Des voyages intérieurs dans le métro, des égarements amoureux d’un dessinateur sans talent, une rencontre entre deux couples autour du Décalogue, une épopée avec Harley et tueur en série et, pour finir, une nouvelle aventure d’Isaac le pirate.
CHRONIQUE BD
La rubrique à bulles bourgeonne déjà
Sous une grêle de nouveautés, il faudra dégainer vite pour être à la page. Imaginez que vous pensiez faire quelques économies pour vos vacances d’été, eh bien, c’est raté. Il ne vous reste qu’à ranger vos catalogues de voyages et à filer chez le libraire.
Peut-être vous faudra-t-il prendre le métro pour y aller. Dans ce cas, il vous est instamment conseillé de vous procurer „Métropolitain“ de Hyuna. Il s’y trouvera, qui sait, un personnage vous faisant penser à votre voisin ou plus inquiétant, à vous-même. A chaque station, un portrait, un destin pas toujours brillant, comme celui de Madame Dubrocq qui nourrit une passion dévorante pour les romans à l’eau de rose très rose ou encore celui de Tosca, jeune fille disgracieuse mais ô combien touchante qui rêve de retrouver son père. Sept instantanés de vie que Hyuna a su saisir et qui restent comme suspendus dans nos mémoires.
Arrêt sur image–
Il faut dire que l’auteur à l’expérience de la douleur et des chemins détournés et son histoire ressemble à s’y méprendre à un roman de John Irving. Ainsi, Hyuna était d’abord destinée à une carrière de soprano qu’elle a du abandonner à la suite d’une blessure au larynx causée par un … ours. Cette expérience douloureuse l’a d’abord conduite vers des études de droit, afin de confondre les coupables propriétaires de la bête. Puis, avide de trouver un autre moyen d’expression, elle s’est inscrite aux Beaux-Arts. „Metropolitain“, paru chez Delcourt, est son premier album solo après le collectif „Paroles de taule“.
Du côté de chez Glénat en format carré, Moynot pointe à nouveau le bout de son crayon, après le splendide „Monsieur Khol“ paru l’année passée. Cette fois, c’est tout seul à la barre qu‘ à choisi de travailler Emmanuel Moynot. Son personnage, Oscar, est un dessinateur de cartoons vivant chichement de ses dessins. Vilainement exploité par un éditeur sans scrupules, il est à la recherche d’une véritable idée. Malheureusement, sans Monsieur O, espèce de muse mal embouchée qui ne cesse de le houspiller, Oscar n’est bon à rien. C’est Monsieur O, quand il veut bien se montrer, qui peaufine, améliore, corrige les dessins sans personnalité du timide Oscar.
Le bougre a si peu confiance en lui, qu’il ne voit pas tout de suite l’intérêt que lui porte sa jolie voisine, enceinte d’on ne sait lequel de ses ex-amants. Il se perd dans une relation sans lendemain avec une „dinde de la haute“ qui rêve de le voir abandonner ses cartoons pour se consacrer à l’art noble de la peinture. Sans la complémentarité de Dieter au scénario, on pouvait craindre que la magie n’opère pas. Il n’en est rien, „Oscar et Monsieur O“ est assurément de la même veine poétique et délicate que Monsieur Khol. Lui et Oscar pourraient même être voisins de palier.
Amour, gloire et beauté
Avec quelques mois de retard, voici enfin la suite du Décalogue. Les impatients seront servis, avec la possibilité de s’offrir les tomes 5 et 6 immédiatement. Cette série, dont le scénario est orchestré par Frank Giroud mais dont les dessinateurs sont différents à chaque tome, s’affirme un peu plus alors qu’elle amorce sa phase de pleine maturité, avant la conclusion. Giroud parvient à attiser l’intérêt du lecteur pour le curieux destin de Nahik, ce livre extraordinaire qui ne contiendrait rien de moins que les dix commandements légués par le Prophète Mohamed.
Le tome 6, „L’échange“, dessiné par Alain Mounier, mérite une mention spéciale. Tout commence en 1882, à bord d’un navire effectuant la traversée vers les Etats-Unis. Deux couples se rencontrent, l’un plutôt pauvre, l’autre, vous l’aurez deviné, plutôt riche, et se lient d’amitié. Leur point commun: les deux femmes sont à quelques jours de leur accouchement. Cette fois, ce sont les inégalités sociales du XXe siècle que stigmatise Giroud. Chacun en prend pour son grade, aussi bien les nantis que les manants, avec pour cruelle mais juste conclusion qu’il vaut mieux naître riche et salaud que pauvre et pourri. Mounier parvient à rendre joliment l’atmosphère 1900 et le pastel des belles toilettes des dames
A peine sorti „Camden Rock“, le tome 1 de „James Healer“ chez Lombard, on a déjà tout dit et son contraire sur la nouvelle série de Giulio De Vita et Yves Swolfs. En effet, Swolfs n’invente rien, reprenant de ci de là les clichés classiques de l’Amérique profonde, de l’Indien blanc et du tueur en série. Et pourtant, ne boudons pas notre plaisir, que diable! Les dessins de De Vita sont excellents, les couleurs très plaisantes et finalement, on se laisse facilement prendre au jeu de cette intrigue classique. Quant au héros, le beau, le solitaire, le pas très souriant James Healer aux longs cheveux et à la grosse Harley, même s’il n’est pas franchement original, je monterais volontiers à l’arrière de son cheval rugissant!
Pour terminer sur une note de totale réussite, voici „Les glaces“, la suite des aventures d’Isaac le pirate de Christophe Blain parue chez Dargaud. Isaac poursuit son périple marin, dessinant tout ce qu’il voit. L’absence d’Alice lui pèse de plus en plus. Celle-ci continue d’attendre son peintre aimé, non sans passer par les affres du désir pour un autre gentilhomme. L’Alph-Art 2000 du meilleur album pour le tome 1 n’était pas usurpé, la qualité du tome 2 assure une parfaite continuité.
Séverine Rossewy
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