Coline Serreau: Trois hommes et une ado

„Trois hommes et un couffin“ avait-il besoin d’une suite? Au vu de „18 ans après“ on n’en est pas persuadé.

CINE FRANCAIS

Mille neuf cent quatre-vingt cinq, Coline Serreau décroche son ticket pour la gloire avec son premier long métrage „Trois hommes et un couffin“, en devenant la première réalisatrice à obtenir le César du meilleur film. Curieusement, alors que ses documentaires, tournés avant, défendaient la condition féminine, c’est un film avec uniquement des hommes qui lui offre ce grand succès public que toute une génération n’est pas prête d’oublier. Entre-temps, Coline Serreau tournera d’autres longs métrages, mais sans jamais renouer avec le grand succès.

Dix huit ans après, elle se met à inventer une suite aux aventures de Marie et de ses trois papas célibataires qui, mis à part André Dussolier, lui doivent en grande partie leur notoriété. Pour Marie, l’heure du bac a sonné et c’est non sans une certaine angoisse que ses pères adoptifs vont l’aider à le passer. Une fois celui-ci en poche, Marie s’envole dans le Sud de la France, en compagnie de sa mère revenue d’Amérique et ce, accompagnée par son nouveau mari et ses deux fils. Pour Marie, c’est l’époque des amours qui se nouent et se dénouent alors que pour ses trois papas, le fait de voir leur petite Marie grandir les angoisse profondément.

Ce qui avait fait la force de „Trois hommes et un couffin“ était l’atmosphère si tendre du film où, sans crier gare, trois hommes célibataires, qui aimaient vivre en toute liberté, sans contrainte, se retrouvaient soudainement avec un bébé sur les bras et toutes les obligations qui s’ensuivent. Les gags s’enchaînaient sans temps morts et les hommes étaient montrés du doigt pour, en fin de compte, tirer admirablement leur épingle du jeu, prouvant que tout compte fait, l’homme peut aussi prendre des responsabilités familiales quand il le veut.

Dans „18 ans après“, on ne ressent plus ces moments privilégiés et tendres entre les trois papas et Marie. Ceux-ci sont relégués à l’arrière plan et Marie se retrouve au milieu de l’écran où elle n’est pourtant pas une héroïne à part entière, puisque Coline Serreau présente trop de personnages en même temps et chacun d’eux a une histoire à raconter.

Line Renauld joue une fois encore la nounou au grand c´ur, prête à tout pour déjouer l’autorité parentale, éclipsant sans difficulté Marie, alias Madeleine Besson, et les gags font cruellement défauts. Ceux-ci sont tellement rares, qu’ils se retrouvent tous dans la bande annonce. En fait, „18 ans après“ n’a rien d’une suite, mais ressemble plutôt à un pamphlet sur les amours de jeunesse et les problèmes d’adolescents issus directement de ceux de leurs parents. Comme pour l’amie de Marie, qui décide de fuguer parce que sa mère, divorcée, n’est pas assez présente.

Un plat fade

Dans cette ´uvre, Coline Serreau tourne en rond et ne sait plus très bien où poser la caméra. Elle nous raconte le malaise de Marie face à l’amour, sans approfondir la chose, puis passe aux problèmes des adultes, qui ont du mal à accepter le temps qui passe, en s’arrêtant sur un jeune ado prêt à tout pour se faire remarquer par Marie. Mais le pire dans l’histoire, c’est que l’on devine tout bien avant que la situation n’arrive sur l’écran. En fait, „18 ans après“ est une accumulation sans goût d’un tas de petites histoires, qui auraient bien pu se retrouver dans d’autres films. Restent les scènes avec André Dussolier, Roland Giraud et Michel Boujenah. Lorsqu’ils se retrouvent seuls, ils redonnent un léger souffle au film et nous replongent directement dans l’ambiance du premier opus grâce à quelques scènes admirables, comme leurs petites chamailleries lors du déjeuner ou tout simplement lorsque Roland Giraud décide de rompre avec Marie Sophie L., tout comme vient de le faire Michel Boujenah avec celle qu’il croyait être l’élue de son c´ur.

Sans grande originalité ni effet de surprise, „18 ans après“ nous est présenté un peu comme un plat fade, qui prouve que tout compte fait, même avec autant d’années, „Trois hommes et un couffin“ n’avait absolument pas besoin d’une suite, l’histoire en elle-même ne la réclamait déjà pas à l’époque.

Thibaut Demeyer


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