Pendant des mois, le ministre Halsdorf a pris l’étude Visupol comme prétexte à ses décisions univoques en matière de vidéosurveillance. Maintenant qu’elle est publique, on constate que l’empereur était nu dès le début.
Si les débats à la Chambre des député-e-s de la semaine dernière ont clarifié ne serait ce qu’une seule chose, c’est que la vidéosurveillance au Luxembourg manque clairement de transparence. Pour acculer le ministre de l’intérieur le député vert Felix Braz – qui se verrait bien à sa place – a interpellé Jean-Marie Halsdorf justement sur le sujet de la vidéosurveillance et sur son élargissement souhaité par le ministère. Rappelons que dans ce contexte, le ministre Halsdorf a même osé traiter d’incompétents les membres du conseil communal eschois, qui – sur l’instigation de déi Lénk – avaient déposé une motion dans laquelle ils réfutaient l’installation de caméras de police sur leur territoire.
Eh bien, ce n’est pas seulement cette remarque qui est restée coincée comme une arête dans le cou de Jean-Marie Halsdorf. Déjà rien que le fait que son intervention avait tout d’une défense, indique que le dossier n’est pas vraiment kacher. Et pour cause: la fameuse étude Visupol, que le ministre avait déjà évoqué pour justifier sa décision unilatérale de continuer la vidéosurveillance sur le territoire de Luxembourg-Ville fin 2009 – sans pourtant la publier à l’époque – est tout sauf une étude. Cela ressemble plutôt à une énumération des infractions constatées dans les zones surveillées qu’à une analyse poussée des avantages que représenterait l’espionnage par vidéo. Premièrement, et le reproche date déjà de fin 2009, elle a été faite par la police elle-même – elle est donc tout sauf indépendante et désintéressée. Deuxio, elle est même plutôt tendancieuse. Et cela parce qu’elle met en relation directe la zone C dans la capitale – la gare pour être précis – avec les gares d’Esch-sur-Alzette et d’Ettelbruck, donc justement là où Halsdorf rêve de pouvoir installer au plus vite des caméras. Pourtant, les chiffres sont tout sauf parlants : si le taux d’élucidation des infractions constatées diffèrent, ce n’est que de peu – 10 pour cent de décalage entre Esch et la capitale par exemple – et cela ne suffit pas pour conclure à un avantage des zones surveillées. D’autant plus que dans la majorité des cas, il s’agit de simples identifications des malfaiteurs – cela veut dire qu’on sait très bien à quoi le malfrat ressemble ou, dans le meilleur des cas, il est connu nominativement, mais cela ne veut pas dire que la police ait réussi à lui mettre les menottes. En plus, les délits constatés sont loin d’être des crimes capitaux : si la grande majorité concerne des agressions, des crimes « très graves » comme la mendicité, le vandalisme ou des délits liés à la drogue sont capitalisés sous la même et unique catégorie.
Autre grave problème : les agents Visupol, ceux derrière les écrans, ne sont même pas assermentés. Certes, Halsdorf a invoqué qu’ils avaient tous été formés à l’avance sur le tas, mais qu’importe à partir du moment où ceux-ci ne sont pas forcés de prêter allégeance au gouvernement et à la constitution ?
Après tout, un système de vidéosurveillance étatique est un signe de méfiance de l’Etat face à ses citoyen-ne-s. Et en tant que tel, ces derniers ont le droit de savoir ce qui se passe derrière les écrans. En tout cas, si Halsdorf a réussi une chose, c’est d’augmenter la méfiance envers sa politique opaque et pas vraiment cohérente.