Cet aller simple nous emmène vers Paris, destination que choisit impulsivement Claire, une avocate au succès professionnel quasi fulgurant. Une ascension qui lui attire non seulement des inimitiés, mais qui résulte aussi en une pression accumulée : la jeune femme déclenche la soupape de sécurité et quitte tout au milieu d’une réunion, sans aucune explication, pour prendre un billet pour Paris. Pourquoi la Ville Lumière ? Attirance d’un papillon aux ailes resplendissantes mais fragiles, peut-être. Mais on n’en saura pas vraiment plus. En effet, les quelque 150 pages que compte ce récit sont consacrées à l’introspection de l’héroïne, à la description par brefs retours en arrière de son atmosphère de travail, à l’exploration de son for intérieur pendant un trajet d’environ deux heures. Rares sont les événements ou les personnes qui ne sont pas dans sa tête. Les véritables raisons de ce départ précipité sont alors plutôt à chercher en chacun de nous, selon notre propre expérience.
On pourrait par conséquent facilement taxer le livre de psychologisant, puisqu’il se refuse à la narration pour privilégier l’intime. Heureusement, Nathalie Ronvaux évite l’écueil du nombrilisme – pas si simple de recréer l’atmosphère des pensées d’un personnage sur cette longueur. Calé sur la respiration de Claire, son style travaillé ménage après chaque court chapitre une petite sentence mi-poétique, mi-philosophique qui permet de ne pas broyer du noir. Car ce livre est aussi celui de l’espoir, celui du souhait d’échapper à la pression mortifère du conformisme. C’est pourquoi on y trouve des obsessions de vocabulaire, tel ce mot « échappatoire » qui revient comme un boomerang si souvent. Celles et ceux qui aiment les histoires aux multiples rebondissements et aux personnages hauts en couleur en seront pour leurs frais, certes. Mais cette histoire de fuite en avant dans l’air du temps pourra aussi convaincre, notamment grâce à une prose bien maîtrisée.