Virginie Despentes : Vernon Subutex (tomes 1 et 2)

1390kulturkurzdespentes21390kulturkurzdespentes1Vernon Subutex est un pseudonyme datant d’une époque révolue. Il fait référence au nom de plume « Vernon Sullivan », que prit naguère Boris Vian pour écrire ses premiers romans noirs, et au Subutex, le nom d’une substance utilisé dans le traitement substitutif de la dépendance aux opiacés – et avant tout à l’héroïne. Pour le protagoniste, le nom renvoie aux années 1980 et 1990, quand il tenait encore une boutique de disque huppée à Paris. Ayant raté le tournant du numérique, Subutex a dû mettre la clé sous le paillasson à la fin des années 2000. Commence alors sa descente aux enfers. D’abord lente, puisqu’il peut subsister en vendant ses stocks au compte-gouttes sur l’internet, puis en vitesse accélérée à partir du moment où il perd son logement. S’ensuit une longue période d’errance sur les canapés de ses connaissances, amoureuses, meilleurs amis et même anciens ennemis. Tout au long de cette évolution, on constate que la vraie intention de l’auteure n’est pas de suivre son personnage principal, mais de l’utiliser comme une sorte de vaisseau afin de donner une description cliniquement exacte de la société actuelle. Ce n’est pas pour rien qu’une critique imprimée sur le dos du bouquin le qualifie de « comédie inhumaine ». Car il se pourrait bien que Virginie Despentes reprenne le rôle de Balzac avec ce très long texte – un troisième tome était prévu pour mars de cette année, mais il n’a pas encore paru ; entre-temps, l’auteure a confirmé que son roman sera converti en websérie. Quant au deuxième tome, celui-ci narre les péripéties de Subutex une fois celui-ci devenu sans-abri. Désormais, il vit au-dessus du parc de la Butte-au-Cailles dans le nord de Paris, et ses amis chez qui il a squatté au premier tome se rendent chez lui tous les jours. Retournement de la situation et portrait d’une société qui, une fois mise à mal, s’isole dans ses délires. Que « Vernon Subutex » est un roman résolument contemporain, on le remarque aussi à l’utilisation des réseaux sociaux : au lieu d’être diabolisés, ils font partie intégrante de l’intrigue. Et puis le style de Virginie Despentes a lui aussi connu une bonne évolution. Plus concise et moins portée sur les descriptions explicites d’échanges de faveurs érotiques, l’auteure montre une face plus humaine, voire humaniste, de sa verve.


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