PACO PLAZA: On protège bien Arcelor …

Le jeune Valentinois Paco Plaza était récemment l’invité du Festival Cinénygma pour la réalisation du film d’horreur „Second Name“, titulaire du „Méliès d’Argent“.

„Nous continuons de permettre des choses complètement irrationnelles, de véritables meurtres massifs.“ Paco Plaza, réalisateur du film d’horreur „Second Name“, au sujet de la guerre en Irak.

En s’inspirant du roman de Ramsey Campbell, Paco Plaza a tourné son premier travail „Second Name“ intégralement en anglais. La plupart des acteurs sont britanniques et l’histoire se déroule au Royaume Uni. Dans son travail, le réalisateur parle souvent des personnes qui croient avoir le droit de décider sur le sort des autres …

woxx: Vous avez remporté le „Méliès d’Argent“ à Sitges pour „Second Name“. Qu’est- ce que ce prix a signifié pour vous?

Paco Plaza: Quand j’étudiais à Valence, j’allais à Sitges avec un sandwich, on restait avec les amis pour assister au festival. Je pensais qu’un jour, je réaliserais une production de ce genre et voilà que dix ans plus tard je reçois un prix comme le „Méliès d’Argent“. Ce moment a été l’un des plus importants de ma vie. C’était comme un cercle qui se fermait. J’avais réalisé mon rêve.

Pourquoi avez-vous adapté l’oeuvre de Campbell?

Il est inquiétant et fascinant de découvrir chez les gens des facettes différentes. Lorsque la télévision montre l’affaire d’une femme victime des brutales raclées de son mari, il n’est pas rare d’entendre le témoignage d’un voisin qui décrit l’agresseur comme étant une personne „charmante“. Et c’est cela qui est terrifiant! Parfois, nous entendons parler de la peur de l’inconnu, mais la peur de ce que ce que nous connaissons, de ce qui nous est familier et qui ne correspond pas à l’image que nous nous en sommes faite, est bien plus forte. Ceci est parfaitement reflété dans l’oeuvre de Campbell et dans mon film.

Pourquoi „Second Name“ a été tourné en anglais et se déroule sur les Iles Britanniques avec des acteurs du Royaume Uni?

Nous avons préparé le projet pour qu’il puisse atteindre le marché anglais. La politique de la maison de productions „Filmax“ est marquée par l’internationalisation de ses produits. Si nous réalisons le travail en anglais, il est plus facile d’atteindre d’autres marchés européens.

Tourner dans une langue autre que la sienne pose pourtant des problèmes. Par exemple, en ce qui nous concerne, nous avons répété souvent avec les acteurs, et il était difficile de saisir les nuances de l’interprétation.

Quelle expérience ramenez-vous en Espagne de votre séjour au Luxembourg?

Mon premier court métrage, „Abuelitos“, a déjà été présenté au Luxembourg. C’était un des pays du circuit „Méliès“ que je ne connaissais pas. C’est une expérience intéressante de voir ce que font d’autres réalisateurs en Europe, de voir comment ils financent leurs projets. D’avoir assisté à ce festival était assez important pour l’échange d’expériences qu’il permet. Et puis, „Cinénygma“ est un festival très agréable.

Comment voyez-vous le panorama actuel de l’industrie cinématographique en Espagne et en Europe?

En principe, la maison de production „Filmax“ est une des exceptions, car ses films se vendent bien sur le marché européen. Mais je crois que le cinéma européen a besoin d’un fort soutien de la part des institutions. Les Etats devraient plus s’engager pour promouvoir une industrie cinématographique européenne de qualité mais qui ne dispose pas d’assez de quota de marché. Si l’on protège l’acier d’Arcelor, pourquoi ne pas faire la même chose avec les films européens?

Quel sera votre prochain travail?

C’est l’histoire réelle d’un Galicien qui s’appelait Romasanta; un homme-loup qui a vécu en 1850. Il a été vérifié scientifiquement que c’était le premier cas de lycanthropie en Espagne.

Le sujet que vous traitez dans „Second Name“ est très actuel.

Malheureusement, comme nous avons pu le constater récemment, ce n’est pas qu’au cinéma qu’il y a des gens qui croient avoir le droit de massacrer des innocents, sans le moindre remord. „Second Name“ traite de l’intolérance, du visage caché des personnes, du pouvoir, de secrets. C’est l’histoire d’une découverte. Daniella Logan, suite à la mort de son père dans des circonstances tout à fait mystérieuses, découvrira de manière tragique que le père idéalisé, qui l’a accompagnée toute sa vie, était une personne radicalement différente, un monstre caché derrière un rideau de mensonges, de trahisons et de mort. De même, Daniella découvre que le monde qui l’entoure est bâti sur le sang des innocents.

De quoi avez-vous peur?

Ce qui s’est passé en Irak me terrorise. L’affreux spectacle de la guerre que nous avons vu en direct me remplit de panique. Cette fois-ci, il ne s’agissait pas d’une fiction, ni d’un mensonge, mais du meurtre massif de milliers d’innocents. Et aucune organisation internationale n’a été capable d’empêcher autant de douleur et d’impuissance.

D’ailleurs, je n’ai jamais vraiment trouvé effroyables les monstres surnaturels, comme les vampires, les extraterrestres, des êtres dont l’existence incertaine représente une menace trop fictive. La peur, la terreur véritable, vient de plus près, des choses dont l’apparence cache la menace. La terreur habite le commerçant du coin, l’homme au regard torve que nous croisons chaque jour dans la rue, l’enfant qui nous regarde depuis une voiture arrêtée au feu rouge. C’est là qu’habite la peur.

Fondu au noir, sur l’écran, un plan qui montre une coalition de pays en train d’envahir une planète avec ses puissantes armes, tuant la plupart de ses habitants … Fondu au blanc, un plan se ferme et apparaissent des militaires en train de distribuer de la nourriture aux pauvres extraterrestres que, préalablement, ils avaient massacrés … Pourrions-nous faire un film avec ce scénario?

Je ferai un documentaire de tout ce qui s’est passé en Irak. Des choses qui nous paraissaient inconcevables deviennent réalité. Nous continuons de permettre des choses complètement irrationnelles, de véritables meurtres massifs, soutenus par des lobbies géostratégiques pour lesquels la perte de vies humaines n’est qu’un effet collatéral, nécessaire pour que leurs bénéfices ne diminuent surtout pas. Les êtres humains vivent sur la planète depuis des millions d’années, mais ils n’ont pas encore appris à résoudre leurs conflits en paix. Il faut bien avouer que les monstres les plus terribles se cachent, le plus souvent, derrière un visage qui respire la gentillesse.

Interview: Nassio Beltrán

(Traduction de l’espagnol: Paca Rimbau Hernández)


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