Si ce n’était pour l’ellipse qui ouvre et clôt le livre – brodée autour d’une citation du poète mystique persan Jalâl al-Dîn Rûmî : « La blessure est l’endroit où la lumière entre en vous » -, on aurait pu croire à une sorte de testament. Car dans son nouveau livre, le d’habitude si farceur oulipien Le Tellier se livre à son lecteur et raconte l’histoire de sa famille. Celle de son père biologique absent, de son beau-père tout sauf téméraire et surtout celle de sa mère, dont la folie ne semble supportable qu’à partir du moment où elle est cliniquement vérifiée. C’est aussi une certaine histoire de la France du 20e siècle qui nous est racontée à travers ces pages : le silence face aux déportations dans le Paris occupé, l’ascenseur social fonctionnant encore et les jalousies qui pourrissaient la vie familiale déjà gangrenée par les différends entre la mère et sa sœur. Finalement, Le Tellier va même révéler qu’une partie de son livre « Assez parlé d’amour » était bien autobiographique. En ne se cachant plus derrière une fiction, la blessure fondamentale de cet épisode apparaît comme cicatrisée. Mais heureusement, le style typique de Le Tellier reste : enjoué, léger et se refusant aux grandes tribulations métaphysiques devant l’Éternel (auquel du coup, il ne croit pas trop non plus). Tout ça fait de « Toutes les familles heureuses » un livre inattendu, mais absolument à lire.
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