autre référence littéraire cachée dans une des sculptures est un extrait de la nouvelle « L’invention de Morel » d’Adolfo Bioy Casares. Ici, les choses sont plus claires : dans la nouvelle de l’écrivain argentin, un naufragé trouve refuge sur une île où chaque jour se répète inlassablement, et il finit par découvrir que l’île fonctionne comme un grand disque qui se répète quotidiennement.
L’enregistrement, la faculté de fixer un moment vécu pour toujours sur un support et la fragilité de ce dernier sont des thèmes obsessionnels de Rainier Lericolais. Il traque le moment qui a la faculté de tout changer et qui peut être détruit en une fraction de seconde. En fait, c’est aussi une transposition dans le monde de l’art contemporain de la deuxième faculté de l’artiste : celle de musicien. Car depuis le début des années 2000, Rainier Lericolais produit seul ou avec d’autres de la musique électronique, plutôt de genre abstrait – donc pas vraiment dansable.
Mais le moment de la création est aussi présent dans ses œuvres, dans une série de tableaux accrochés dans la deuxième salle de la galerie. Deux grands rectangles noirs y interpellent le regard du visiteur : il ne s’agit pas de dessins, mais bien de plaques de verre noircies par le feu, sur lesquelles Lericolais a fait danser une toupie métallique. Ses traces, évidemment des spirales de toutes formes, donnent l’impression d’une carte céleste antique ou d’un tableau abstrait en noir et blanc. Pourtant, c’est le geste de l’artiste qui est à mettre en avant ici. En laissant danser sa toupie sur ces plaques en verre, il a carrément enregistré son action et l’a sauvegardée sous une forme esthétique.
Moins originaux, mais plus pointus du point de vue technique, les portraits de femmes produits par Lericolais. Ce sont des formes découpées de journaux, repeintes dans des couleurs douces comme le bleu ou le brun, qui, une fois bien agencées, composent des portraits féminins. C’est beau à voir, mais par rapport à la multidimensionnalité des autres pièces, ça reste un peu en surface.
Une belle découverte à faire donc !
À la galerie Nosbaum & Reding, jusqu’au 12 mai.
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