AFFAIRES ÉTRANGÈRES: Deux et deux font quatre

L’attitude de Jean Asselborn en matière de politique étrangère et européenne est raisonnable. A défaut d’être révolutionnaire.

Plaider pour la solidarité même si elle a un coût, rappeler la dépendance du Luxembourg au risque de froisser les patriotes, insister sur des principes idéalistes quand les relations internationales sont de plus en plus marquées par le cynisme, tout cela ne va pas de soi. La déclaration de politique étrangère et européenne de Jean Asselborn avait une orientation clairement progressiste.

« L’Union européenne a comme image de marque la solidarité, donc l’inclusion (…) Le but ne peut pas être d’oeuvrer à exclure certains pays de la zone euro. » Parce que l’exclusion d’un pays risque de provoquer l’effondrement de l’euro, et à son tour celui de l’union politique, Asselborn plaide pour « aller de l’avant et approfondir l’intégration européenne » face à la crise actuelle. Quant au projet d’une zone euro « dure », il reprend le qualificatif de Jean-Claude Juncker : « une idée stupide ». Autre évidence : le Luxembourg a besoin de l’Union. « Si ces tendances nationalistes s’imposaient, ce serait une évolution négative pour tous les Etats membres », et, selon le ministre, « mortelle pour notre pays ».

Asselborn met en avant les deux principes de « la solidarité et la solidité ». Notons que, si la solidarité n’allait pas de soi pour certains autres pays européens, l’exigence du ministre socialiste envers les pays faibles laisse rêveur : qu’ils se montrent à leur tour « solidaires » en adoptant des « mesures pour améliorer leur propre situation ».

En matière d’élargissement, c’est également la générosité qui prime : Asselborn soutient l’adhésion de la Croatie en 2013, suivie par le Monténégro, et à terme l’ensemble des pays issus de la Yougoslavie. Il se prononce également pour une poursuite des négociations avec la Turquie. Moins généreuse est sa petite phrase sur la problématique des réfugiés : « L’abus et l’afflux massif de `faux demandeurs d’asile‘ doit cesser, pour que la libéralisation des visas puisse être maintenue. »

Asselborn renouvelle son soutien à la demande palestinienne d’admission à l’ONU, et estime que le mur et les fils barbelés mis en place par
Israël contribuent à faire croître l’humiliation, la frustration et la haine, « qui conduira inévitablement à de nouvelles violences ». Concernant les visées nucléaires de l’Iran, il appelle à comprendre « la peur et l’inquiétude d’Israël, qui se sent visé », ainsi que la nervosité des Etats du Golfe. Mais pour le ministre, « une frappe militaire n’est pas une option ».

Mais le « faucon de Steinfort » ne s’est nullement mué en colombe : « En Libye, un conflit sanglant était nécessaire pour faire tomber la tyrannie quadragénaire. » On se souviendra qu’Asselborn avait été parmi les premiers à réclamer une intervention militaire en évoquant le risque d’un « génocide ». La manière dont le ministre défend l’Otan et son partenariat avec la Russie confirme qu’il a pleinement intériorisé le principe « deux poids deux mesures ».

Le fait que lors du débat de mercredi, le seul ADR ait attaqué de front la déclaration relativement progressiste d’Asselborn peut réjouir, mais souligne aussi la modération des propos. On regrettera que l’ADR ait pu rebondir sur les « faux demandeurs d’asile », et que les recettes du socialiste au niveau européen restent très mainstream. Sur ce dernier point, il a essuyé les critiques de ses camarades de parti : Lydie Err a exprimé son malaise face aux gouvernements de technocrates issus des milieux financiers. Et, surprise, Ben Fayot, de l’aile droite du parti, a mis en garde contre le ras-le-bol des populations et réclamé une régulation stricte du secteur financier.


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