L’ex- « banquier le plus puissant du monde » se retrouve donc dans une cellule de Ryker’s Island. Et alors ? Alors, tous les enjeux politiques du moment disparaissent sous une avalanche de clichés.
Y en a un qui doit avoir la pêche…
Dominique Strauss-Kahn est-il vraiment débile à ce point de commettre un viol juste avant un probable tournant décisif dans sa carrière ? Ou, est-ce – comme le croient 57 pour cent des Français – un complot ourdi par des forces obscures ? Si oui, à qui profiterait le crime ? A Sarkozy et à Poutine, comme DSK l’aurait fait comprendre, en off, à un journaliste de « Libération » ? Aux Américains du FMI qui ne voyaient pas d’un bon oeil un Français, « socialiste » de surcroît, à la tête du FMI ? Et puis, va-t-on jamais savoir la vérité ? Très probablement non.
Même s’il est condamné, les théories du complot subsisteront. Tout comme les soupçons subsisteront dans le cas où il serait innocenté. Rien ne sert donc à invoquer l’image d’un « charmeur » dont les avances auraient été mal comprises, comme le prétendent ses lieutenants politiques en France. Ni de faire appel à des psychiatres médiatiques qui un jour expliquent que le lien entre pouvoir et sexe est inextricable, pour dire le contraire quelques jours plus tard, quand on le leur demande. On ne peut dès lors que spéculer sur ce qui va se passer. Probablement, la bataille des opinions entre Américains qui voient en chaque Français un pervers et violeur en puissance et les Français qui croient l’outre-Atlantique peuplée de fascistes pudibonds, va entraîner des complications diplomatiques entre la France et les States. Cela dit, tout le cirque qui est fait autour du soi-disant traitement humiliant de DSK est futile : primo, il bénéficie toujours d’un traitement de faveur en étant placé en cellule isolée. Deuxio, si c’était l’inverse – donc un directeur du FMI américain qui aurait été accusé des mêmes méfaits en France – le traitement serait le même. Et personne ne peut prétendre que les prisons françaises seraient plus « humaines » que celles des Américains.
Donc, la seule chose dont on peut être certain dans cette affaire, c’est que rien n’est sûr. Et puis, qu’est-ce que cette minable – et non pas minime – affaire a à voir avec les agissements de DSK au sommet du FMI ? Le FMI, cet organe qui subvertit la démocratie des pays endettés en leur imposant des programmes de rigueur de plus en plus atroces, voire impossibles à supporter, comme on le voit dans le cas le plus récent de la Grèce (voir page 8). Le « socialiste » DSK a-t-il humanisé la politique du FMI ? La réponse est non, même s’il faut admettre que seuls des lunatiques auraient pu croire qu’il changerait quoi que ce soit à la politique néolibérale de cet organe toujours dominé par l’influence américaine qui en financent la grande partie. Mais pourtant, c’est à cette échelle qu’on aurait dû évaluer la performance et la vision de l’homme politique DSK et non pas à ses dérapages, aussi graves soient-ils. Ce qu’on vit autour de l’affaire DSK, c’est un gigantesque écran de fumée. Entretemps, les dettes se creusent et les pillages du FMI continuent en douce. Et c’est ça le véritable drame.
