JAZZ: Pur luxe

Le vibraphoniste Pascal Schumacher vient de sortir « Face to Face », un album en duo avec le pianiste Jef Neve. Le woxx s’est entretenu avec lui sur cet enregistrement original.

A l’aise même au bord du gouffre : Pascal Schumacher et Jef Neve.

woxx : Jusqu’à présent, tous tes disques étaient enregistrés en quatuor. D’où vient l’idée de faire un album en duo ?

Pascal Schumacher : Jef Neve a toujours fait partie de mon quatuor et a joué sur nos trois premiers disques. Un jour, tout au début de notre cheminement, nous avions un engagement dans un club de jazz à Anvers, et cela plusieurs lundis de suite. Mais pour la première date, le contrebassiste et le batteur se trouvaient encore en vacances et nous avons donc joué ce concert à deux. Les réactions furent très positives et on nous demandait pourquoi nous ne jouerions pas plus souvent en formation réduite. Petit à petit, nous nous y sommes habitués, surtout pour les dates où les autres membres ne pouvaient pas venir. Puis, les organisateurs qui voulaient commander une performance du quator ont commencé à nous demander s’il n’était pas possible d’avoir le duo à moitié prix. Ce qui nous a renforcé dans l’idée de faire quelque chose à deux. Vu qu’entre-temps le quatuor a un nouveau pianiste, Franz von Chossy – puisque Jef Neve avait un trop-plein sur son agenda – on a décidé de continuer à travailler ensemble en duo. Pour moi c’est une situation de pur luxe, puisque je peux travailler avec deux pianistes sensationnels.

Ton approche dans la composition des morceaux est-elle différente selon la formation avec laquelle tu joues ?

Non, pas vraiment au niveau de la composition elle-même. La différence se situe plutôt au niveau de l’orchestration et des arrangements. Vu qu’on n’est qu’à deux, la palette des dynamiques possibles s’élargit conséquemment. On peut y aller beaucoup plus doucement, plus piano comme on dirait en musique. C’est un grand plus, à côté de la plus grande liberté d’un duo – car on tombe plus facilement d’accord qu’à quatre. Et avec Jef, l’harmonie est parfaite vu qu’on se connaît depuis très longtemps et qu’une grande amitié nous lie. Et puis, musicalement nous avons des goûts presqu’identiques.

Le jazz traditionnel a connu beaucoup de bouleversements ces dix dernières années, avec des groupes comme EST ou encore The Bad Plus. Travaillez-vous dans la même direction?

EST – qui ne sont malheureusement plus – et The Bad Plus sont des formations qui montrent des approches très différentes dans leur musique. Tandis qu’EST ont beaucoup expérimenté avec l’électronique, The Bad Plus sont restés des puristes de l’acoustique. Pourtant, ce que les unit c’est leur fonctionnement de groupe de pop. Ainsi, ils voyagent toujours avec leur technicien du son, ce qui est très atypique dans le jazz. Le technicien fonctionne comme un membre du groupe, puisqu’il influence leur son de façon décisive. Je pense d’ailleurs faire la même chose avec le quatuor dans le futur, avec lequel nous travaillons sur un nouveau disque.

Qu’en est-il de reprises de morceaux pop ? The Bad Plus pratiquent cela depuis leurs débuts et sur ton dernier disque avec le quatuor on trouvait une version d’un morceau de Travis.

Actuellement, nous essayons de faire une version de « Teardrop » de Massive Attack avec notre quatuor. Mais ce n’est pas sûr que cela nous réussisse – si nous n’arrivons pas à ajouter quelque chose d’intéressant à l’original, on laissera tomber.

Pourtant, le phénomène de faire des versions de chansons contemporaines est plutôt nouveau dans le jazz.

Au contraire, c’est une évolution totalement logique. Des musiciens comme Miles Davis ou John Coltrane ont fait des versions des musiques contemporaines de leur époque. Ils sont allés voir par exemple les musicals populaires et ont introduit les meilleures mélodies dans leur musique. Donc, pour un musicien c’est tout à fait normal de s’intéresser à ce qui se passe dans les autres branches. Il suffit de trouver une chanson qui fonctionne.

Le duo Pascal Schumacher et Jef Neve jouera entre autres le 10 mai et le 2 juin à la Philharmonie, ainsi que le 4 juin au centre culturel de Schuttrange.
Plus d’infos: www.pascalschumacher.com


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