« The Other Guys » démontre avec brio que le cinéma populaire américain ne s’est pas emmuré dans ses codes et sait toujours parodier l’actualité.
Les Etats-Unis d’Amérique ont beaucoup changé en 2010. Non seulement la politique de Barack Obama a laissé des traces – ou est en train d’en laisser – mais aussi et surtout la crise financière, qui semble-t-il, a fait sonner quelques réveils – même à Hollywood. « The Other Guys » en est le parfait exemple. Emmené par un casting de têtes connues surtout du cinéma comique, avec un Will Ferell des plus drôles qui s’associe à Mark Wahlberg, auquel l’autoparodie réussit très bien, le film plonge profondément dans une Amérique qui doute d’elle-même.
L’histoire est simple et elle a déjà été racontée des milliers de fois au petit écran. C’est celle de deux perdants qui restent intègres et finissent par lever l’affaire du siècle. Car le quotidien des agents Hoitz et Gamble n’est pas de tout repos. Membres d’une escouade qui compte parmi elles les stars absolues du district – admirablement jouées par Samuel L. Jackson et The Rock – ils sont la cible de toutes les brimades de leurs collègues. Hoitz, parce que la seule fois où il a utilisé son arme, ce fut pour tirer dans la jambe d’un joueur de baseball par erreur – ce qui a coûté la saison à la ville de New York – et Gamble, parce qu’il est tout simplement ennuyant : c’est le type qui se porte volontaire pour remplir les paperasseries de ses collègues franc-tireurs, le type qui finalement n’aime pas quitter son bureau par commodité et paranoïa.
Mais lorsque les deux stars de la brigade périssent dans un accident aussi superflu que possible, Hoitz sent son heure arrivée et tente d’attirer son partenaire à la rue pour prendre la relève. Ils n’y vont donc pas par désir de justice, mais pour leur propre compte et leurs égos. C’est surtout Hoitz qui, surjouant le petit mégalomane, est tellement énervé qu’on le prendrait volontairement pour un président français. Mais dans la logique de la narration hollywoodienne, c’est à eux deux de révéler les plans machiavéliques d’un tycoon de la bourse, David Ershon – magnifiquement campé par un Steve Coogan très british – qui n’est d’ailleurs non sans rappler Bernie Madoff. Leur chemin vers la victoire finale est bien sûr semé de voitures explosées, de fusillades, d’explosions et même de quelques excursions dans l’humour graveleux et potache dont raffolent les comédies américaines. Mais grâce à un rythme soutenu, la pilule passe assez bien.
L’atout de « The Other Guys » est d’implanter une réelle critique du système néolibéral au coeur d’une narration populaire et donc accessible à tous. Ce sont les petits clins d’oeil au monde réel qui rappellent au spectateur qu’à part le duo improbable qui essaie de sauver le monde, tout dans ce film est bien – plus ou moins – réel. Comme cet interrogatoire d’un agent de la surveillance boursière qui tente de calmer Hoitz et Gambler en leur disant qu’il n’y aurait aucun conflit d’intérêt entre son premier job et celui d’avocat d’affaires pour ledit David Ershon. A ce moment, Gambler lui exprime toute sa confiance, tout en énumérant tous les cas où la surveillance a manqué à ses devoirs : Lehman Brothers, AIG, en veux-tu, en voilà?
En d’autres mots : si vous aimez rire intelligemment, ce film est fait pour vous.
A l’Utopolis.