ÉTUDIANTS: We want you !

C’est bien connu : il n’y a pas que le boulot dans la vie. Traduisez en langage d’étudiants : il n’y a pas que les cours. Il faut aussi s’engager, militer. Tour d’horizon des possibilités au Luxembourg.

Etudiant-e-s !
Pour vous rassembler,
c’est facile !
C’est indiqué.
(photo: woxx)

Y a-t-il une vie à côté des études universitaires ? Depuis quelques années, cette question a une légitimité nouvelle au Luxembourg. Car ce qui commence à sembler banal, à savoir l’existence d’une véritable université au grand-duché, ne l’est que depuis peu. Mais qui dit université, dit vie étudiante – et cette vie dépasse souvent le cadre des cours magistraux et travaux dirigés. Aussi cette vie se prête-t-elle à un engagement plus militant : devenant adulte et en pleine émancipation intellectuelle, l’étudiant prend conscience de ses intérêts personnels et des enjeux collectifs.

Même si le Luxembourg a longuement été amputé d’une structure universitaire digne de ce nom, il peut se targuer d’une tradition d’engagement estudiantin plus que centenaire. Etant donné que le Luxembourg était dépourvu d’université, il n’est pas étonnant que les premiers « cercles » ont vu le jour à l’étranger dans les années 80 du 19e siècle dans des villes universitaires à forte fréquentation luxembourgeoise, comme Louvain ou Aix-la-Chapelle. Mais c’est quelques années avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale que les premières organisations « nationales » voient le jour : en 1910 tout d’abord, les étudiants catholiques et conservateurs créent l’Association catholique des étudiants luxembourgeois (ACEL, à ne pas confondre avec l’ACEL d’aujourd’hui), qui, après le second conflit mondial, renaîtra de ses cendres sous l’appellation d’Association luxembourgeoise des universitaires catholiques (ALUC).

Parallèlement, les étudiants de la gauche de l’époque (entendez « libéraux » et « socialistes »), se réunissent à partir de 1912 sous la bannière de l’Association générale des étudiants luxembourgeois (AGEL), communément appelée « Assoss ». Cette association, qui fournira un certain nombre de résistants sous l’occupation nazie, survivra jusque dans les années 70. En 1920, les organisations s’accordent pour former ensemble une structure confédérale, à savoir l’Union nationale des étudiants luxembourgeois (UNEL). Mais cette organisation ne restera qu’un tigre de papier jusqu’à sa résurrection dans les années 50. Jusqu’en 1969, l’UNEL regroupe tou-te-s les étudiant-e-s en comptant en son sein une aile droite, l’ALUC, et une aile gauche, l’Assoss. Mais comme un peu partout en Europe, l’UNEL n’échappera pas à l’effervescence politique de mai 68, avec ses dissensions politiques internes. Résultat : l’ALUC quitte l’UNEL qui deviendra progressivement, avec ses hauts et ses bas, l’organisation des étudiant-e-s de gauche toutes tendances confondues, et ce jusqu’à aujourd’hui.

De nos jours, le Luxembourg compte ainsi trois organisations estudiantines de niveau « national » : l’UNEL, l’ALUC – qui semble néanmoins être tombée en veilleuse – et l’Association des cercles des étudiants luxembourgeois. Cette dernière rassemble l’ensemble des cercles d’étudiants éparpillés à l’étranger. Fondée en 1984 et se disant « idéologiquement et politiquement neutre », elle réunit selon ses propres dires une quarantaine de cercles ainsi que des organisations « consultatives » que sont les différentes organisations de disciplines (qu’il s’agisse des étudiants en médecine, en ingénierie, en psychologie ou en droit…). Quasiment institutionnalisée, l’ACEL collabore étroitement avec le ministère de l’Enseignement supérieur et s’investit beaucoup plus dans les champs revendicatifs et corporatistes que contestataires.

Ce n’est pas le cas de l’UNEL, qui s’inscrit dans une démarche plus politique. Ainsi, la « grande dame » du mouvement estudiantin était une des actrices principales de la campagne du « Non » à la constitution européenne ou dans le mouvement opposé à la loi « 5611 » qui avait fait descendre, il y a tout juste un an, quelques milliers de lycéen-ne-s dans la rue. Dans la foulée de ce mouvement, l’UNEL a d’ailleurs subi une cure de jouvence en se dotant d’une section ouverte aux lycéens. Désormais, il semble que l’UNEL redevienne le passage obligé de tout jeune se situant politiquement à gauche. De plus, à l’instar du magazine de l’ACEL « Zoom 1200mm » et de sa version électronique « e-Zoom », l’UNEL a également lancé, il y a trois ans, son e-zine « Outsider » qui est désormais publié sous forme papier, paraîssant de manière irrégulière.

Sur un autre terrain, avec la fondation de l’Université du Luxembourg (UL), un certain nombre de « cercles » ont vu le jour ces dernières années. Ainsi, parallèlement à la création de l’UL, le Luxembourg University Students (LUS) a été créé et fédère les cercles des trois facultés de l’UL. Constitué d’un comité de six membres (chaque cercle de chaque faculté y en délègue deux), la tâche principale du LUS réside dans le « contact » avec l’administration universitaire. « Nous essayons également de mettre sur pied une vie universitaire, ce qui n’est pas évident. Mais nous organisons des bals étudiants, afin que les étudiants apprennent à se connaître », explique au woxx Claudio Ceccarelli, membre du comité du LUS. En effet, éparpillée sur trois sites géographiquement distincts (Limpertsberg, Walferdange et Kirchberg), et dotée d’une masse critique assez faible (environ 5.000 étudiant-e-s), la jeune université peine encore à trouver un « flair » estudiantin. Il n’est donc pas étonnant que le LUS suive également de près le projet de la « Maison de l’étudiant » qui devrait être implantée sur le site de Belval une fois que l’UL y aura déménagé.

Pourtant, un des trois cercles qui constituent le LUS est antérieur à la création de l’université : le Cercle des étudiants de la faculté trois (CEFT) rassemble, comme son nom mystérieux l’indique, les étudiants de la « troisième » faculté, à savoir la Faculté des lettres, des sciences humaines, des arts et des sciences de l’éducation (FLSHASE). Comme l’explique au woxx Gilberto Fernandes du CEFT, ce cercle rassemblait à l’origine les étudiants de l’Iserp, l’ancienne école de formation des instituteurs, désormais intégrée à la FLSHASE. Le cercle a eu beau changer de nom et accueillir des étudiants venant d’autres disciplines, il est toujours formé par une majorité d’inscrit-e-s en sciences de l’éducation. Et si les sciences humaines se trouvent désormais presque toutes sur le campus de Walferdange, les lettres sont encore au Limpertsberg. Cet éclatement géographique n’est pas propice lorsque l’on sait que le « quartier général » du CEFT se situe à la « Sandkaul », le café/bar autogéré du campus, qui a vu défiler des générations entières d’instits en herbe.

En tout état de cause, les sites semblent fédérer bien plus que les disciplines. En témoigne notamment la création du cercle des étudiants du campus Limpertsberg (ECL) cette année. Le président du cercle, Alexandre Larmoyer, justifie la création de l’ECL par la volonté de promouvoir la vie estudiantine et de permettre aux étudiants de « sortir de la vie scolaire ». Dans ce sens, l’ECL avait organisé une « soirée de bienvenue » le 24 octobre.

A problématique spécifique, cercle spécifique : l’UL compte également une association réunissant les étudiants issus du continent africain, le CEAL. Il va sans dire que les étudiants africains (dont la majorité vient du Cameroun, du Sénégal et du Maroc) sont confrontés à des problèmes beaucoup plus aigus. Jean-Xavier Manga, président du CEAL, en dresse d’ailleurs une liste conséquente : qu’il s’agisse des loyers trop chers, de la mobilité (les étudiants africains, souvent plus âgés que leurs collègues européens, bénéficient plus difficilement des réductions pour les transports en commun), des finances (à leur arrivée, ils doivent déposer une garantie bancaire de 1.200 euros) ainsi que la confrontation avec la bureaucratie locale en vue de l’obtention des titres de séjour et permis de travail. « Un vrai parcours du combattant », estime Manga, « d’autant plus qu’une fois arrivés au Luxembourg, les étudiants africains, sans attache locale, se retrouvent perdus ». D’où la nécessité de se soutenir mutuellement au sein d’une organisation. Heureusement, il semble qu’ils ne soient pas isolés par rapport aux étudiants non africains. Manga confirme d’ailleurs qu’une « franche collaboration » avec le LUS est en vue afin de créer une « véritable vie universitaire » à l’UL. Comme quoi, le Luxembourg aura attendu l’avènement du 21e siècle pour enfin voir naître les balbutiements d’une vie universitaire. C’est tard, mais c’est déjà ça.

Pour plus d’informations, visitez les sites suivants : www.unel.lu, www.acel.lu, www.aluc.lu, www.lus.lu, www.sandkaul.org (en ligne prochainement) ou www.uni.lu pour les contacts avec les différents cercles.


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