Jeudi après-midi, alors que la rédaction de l’édition print du woxx avait déjà été clôturée, les premières informations sur le début d’importants travaux de démolition des maisons 15 et 39 de la rue Jean l’Aveugle apparaissaient sur les réseaux sociaux.
Le jour d’avant, les Lampertsbierger Geschichtsfrënn avaient invité vers midi à un point presse pour informer sur la démolition imminente de plusieurs immeubles historiques sis rue Jean l’Aveugle au Limpertsberg. Quelques heures plus tard, leur crainte s’avérait fondée. Alors que les Geschichtsfrënn partaient de l’hypothèse que la protection de la maison numéro 15 avait déjà été actée par la ministre de la Culture, ils et elles s’inquiétaient surtout du bloc des maisons 35-41, pour lequel l’association avait demandé le classement comme monument national, il y a cinq mois.
Jeudi soir, la ministre de la Culture, Sam Tanson a tenu à réagir à la situation par communiqué de presse. Elle confirme être actuellement saisie de différentes demandes concernant le classement en tant que monument national de plusieurs immeubles de la rue Jean l’Aveugle, dont précisément les maisons numéro 15 et 39.
Avant de formuler toute proposition de classement, la ministre indique avoir voulu entrer en dialogue avec les propriétaires des immeubles concernés, comme le prévoit la loi. Cette démarche sert entre autres à constater l’état intérieur des bâtiments. Le propriétaire de la maison 15 avait ainsi été notifié en février 2019, de l’intention de la ministre de proposer l’immeuble précité « au classement comme monument national, le lancement de la proposition de classement étant prévu sous peu ». Parallèlement, elle avait contacté le propriétaire de l’immeuble numéro 39, afin d’organiser une telle visite des lieux. Ces courriers seraient restés sans réponse.
Lorsque la ministre a appris mercredi en cours d’après-midi que les immeubles précités faisaient l’objet de travaux de réaménagement, voire même de démolition, elle a immédiatement finalisé les arrêtés ministériels concernant les propositions de classement des deux maisons pour lesquels les travaux avaient débuté. Les arrêtés ont été expédiés aux propriétaires en fin d’après-midi et ont pu leur être remis soit directement, soit par voie d’huissier au plus tard le matin du jeudi 23 mai.
« Les agents de l’État ont cependant constaté qu’à cette date ni les travaux au numéro 15 ni les travaux au numéro 39 n’ont été interrompus, alors même que l’article 5 de la loi précitée dispose que tous les effets de classement visés aux articles 9 à 15 s’appliquent de plein droit aux immeubles concernés, et ce à compter du jour où le ministre notifie au propriétaire sa proposition de classement », explique la ministre dans le communiqué.
Finalement, la police grand-ducale a été diligentée sur les lieux pour mettre fin aux travaux. Le Service des sites et monuments nationaux, quant à lui, a porté plainte contre les propriétaires des immeubles concernés pour ne pas avoir respecté les dispositions de la loi.
Comme le montre cette expérience, les dispositions actuelles de la loi sur la conservation des sites et monuments nécessitent une refonte complète. Une telle réforme, « impérative » aux yeux de la ministre, ferait partie de ses priorités politiques et les services de son ministère œuvreraient intensivement à la réalisation d’un avant-projet.
La « destruction volontariste et sans précédent d’une partie de notre patrimoine national, et ce, de surcroît, au mépris des dispositions légales en vigueur » constitue selon la ministre une situation inédite. Afin d’éviter d’autres situations de mise en péril du patrimoine, elle envisage, même avant la réforme de la loi, une révision des procédures internes relatives aux demandes de classement.