NETLABEL: Le net en musique et en images

Les labels de musique pullulent. Ce sont surtout les petites structures sur internet qui ont la côte, et il était temps que le Luxembourg s’en dote aussi.

Jeune homme cherche artistes pour partouzes esthétiques et expérimentales: Ralph Zeimet est le fondateur de Schnurstrax, un label pas comme les autres.
(photo: woxx)

Il n’a pas vraiment l’air d’un jeune entrepreneur, même s’il a étudié l’économie. „De toute façon Schnurstrax n’a jamais été un projet qui devait rapporter de l’argent“, explique Ralph Zeimet, le fondateur du label. Et d’attendre le moment où il peut enfin griller une clope tranquillement dans le café où nous nous sommes rencontrés. Il est deux heures un quart et le dernier client n’est pas pressé pour terminer son plat. Le paquet de Camel Light tourne dans la main gauche de Ralph Zeimet.

„L’idée de monter Schnurstrax est plutôt née d’un besoin de ma part de communiquer. Je voulais créer une plateforme pour pouvoir diffuser mes idées et surtout pour découvrir d’autres musiciens et artistes“, raconte-t-il. L’idée derrière Schnurstrax n’est pas seulement de proposer une offre de diffusion musicale de plus dans l’univers déjà saturé de l’internet. Le site – ou plutôt les deux sites sur lesquels le label existe, myspace et blog – est conçu pour devenir une plateforme plus universelle de rencontre entre artistes de tout genre. „Mais surtout entre artistes graphiques ou vidéastes et musiciens. J’aimerais bien que des collaborations et des rencontres se fassent à travers Schnurstrax.“

C’est peut-être le petit plus qu’il fallait, car de nos jours tout un chacun possédant un ordinateur et une bonne connexion internet peut publier sa musique ou ses photos et vidéos et autres oeuvres d’art. Pour sortir du lot, il faut d’un côté rechercher l’originalité, de l’autre se montrer sélectif. „Par exemple, il est absolument clair que je ne collaborerai pas avec des musiciens entièrement dévolus à la musique pop. Il y a une ligne dans Schnurstrax: l’expérimentation. Qu’il s’agisse de musique ou d’images, il doit toujours y avoir une certaine recherche derrière et un esprit d’indépendance. Ceux qui veulent faire vibrer les ondes des stations radio de masse ne m’intéressent pas“, affirme-t-il. On peut penser que ce désintérêt est mutuel.

Un enfant du web 2.0

Qui sont les artistes „signés“ sur Schnurstrax? D’abord, le fondateur préfère parler de „collaborateurs“ plutôt que de „signés“. „Sans eux, premièrement, je ne serais rien. Et puis, nous ne sommes pas liés par des liens d’argent mais par des intérêts communs, comme l’envie de rechercher des musiques expérimentales et de les diffuser.“ Le groupe le plus lointain sur lequel il est en train de travailler vient du Burkina Faso et s’appelle Buud Kombat. Les deux gars font du hip-hop énergétique en y mélangeant des sons traditionnels africains. „C’est un ami à moi qui travaille dans l’humanitaire là-bas qui me les a proposés. En ce moment on essaie de leur donner une plateforme. Car point de vue distribution musicale là-bas, c’est un peu mince“, raconte-t-il. A côté de cette aide „humanitaire“ un peu spéciale, Schnurstrax a dans son catalogue des groupes luxembourgeois comme Raftside et les légendes du noise- rock de Tvesla. Mais aussi des projets moins connus tels que Lezet, un artiste électro venant de Serbie, ou Schock, un artiste graphique.

C’est éclectique et innovant. Tout ce qu’on avait espéré – en vain – dans cette année culturelle 2007. Pourtant, Schnurtstrax ne fait pas vraiment partie de cet univers-là. „Je ne pense pas que cette année culturelle serve à grand chose. Certes il y a une très bonne dynamique qui s’est enclenchée dans certains secteurs, notamment autour de l’Exit 07. Mais quand l’année sera finie, il faudra beaucoup d’efforts pour sauvegarder cette dynamique“, commente-t-il.

Sauvegarder la dynamique

Mais alors, pourquoi mettre sur pied une telle structure? „Avec mon projet Fracture, j’étais déjà en collaboration avec un autre netlabel parisien, qui s’appelle Leep – Les enregistrements de l’Europe parisien. J’ai fait mes trois premiers disques avec eux.“ Au fil du temps, ses partenaires ont été un peu dépassés par la dynamique qu’ils avaient enclenchée. Quand son quatrième album traînait un peu, Ralph Zeimet a pris les choses en main: „Je me suis dit, pourquoi ne pas monter un netlabel moi-même, tant que j’y suis?“ Chose faite au printemps 2007. Zeimet est un fan ou plutôt un accro du web 2.0, le web communautaire sur lequel ce sont les utilisateurs qui créent les contenus des pages, les grandes firmes se limitant volontairement à fournir des espaces virtuels libres. „J’ai en ce moment pas moins de sept pages myspace à gérer. Avec tous mes projets musicaux et Schnurstrax, cela fait beaucoup. Mais je crois en ce que je fais, même si passer huit à neuf heures de suite sur internet est dur“, explique-t-il. Il a toujours été, dit-il, un type porté par l’endurance.

Peut-être que pour mieux comprendre comment il fonctionne, il faut savoir qu’avant la musique, il envisageait une carrière dans le sport. „Je n’ai fait que ça jusqu’au bac. Je ne me suis jamais vraiment intéressé à la musique, excepté un peu de techno de temps en temps,“ admet-il en souriant et en tirant – enfin – sur sa cigarette. „J’avais un retard énorme à rattraper. J’ai dû m’organiser une collection de CD acceptable et aller à plein de concerts. Puis, la tentation de faire de la musique moi-même est devenue plus grande et je me suis mis à programmer ma propre musique.“ De ses nuits blanches passées devant l’ordinateur sont nés quatre albums jusqu’à présent, tous téléchargeables gratuitement sur internet.

C’est là aussi une des particularités de Schnurstrax: proposer aux „collaborateurs“ des licences Creative Commons. Celles-là, à la différence des droits d’auteur ordinaires font que les pièces des artistes sont mis à disposition gratuitement, mais ne peuvent en aucun cas être utilisées à des fins commerciales. Lancées il y a quelques années, elles peinent encore à démontrer leur efficacité. Principaux problèmes: le manque de fiabilité dans le cas d’une transgression et surtout le blocage par l’industrie du disque, qui vit des droits d’auteur ordinaires. Pour de petites structures comme Schnurstrax, c’est avant tout l’aspect non-commercial et donc beaucoup moins compliqué et moins responsabilisant qui doit primer. En tout cas, aucun artiste ne s’est plaint jusqu’à aujourd’hui.

De toute façon, Schnurstrax ne veut pas se limiter à être une plateforme de téléchargement, comme Jamendo par exemple. Ralph Zeimet voit déjà plus loin: „Je suis en train de fomenter quelques trucs. Je rêve de soirées Schnurstrax, où des artistes de notre label se produiraient ensemble et pourraient même monter des collaborations inédites“.

www.myspace.com/ justafracture
www.schnurstrax.net

Fracture, en concert ce vendredi 10 août
à l’Exit 07.


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