Clark Larry: Bully

Le cinéma a-t-il une morale? Selon notre critique Thibaut Demeyer, „Bully“ de Larry Clark en aurait du moins trop peu à revendre.

CINE ADO POUR PARENTS

Sex, drugs and money

„Je veux que tu me suces la bite et que tu me lèches les couilles …“. „Il a une queue sublime, il m’a broutée pendant plus d’une heure!“ Ces dialogues vous choquent? Alors, „Bully“ n’est pas pour vous, car le nouveau longmétrage de Larry Clark est un condensé de dialogues crus, de scènes de sexe pas toujours recommandables, le tout enrobé de violence. Déjà avec son film „Kids“ (1995), Larry Clark avait alimenté les conversations du public. Avec „Bully“, il se base sur un fait divers atroce, pour aller encore plus loin dans la provocation. Si au niveau de la technique cinématographique pure et de la mise en scène, il n’y a pas grand-chose à redire, on peut s’insurger sur le fond de l’histoire.

En effet, lors de la présentation de „Bully“ au festival de Deauville en 2001, Larry Clark déclarait que le film avait été réalisé pour prévenir les parents de ce qui pourrait les attendre. Certes, „Bully“ aurait pu jouer le rôle d’un détonateur auprès de ceux-ci, qui n’assument pas toujours convenablement leur rôle en matière d’éducation. Mais la manière dont est fait le film aurait plutôt tendance à provoquer l’effet inverse. Faut-il soigner la violence par la violence? Faut-il montrer carrément les choses pour éviter de les reproduire?

Nous sommes le 14 juillet 1993. Un adolescent du nom de Bobby Kent est retrouvé mort. Il a été frappé à coups de bat de base-ball et de couteau, avant de se faire trancher la gorge. Les auteurs de ce meurtre ne sont autres que ses „potes“ et, surtout, son meilleur ami Marty: Tous des jeunes livrés à eux-mêmes et drogués jusqu’à la dernière neurone. Le mobile? Une simple vengeance: Marty en avait marre de subir la domination que Bobby exerçait sur lui. Alors, avec la complicité de six autres amis, il décide simplement de tendre un piège à Bobby et de le faire passer de vie à trépas.

Violence, quand tu nous tiens

„Bully“ est un long métrage dérangeant, accusant la société américaine de la mauvaise éducation de ses enfants. De nos jours, le cinéma américain ne parle plus de drogues, de violence et de sexe en pointant uniquement du doigt les classes sociales défavorisées. Avec „Bully“, ce sont les gosses de riches qui se trouvent dans le collimateur. Des gosses qui ont tout et qui ne savent plus comment dépenser l’argent de papa. Des jeunes qui sont surtout en manque de sensations fortes. Dès lors, ils font n’importe quoi pour passer le temps.

Malheureusement, le film s’axe avant tout autour de scènes de sexe sans grande pudeur et de balades en bagnole sans grande utilité. Ainsi, lorsque arrivent les scènes de préparation du meurtre et le meurtre lui-même, on regarde tout cela avec une parfaite indifférence. Larry Clark n’est pas parvenu à nous arracher quelques sentiments et encore moins à rendre ses personnages attachants. Même avec des circonstances atténuantes, le public ne réagira pas aux sentences infligées à la bande de meurtriers.

„Bully“ aurait dû être un film pour faire réfléchir les parents mais, en définitive, il sera perçu comme l’enième histoire de meurtre et donc vite oubliée.

De plus, le film étant interdit au moins de 17 ans, les premiers concernés ne pourront même pas le voir. Quant aux parents, bien souvent ils évitent ce genre de longsmétrages car, bien entendu, ces drames n’arrivent qu’aux autres. En revanche, si Larry Clark avait levé un peu le pied sur certaines scènes et conçu son film plus dans le sens de l’étude sociologique, peut-être que „Bully“ aurait eu un effet plus positif et aurait pu jouer son rôle d’avertisseur, car il aurait pu être visionné en famille.

Mais hélas, il n’en est rien et en évitant tout jugement, toute condamnation, en décrivant froidement la pauvreté existentielle de la jeunesse dorée américaine d’aujourd’hui, il ne titille pas le public là où il faut, quand il le faut. Résultat: le spectateur regarde le film avec un certain recul et ne se sent jamais vraiment concerné par ce fait divers. Après tout, cela n’en fait qu’un de plus sur une liste déjà longue.


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