Véronique Kolber est une des photographes luxembourgeoises les plus prometteuses du moment. Actuellement elle présente sa première exposition en solo.
Elle parle de ses activités avec fougue et passion et sort des anecdotes à propos de l’histoire de sa vie et le cheminement de son art. Ses cheveux bouclés rebelles, elles les porte attachés sagement. Son visage limpide, dépourvu de maquillage, on le connaît bien de par les autoportraits qu’elle multiplie. Ces derniers découvrent le regard qu’elle porte de l’extérieur vers l’intérieur. En fait, c’est un peu comme écouter sa propre voix enregistrée sur une bande sonore et qui n’a pas le timbre qu’on croyait. Entendue de l’extérieur elle se révèle comme on ne l’a jamais entendue, étrangère à nous-mêmes. Avec son appareil,
elle se scrute elle-même et ce
qui l’entoure. Est-elle toujours en quête de soi? A elle de me questionner si l’on arrête jamais de l’être …
A 26 ans seulement, Véronique Kolber a déjà son univers. C’est un monde sensuel, onirique aux ambiances feutrées et éphémères qui se déploie dans les clichés. Moments saisis au vif ou contemplation ébahie devant la vie qui se joue devant elle. Il y a sûrement une envie de capturer ces moments à jamais, de garder une mémoire visuelle. Or une photographie est éphémère par définition et vouée à la disparition.
Au commencement, elle a choisi de voir les choses qui l’entourent, aussi ordinaire que cela puisse paraître. Cette banalité du quotidien, elle la revendique. „In love with the ordinary“, le titre choisi pour sa première exposition individuelle l’illustre bien. Tout ce qui l’entoure mérite qu’elle s’y attarde le temps d’une prise de vue et davantage Ù Il y a dans ses photos quelque chose de léger et/ou d’impulsif – une atmosphère. Tous les stimuli extérieurs sont traduisibles photographiquement. Tout est digne d’être vu. Dans l’exposition, elle choisit de mettre l’accent sur les cinq sens: l’odorat, le toucher, l’ouïe, le goût – plutôt dans le sens d’avoir bon ou mauvais goût – et la vue. Et d’en ajouter deux autres, importants pour elle en tant que qualités essentiellement humaines: l’humour et l’inspiration lui servent d’intuition artistique.
Véronique Kolber se tourne davantage vers son monde à elle que vers celui des autres. Parfois l’observateur peut presque se sentir voyeur. Très personnelles et intimes, les images de la jeune femme sont vernies de poésie et tout n’est pas à prendre au premier degré. Le sérieux ne s’applique pas à toutes les situations de la vie, il est vivement conseillé de rire de soi-même. Voir les choses, les personnes, la lumière de manière consciente. Justement, cette photo de la fenêtre encadrée de plantes qu’elle a prise dans la maison de ses parents, a intriguée son père. Cela faisait une éternité que ce dernier allait et venait à côté de cette fenêtre sans jamais la voir sous ce jour. Bousculer ainsi la perception de son père lui a fait plaisir.
Véronique Kolber voudrait éviter de photographier les choses comme faisant simplement parties du décor ou disparaissant dans celui-ci. Ses clichés témoignent du vécu et expriment un état d’âme. Le peintre espagnol Dali a dit: „La plupart des gens trouvent vulgaire et normal ce qu’ils ont l’habitude de voir tous les jours, si merveilleux et miraculeux que ce soit.“
Elle s’intéresse également à la mémoire des images. Dans cette même optique, elle a réussi à découvrir des correspondances entre les vielles photos prises par son grand-père et ses photos à elle. Elle découvre son grand-père qu’elle n’a jamais connu, ainsi que sa manière de percevoir son entourage à travers les images trouvées par hasard dans un vieux coffre. Elle tombe sous le charme des photos en provenance d’un autre temps, traces du passé. L’écho des images de son grand-père résonne en elle et lui fait faire des juxtapositions des photos à lui avec les siennes en prenant le même point de vue. La mémoire des temps révolus se confond avec sa propre perception à elle.
En 2004, elle présente une première fois au public cette conversation hors du temps lors du projet „Installation lx“ dans la Maison Hoferlin à Esch-sur-Alzette. De par leur ancrage dans un quotidien très précis, l’art de Véronique Kolber est avant tout une mise en scène de l’éphémère. Elle rend visible le temps qui passe et l’on croit, à travers un simple regard, entendre les aiguilles de la montre qui s’avancent et sentir la lumière qui change.
A la galerie Nei Liicht à Dudelange, jusqu’au 8 avril.Née le 15 novembre 1978 au Luxembourg, Véronique Kolber a d’abord suivi des études secondaires en arts plastiques au Lycée technique des Arts et Métiers. C’est au sein de l’Ecole Supérieure de l’Image «Le 75ª à Bruxelles qu’elle se spécialise en photographie. Elle en sort diplômée avec la mention „distinction“ en 2001. Son projet de fin d’études sur la thématique de la quotidienneté et de ses voyages répétés entre Bruxelles et le Luxembourg reçoit les honneurs du jury et a été présenté dans le cadre de l’exposition collective «Bruissement d’âme – mise au pointª. En 2002, le Centre national de l’Audiovisuel publie une première collection de photographies de l’artiste sous le titre „Reflections“. Actuellement, Véronique Kolber va et vient entre Luxembourg et Strasbourg où elle finit sa dernière année d’études d’Arts Plastiques.