Au 1er janvier, une nouvelle grille tarifaire de l’électricité entrera en vigueur. Mais la mesure, qui s’ajoute à la hausse considérable du prix de l’énergie à venir, inquiète.
Afin d’encourager les consomma- teur·rices à limiter leur consommation d’électricité durant les heures de pointe, l’Institut luxembourgeois de régulation (ILR) va introduire une nouvelle grille tarifaire pour les ménages et les commerces, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2025. Des niveaux de puissance de référence seront assignés aux consommateur·rices, calibrés en fonction des usages et des profils les plus courants et attribués selon l’historique de consommation personnelle. L’énergie consommée au-delà du seuil fixé sera facturée à un prix supérieur. Combien ? On l’ignore encore : l’ILR doit étudier les propositions des gestionnaires de réseaux. Mais typiquement il coûtera plus cher d’allumer son four, de recharger sa voiture électrique ou de lancer une machine à laver le soir qu’en milieu de matinée, et il vaudra mieux éviter d’utiliser ses appareils en même temps si on ne veut pas voir sa facture exploser.
Pour justifier ce nouveau tarif, qui se veut « plus équitable » car il reflétera les « coûts réels d’utilisation », l’ILR met en avant l’évolution des usages dans un contexte de transition énergétique et table sur une augmentation des usages simultanés. « La hausse des flux est parfaitement gérable à l’heure actuelle, notamment grâce à l’excellente qualité des réseaux du pays. En revanche, elle devrait conduire, à l’avenir, à la nécessité d’augmenter la capacité requise sur les réseaux », explique l’institut, qui « invite » les usager·ères à « une plus grande flexibilité dans l’utilisation des réseaux ». Adapter la consommation aujourd’hui permettrait donc d’avoir moins d’investissements à faire sur le réseau à long terme, comme l’a également mis en avant la ministre Elisabeth Margue, dans sa réponse à une question parlementaire. « Le coût des développements de réseaux étant fortement influencé par des pics de puissance, ceux-ci déterminent la taille des équipements nécessaires au bon fonctionnement des réseaux », a-t-elle expliqué.
Un nouveau coup dur pour les ménages, alors que se profile également la hausse du coût de l’électricité ? À la fin de l’année en effet, le bouclier tarifaire, instauré en 2022 afin de limiter la hausse des prix de l’énergie, arrivera à échéance et, de fait, l’électricité augmentera dès le 1er janvier. Face aux spectaculaires prévisions du Statec, qui pronostique une hausse du prix de l’électricité de 60 pour cent, le gouvernement a finalement annoncé maintenir en 2025 une enveloppe de 171 millions d’euros destinée à supporter la moitié de cette augmentation, mais les consommateur·rices devraient tout de même payer l’électricité 30 pour cent plus cher.
Fin du bouclier tarifaire
Cette concordance des échéances a immédiatement été jugée « problématique » par Déi Lénk. La gauche pointe dans un communiqué l’opacité d’un « nouveau tarif [qui] sera de facto escamoté sur les factures d’électricité ». La nouvelle grille risque en effet de pénaliser les ménages les plus modestes, qui n’ont pas la possibilité de modifier leurs habitudes de consommation, faute de pouvoir faire du télétravail et de moyens pour acquérir des appareils intelligents et programmables à distance. Risquent aussi d’être pénalisé·es toutes celles et ceux qui se sont tourné·es vers la voiture électrique ou la pompe à chaleur, largement promues ces dernières années.
Le gouvernement pour sa part l’assure, « la nouvelle structure tarifaire aura très peu d’impact sur la majorité des clients » et « un dépassement régulier de la puissance de référence est tout à fait normal » − « il n’est donc pas nécessaire d’éviter ces dépassements à tout prix ». Pour celles et ceux qui disposent d’appareils à forte consommation, la ministre Margue suggère d’en limiter la puissance maximale et de ne pas les utiliser en même temps.
Si Déi Lénk dit n’être pas opposé par principe aux différents tarifs d’électricité, le parti estime cependant que cette nouvelle tarification n’encouragera pas les économies d’énergie, car elle ne prend pas en compte la consommation totale mais uniquement le temps de consommation. Surtout, les ménages luxembourgeois ne consomment que 15 pour cent de l’électricité totale, tandis que l’industrie, les commerces et les immeubles de bureaux en consomment 80 pour cent. Ce n’est donc pas à eux d’ajuster en priorité leur consommation, fulmine la gauche, pour qui la solution est toute trouvée : « Si la consommation d’électricité est trop importante pendant les heures de pointe en fin de journée, nous suggérons d’éteindre les surfaces publicitaires numériques et l’éclairage des vitrines pendant ces heures » !