Rock
 : Le cas C.


Après plusieurs concerts annulés en France, Bertrand Cantat vient à la Rockhal la semaine prochaine. L’occasion aussi de revenir sur les polémiques entourant l’artiste.

À voir ou à ne pas voir : Bertrand Cantat sera à la Rockhal la semaine prochaine. (Photo : flickr)

Ce n’est jamais évident de parler, de s’approcher de Bertrand Cantat sans devoir redouter d’être réduit en miettes par ses détracteurs-trices. Disons-le d’emblée : Cantat n’est pas un artiste qu’on voudrait effeuiller avec des gants, mais plutôt traiter d’une main d’acier. Oui, il a battu sa compagne à mort et, même plus de dix ans plus tard, cela reste une abomination, sans aucune nuance possible. Par contre, pour celles et ceux qui ne veulent pas consommer de l’art produit par des monstres, jetez vos classiques de Voltaire (affreux raciste et défenseur de la colonisation), brûlez les romans de l’antisémite Céline et foutez votre coffret DVD Charlie Chaplin à la poubelle (pédophile, tout comme Claude François) – et la liste est loin d’être exhaustive.

Il serait donc judicieux ici de séparer l’œuvre de l’artiste et de ne pas céder aux démons de la polémique sur le fait que quelqu’un qui a purgé sa peine a le droit à une réhabilitation ou non. Une discussion de toute façon stérile, puisque aucun camp ne cédera sur sa vision des choses. Autant aller troller sur Facebook.

Car il ne faut pas oublier qu’avant qu’il assassine Marie Trintignant, Bertrand Cantat était pour beaucoup la voix de sa génération. Les premiers albums de Noir Désir, qui avaient démontré qu’un rock français populaire au-delà de Johnny Halliday était possible, ont marqué au-delà des frontières de l’Hexagone. Ils ont prouvé qu’on pouvait allier rock alternatif, paroles engagées, succès commerciaux et attitude critique contre le néolibéralisme tout en restant crédible. Ce n’est pas pour rien que celles et ceux qui ont grandi dans les années 1990 conservent toujours de l’émotion pour des disques comme « Tostaky », « 666.667 Club » ou « Des visages, des figures ».

Cette patine de crédibilité est partie à jamais pour Cantat. Désormais, il ne sera plus que la voix d’un type qui a tué sa copine, mais qui ne peut pas en parler. Écouter du Cantat maintenant, c’est se retrouver dans une situation paradoxale : on scrute les paroles pour y trouver la moindre indication sur le crime commis, alors qu’en même temps on est submergé par la volonté de retrouver le poète d’avant – parti à jamais.

Mais celui-ci a bien changé depuis qu’il a repris le chemin de la scène. Après la dissolution définitive de Noir Désir – il se serait comporté comme une ordure avec ses collègues, provoquant le départ du guitariste Serge Teyssot-Gay –, il fonde Détroit avec le bassiste Pascal Humbert. Les tonalités d’« Horizons », sorti en 2013, sont plus calmes que les débuts de Noir Désir et aucune chanson ne fait référence au sentiment de révolte qui caractérisait encore son ancien groupe. D’abord timide, le succès de l’album, qui se vend à 60.000 exemplaires, est indéniable.

Multipliant les collaborations, avec un accent mis sur les reprises et les interprétations, Cantat semble renouer avec son ancien métier, qu’on peut difficilement lui interdire. Son dernier disque en date, sous son propre nom, « Amor fati » (toujours avec Pascal Humbert et d’autres collaborateurs de renom, comme Érik Truffaz) a paru fin 2017 et sera proposé à la découverte des fans qui voudront le voir à la Rockhal.

À la Rockhal, le 27 mai.

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