BILL MAHER: Ridiculous

Avec « Religulous », l’humoriste américain Bill Maher réalise un film qui aurait pu sortir il y a cinq ans. Mais il n’est jamais trop tard pour se réveiller de la torpeur religieuse.

Des visionnaires entre eux…

D’accord, c’est un film fait par et pour les bouffeurs de curés. Mais pas seulement les convaincus d’avance devraient le voir, car il offre d’intéressantes vues de l’intérieur de la foi.  Le principe est simple : Bill Maher rencontre des gens croyants, connus ou inconnus, et leur pose des questions sur leur foi en gardant tout de même ses distances. Disons qu’il les approche avec un mélange de curiosité et de cynisme. Curieux quand il croit comprendre, quand il est d’accord avec l’une ou l’autre des opinions de ses interlocuteurs, cynique et tranchant quand il découvre l’absurde derrière les présumées croyances.

Thématiquement, Bill Maher ne sort pas des ornées prétracées par tous les militants athéistes avant lui. Il questionne notamment les liens qu’entretiennent église(s) et politique, les conflits entre religieux et militants homosexuels ainsi que les différends intercommunautaires.

Pour cela, il parcourt les Etats-Unis, Israël et l’Europe – où il s’arrête à Amsterdam, le temps de fumer un pétard et s’entretenir avec le fondateur d’une église du hasch et quelques Musulmans et à Rome où il mène une discussion hilarante avec un prêtre dissident. Aux States, nous faisons connaissance avec quelques exemplaires les plus choquants de la manifestation de la foi. Du trucker qui le menace « If you question my god, you have a problem !!! », en passant par les Mormon-e-s et ex-Mormon-e-s et leurs idées saugrenues (saviez-vous que les Mormon-e-s croient que les Indiens sont la douzième tribu d’Israël et que le paradis était localisé quelque part dans le Missouri ?) pour arriver au Holy Land. Qui n’est rien d’autre qu’un Disneyland à la chrétienne, et au lieu de la parade de Mickey, les enfants assistent au chemin de croix, flagellations incluses. L’interview que Maher mène avec Jesus – ou le type qui le joue chaque jour – est une des plus hilarantes. Mais il y a aussi moins drôle : le directeur d’un autre parc d’attractions consacré à la création – donc qui montre des tyrannosaures robotisés jouer avec des gosses néanderthaliens – n’apprécie guère les doutes de Maher. Quand le zoom de la caméra approche ses yeux, on peut presque entendre craqueler le feu de la haine qui brûle derrière eux. C’est tellement désagréable qu’on aurait envie de quitter la salle. Pourtant, le reste du film vaut le coup : une interview avortée avec un rabbin anti-sioniste, avec des militants pro-gays musulmans et un rappeur néerlandais offrent beaucoup d’autres points de vue. Sans oublier le highlight ultime du film : une conversation avec un autre Jésus, un télévangéliste qui croit dur comme fer être la seconde incarnation du Christ. Le problème, c’est que son église rassemble déjà 100.000 adhérent-e-s.

Mais l’essentiel reste : la foi rend con-ne. Que ce soit aux States, en Israël ou dans un coffee shop d’Amsterdam, les croyant-e-s s’exposent toujours au ridicule, mais pas parce qu’ils ont été attaqué-e-s, c’est par leur totale incapacité de questionner leur foi, de douter ne serait-ce que pour une seconde de leurs idées qu’ils révèlent leur incapacité au dialogue. L’athée, celui qui doute et ne demande qu’à être respecté pour cela, n’a pas sa place dans ce monde, à ce qu’il paraît. Même s’il continue d’assurer ses partenaires de son entier respect pour leur foi, il reste un infidèle. Comme si le fait de ne pas croire était déjà une offense.

En fin de compte, on sort du cinéma bien détendu, on se marre de ces fanatiques qui croient à toutes ses histoires farfelues et on s’apprête à oublier le film. En démarrant la voiture, on se rappelle tout de même que notre chef d’Etat, le grand-duc, appartient lui aussi à un club spécial, le renouveau charismatique qui croit entre autres que Dieu peut parler à travers les corps de ses croyants, en araméen dans le texte, bien entendu. Bon, c’est peut-être pour cela que personne ne comprend ses discours, se dit-on. On met la première pour sortir du parking et on commence à avoir peur?

Religulous, à l’Utopia


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