Même s’ils évitent le tiroir de la « world music », The Wanton Bishops restent un exotisme, car du blues rock survitaminé en provenance du Liban, il n’y en a pas des masses.
Comme chaque groupe de rock qui se respecte, The Wanton Bishops ont aussi leur légende des débuts. Celle qu’ils racontent dans leurs interviews et sur leur site commence avec une bagarre devant un bistro à Beyrouth. Tandis que les poings volent et qu’ils essaient de séparer les baroudeurs, Nader Mansour et Eddy Ghossein se rencontrent pour la première fois. Apparemment, c’est le coup de foudre, vu que peu de temps après ils commencent à picoler des tequilas et parler musique.
Leur amour commun pour le blues – le vrai, le dur, comme l’a joué Muddy Waters – les pousse assez vite à collaborer sur scène et à organiser leurs premières répétitions dans une petite salle à côté d’une boutique d’opticien dans leur ville natale. Photogéniques et fonceurs, les deux Blues Brothers du Moyen-Orient vont vite devenir les coqueluches de la machine médiatique. Surtout que leur premier single, « Sleep With the Lights On », a vite réalisé une virée virale sur le net. C’était en 2011, et leur premier EP, « Bad Rhyme », venait juste de sortir. Pour l’international, ils y ont ajouté quelques chansons pour en faire leur premier disque, éponyme du premier single – un album qui est ressorti en 2015 en version remastérisée pour le marché européen.
Assurément, The Wanton Bishops ont aussi bénéficié de la grâce du bon endroit au bon moment. Tandis que le monde musical commençait un peu à se lasser des lubies des White Stripes ou des Black Keys, leur « touch » personnel et exotique a été un avantage. Pourtant leur succès est amplement mérité, puisque justement Nader et Eddy n’essaient même pas de copier les pratiquants orthodoxes du blues contemporain. Ils s’inspirent directement de la source rudimentaire du delta blues et l’arrangent à leur sauce.
Comme le souligne un de leurs amis dans le reportage « Walk It Home » – sponsorisé par la marque de boissons énergisantes Red Bull -, qui retrace leur première tournée aux États-Unis : « Il y aura toujours un peu de Liban dans leur musique, quoi qu’ils fassent. » Le contexte géopolitique plus que difficile qui prend perpétuellement en étau leur pays natal y est aussi pour quelque chose. Il est absolument clair que même la jeunesse dorée de Beyrouth (Nader Mansour a un diplôme de la Paris School of Business en finances tandis qu’Eddy Ghossein a lui fini ses études d’économie à la Saint Joseph University de Beyrouth) souffre des conséquences d’un conflit armé interethnique et interreligieux qui n’a jamais vraiment cessé de couver sous les braises.
En écoutant leur musique, on sent cette inquiétude permanente, cette insatisfaction auxquelles ils ne peuvent qu’opposer une joie de vivre et de jouir sans limites. Comme quoi, même une guerre civile peut avoir des effets positifs, ne serait-ce qu’en garantissant une certaine authenticité à de jeunes bluesmen qui perpétuent son histoire longue et sanglante. On pourra donc s’attendre à une soirée pleine de sueur et de passion mardi prochain.